• Opus 1842, version du 6 novembre 2022

    LA CHUTE QUE L’ON A PRIS POUR VIE

     

    Qu’est-ce qui serait plus cruel

    que la prison injuste et les harassements

    sinon de s’éveiller dans son cercueil  cloué

    après que l’on fût cru mort et enterré?

    Voilà ce que craignait ma mère  ,Yvette

    et pour cela elle voulait être brûlée

    et qu’on mêle ses cendres à la terre

    au pied de l’arbre de la Sainte-Baume

    où elle avait cueilli son premier champignon

    reconnu comme non vénéneux, bon à manger.

     

    Je ne comprenais pas enfant , pourquoi ,

    arrivé à Marseille par bateau

    avec elle et mon père Ferdinand

    après être passé devant la colline des singes à Gibraltar

    Il fallait désormais se passer de jardin,

    Et vivre  entre des murs  avec un  couloir étroit,

    traverser l’asphyxie nauséabonde qui pourtant

    paraissait déléctable à tant de rats ,de cafards ,

    et même à quantité d’hommes, femmes et enfants

    addictés au prestige des distractions toxiques des villes.

     

    C’était pour moi déjà la mort à petit feu, une angoisse

    de somnambule acrobate au cœur de l’endormissement

    Oh oui que je sombre plutôt dans le sommeil profond

    Pour me refaire  dans le ciel des immortels ou au moins

    m’éveiller face à face avec les monts enneigés de l’Atlas

    Oh oui que je grandisse encore en vis-à-vis

     Des eaux qui submergèrent  dit-on une  Atlantide !

    Pourquoi mon père fit cesser mes doigts sur le piano

    qui faisait se lever mon chant ma danse à Agadir ?

     

    Pourquoi  ensuite dus je voir  tant de villes s’accroître  non-stop

    et débordersur toutes les campagnes où je vécus par la suite ?

    Pondichéry, Tahiti, Den Pasar à Bali , et pourquoi

    ceux qui fuient la campagne l’associent à l’ennui

    lui préférant la servitude volontaire à travailler la terre,

    et bradant la verdure héritée  ou conquise

    et méritée par des travaux sensés , le labeur-jeu fertile ?

     

    Et pourquoi taxe –t-on d’indécence la nudité 

    en  appelant péché et tentation ce que la conscience

    ordonne  au sexe d’engendrer  par instinct inconscient ?

    Partout , même dans les paroles il reste scandaleux

    de déchirer les voiles qui déguisent la piraterie,

    les vrais péchés de l’orgueil populaire et des tyrans icônes ?

     

    Ces murs ne protègent plus des razzias  mais asservissent

    et si je resister à l’appel  de déchirer l’ensorcelement

    des vêtements et des œillères pour les bras et les jambes

    ce n’est que bien caché que  j’écoute sans crainte

    mes fontaines d’atomes, les yeux ouverts et fermés

    Et ce n’est que sur scène ou loin de tout témoin

    que je peux tâtonner  rayonner , réinventer ma forme

    sans  que les regards des soumis  et des dominateurs

    deviennent  astralement coupants comme couteaux-cuisine

     

    il est bien loin le temps où sur les quais du vieux port à Marseille

    les saltimbanques sur leur seule inspiration partageaient leurs talents

    Désormais pour l’espace public il faut faire processions

    Dans les bureaux des services compétents pour des autorisations

    Et j’ai entendu même sur la plage une mère dire à son enfant :

    « Ne le le regarde pas , ce fou qui danse au lieu de se poser

    Viens plutôt , j’ai du pain-beurre et de la confiture si tu as faim »

     

    Et voilà qu’avec le  jour qui avance vers midi,

    des groupes affluent avec leurs décibels et leurs alcools.

    Les murs sont dans la tête avec leurs bruits à l’extérieur

    d’adaptation  et de consentement aux industries d’hypnose

    dont l’ivresse détourne de l’infini ce qui n’est pas payant.

