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Rumination du 9 avril 2016
Je remplis le petit bassin bleu
en le plaçant sous la douche du jardin .
Comme le pommeau de la douche est ancien et rouillé
La rosée gicle dans plusieurs directions
et dans cette fine bruine l'arc en ciel semble très solide
et copieux , plus dense que
lorsqu'il apparait au dessus de la baie .
Je m'assois sous la cascade artificielle
mais voilà que Noa mon petit enfant
coupe l'eau parce qu'il veut entrer aussi dans la piscine minuscule
où nous tenons juste tous deux assis face à face
avec entre nous un petit bateau en plastique jaune
dans lequel est posé un cheval miniature made in China
crinière verte et robe verte tatouée de violet.
Je brosse le dos de Noa ,il ne craint pas ce crin dur
qui chasse les démangeaisons des fourmis rouges croisées dans le jardin
et je brosse mon épaule où sûrement
des acariens se sont postés presqu'invisibles
et me démangent lorsqu'ils s'éteignent sous la peau.
Ce corps parait-il est toute une société
d'animalcules et de cellules plus ou moins conscientes
et peut-être est-ce la raison
qui fait que certains corps ne se décomposent pas
ayant trouvé un branchement vers la perpétuité.
Pour moi ce n'est pas là
que je postule à l'éternité de l'Amour
mais plutôt en me consumant tout entier
pour donner un élan de plus à la conscience
et qu'elle s'élève comme un ballon dirigeable.
Il faut du moins qu'elle sache où et comment naviguer
à l'écoute dans le rêve purifié des égos monstres.
J'essaie d'inspirer confiance à mon fils Noa au fil de l'eau
dans la position de la planche où je soutiens son petit corps
mais il craint de couler, il n'est pas calme
et ne respire pas à fond sereinement
pour flotter comme un ballon.
Par contre quand je le conduis à la plage,
il ne craint rien, pas même les trous d'eau, il se précipite
et s'y noierait si je n'avais en permanence l'oeil sur lui.
C'est que le sable descend vite vers les eaux profondes
Il arrive que des requins s'approchent du bord
comme pour brouter ...mon voisin me rassure
Ce seraient des requins dits dormeurs
Leurs dents sont si petites qu'ils ne pourraient gober
que des crustacés minuscules tapis sur le fond.
Le lagon scintille et l'arc en ciel se lève
devant la montagne en forme de guitare.
En vain j'ai tenté de photographier le colossal portique,
de couleurs, mais il ne se fixe pas pour l'instant sur l'image .
Au retour de la plage l'autre jour
j'ai vu qu'on m'a volé pour la deuxième fois ma roue de secours
et pour la deuxième fois aussi les soutien-gorges et slips de Nim
aussi lorsqu'elle n'est pas à la maison ou dans le jardin
je remplis le petit bassin bleu avec l'eau douce de la douche
Et c'est là que l'enfant presque toujours s'apaise.
Nous vivons au lieu-dit Vai Pipiha, ce qui signifie
l'eau qui jaillit , elle traverse et fend la pente
dans le ravin au sud de notre jardin
les jours de pluie seulement, et l'on voit de Paopao sur la montagne
trois cascades surgir de la verdure et de la roche.
Mais que toute eau nous donne la patience
de déchiffrer de loin les peines les fardeaux ,
les couteaux sous la gorge tenus par des fantômes mortels
prétendant m'enseigner le Réel , qu'ils se débrouillent sans moi ...
Je suis fatigué de leurs menaces qui m'assiègent
et je résiste en respirant encore et toujours
les couleurs de l'arc en ciel et en faisant fuir
le chat qui veut briser le couple de tourterelles 'ū'upa
avec qui je partage ce jardin, elles picorent dans l'herbe
des graines que je n'identifie pas.
L'arbre purau a laissé tombé une feuille
en forme de coeur sur ma poitrine
en signe d'amitié éternelle j'en suis certain
car on a vu des hommes ou des femmes
trahir des arbres mais jamais le contraire .
Les arbres tiennent toujours leurs promesses
du tronc jusqu'aux branches cassées ou élaguées
perchoirs pour les vinis et les merles dits des Moluques.
Cependant je ne nie pas que les arbres aimables
sont assiégés par d'autres obsédés par leur démographie,
acacias et herbes aux graines piquantes qui s'accrochent sur le passant
et qu'il faut arracher pour pouvoir danser sur le sable....
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