     

    O faux médicaments , boutiques où s’achètent

    La caricature de joie revendiquée  à faire fuir les méditants

     

    Oh saccage du temple des forêts pour élever des sancruaires

    Aux  fleurs du mal avec quelques reflets de vraie beauté

    Fugace…  Où donc fuir, s’isoler, seul ou en groupe au delà

    de ces enfers tonitruants se clamant paradis ?

     

    Peu à peu les jardiniers qu’étaient supposés devenir

    les primates humains désaddictés des mirages de leurs chutes

    ont sacré les hiérarchies qui transforment la planète en tombeaux

    où le grand air du large est diffmam ou distillé au compte goutte

     pour que survivent les zombis du monde virtuel

    car même pour atteindre les lupanars et les abattoirs

    où éteindre l’ennui il leur faut des bouffées d’oxygène


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  •  A la fin de la lettre en espagnol au Defensor del pueblo, on trouvera des liens vers les scans des papiers présentés et que la fonctionnaire du bureau d'immigration d'Ibiza prétend ne pas avoir vu, ainsi que la lettre où elle confirme sa version, sont accessibles , avec leur traduction en espagnol, par les liens fournis plus bas.

    Le 24 avril 2014 nous avons reçu une lettre de l'immigration d'Ibiza nous signifiant le rejet de la demande de carte de séjour  de mon épouse Nimozette . La télévision parle d'actuelle chasse aux sans-papiers pour les expulser de l'île de Formentera où est notre domicile . La chef de bureau nous reproche de n'avoir pas fourni des papiers que nous avons en fait fournis , ce qu'a reconnu un avocat (mais une fois au bureau il s'est contenté de répéter le verdict de l'immigration).La chef du bureau d'immigration à Formentera a également reconnu que les papiers étaient complets mais elle ne peut rien pour contrer sa supérieure d'Ibiza. Ce qui manquerait, c'est : 1/ la preuve du mariage, 2/la preuve d'une assurance maladie, 3/la preuve de revenus suffisants. En fait nous avons fourni toutes ces preuves , et donc nous ne savons pas comment réagir à une mauvaise foi aussi délibérée et c'est pour cela que nous vous contactons pour vous demander conseils et aide. Je donne maintenant le détail de ce que nous avons fourni, avec la traduction du traducteur agréé, et qui est déclaré non fourni :

    1/Nous avons présenté un certificat de mariage par le consulat français de Douala , il était de plus de trois mois , mais accompagné un certificat de naissance  de moins de trois mois de l'Etat civil de Nantes qui,alors  en train de corriger une faute dans le nom de mon épouse, ne pouvait pas nous donner de certificat récent de mariage (il le peut désormais). Cependant la chef de l'immigration d'Ibiza nous avait dit que serait recevable  une actualisation de moins de trois mois de notre certificat de mariage camerounais par l'ambassade d'Espagne à Yaoundé, qui nous a facturé son avocat, et par le ministère des affaires étrangères du Cameroun. Nous avons présenté ces papiers , puis a fonctionnaire a dit que cela ne prouvait pas que nous n'ayons pas divorcé  depuis leur délivrance.

    2/ Nous avons présenté une attestation de ma caisse de prévoyance sociale de Polynésie Française dont je suis ressortissant qui a donné à Nim en tant qu'épouse de français un numéro pour tout remboursement médical mème à l'étranger . Là on nous a demandé la preuve que la couverture maladie était aussi complète que celle d'une assurance espagnole. Alors la CPS de Polynésie Française  nous a fourni des documents signés et tamponnés  donnant des détails sur cette couverture, supérieure à celle des assurances d'Espagne. Comme cela ne suffisait pas encore pour le bureau d'Ibiza qui n'a même pas lu le papier, mon épouse  a cotisé à l'assurance de la banque Caixaet cette assurance  CAIXA prend en charge  actuellement dans sa clinique  le processus de mon épouse  vers l'accouchement.  On accuse mon épouse d'ètre sans assurance alors qu'elle est couverte par deux .

    3/On m' accuse de ne pas avoir de revenus suffisants pour accueillir mon épouse en Espagne. Or, j'ai fourni la preuve de ce que je bénéficiais d'une pension de retraite et d'une retraite complémentaire et que le montant total est légèrement supérieur au minimum de 880 euros  exigé par le règlement actuel de l'immigration espagnole tel qu'il m'a été montré par ce bureau. De plus il fallait montrer un certificat bancaire de 8700 euros de réserve, ce que j'ai fait. Mais comme sur le titre de propriété de mon domicile il est mentionné que le terrain est en indivision avec mon ex-épouse, la chef de bureau a dit que je devais présenter une somme de 15500 euros  car j'avais à ma charge 4 personnes. Elle n'a pas voulu les certificats de revenus de mon ex épouse et de son conjoint. J'attendais donc pour relancer  ma demande que soit finalisée la succession de ma mère veuve, récemment décédée

    Mon épouse craint de continuer à se rendre au cours d'espagnol pour étranger de crainte d'y ètre arrètée et d'entrer dans le cycle rétention, expulsion, interdiction de séjour. Cette lettre du 24 avril donnant la preuve écrite de ce que le bureau d'Ibiza prétend  que des documents manquent alors que je peux donner la preuve de ce qu'ils existent, et qu'ils auraient pu être transmis pour décision au bureau de l'immigration de Majorque .Comme elle doit régulièrement prendre le bateau pour la clinique d'Ibiza, il serait catastrophique qu'elle soit arrêtée par des contrôles du port, et qu'ensuite la situation devienne encore plus compliquée  et traumatisante.

    Estimados señora, señor,

    Nosotros, Nimozette NZOKE , ciudadana camerunesa, y Dominique Tron, ciudadano frances, vivimos juntos desde el 20-01-2009. El consulado francès en Camerun ha autorizado nuestro casamiento, celebrado el 11-08-2012. Como mi domicilio es en la isla de Formentera en Baleares, la embajada de España en Yaunde ha dado un ''visado familiar UE'' a Nimozette, que nos ha permitido vivir en España desde al 13-05.2013.

    La oficina de imigraciòn en Formentera nos ha recibido amablemente y nos ha facilitado una primera cita el 03-07-2013 en la oficina  de extranjería de Ibiza, con toda la documentación requerida. Pero en Ibiza, nos pìdieron màs papeles, verbalmente, y los hemos entregado en la secunda cita del 28-10-2013.Nonobstante, por correo del 11-04-2014, la oficina de Ibiza declara que la solicitud de tarjeta de residencia de Nimozette Nzoke esposa Tron fue rechazada por las siguientes razones  :  - ausencia de certificado de matrimonio - ausencia de acreditaciòn de medios de vida suficientes - ausencia de asistancia sanitaria en España. En los pajina web que os ajunto (escaneos  y traduccionnes oficiales), pueden ver que todos estos certificados existìan a la fecha  de la cita .

    El certificado de matrimonio estaba confirmado por la embajada española de Camerun  que nos havia facturado el trabajo de verificaciòn de su abogado. Habia estado confirmado por el ministerio de asuntos exteriores de Camerun. Habia estado confirmado por un certificado de matrimonio del consulado frances  y por la oficina central del Estado Civil francès  en Nantes (Francia) en los registros matrimoniales de un extracto de nacimiento de menos de 3 meses.

    En lo que trata del seguro médical : hemos presentado varios certificados de la CPS (caja de seguridad social de Polinesia francesa) que mostran que Nimozette Nzoke esposa Tron tenia cobertura social automaticamente, con un numero proprio, al estar casada con Dominique Tron. La CPS suministrò pruebas que reembolsaba los gastos medicos dados en España y la lista de todas las prestaciones que cubría . Como eso aún no parecia suficiente para la oficina de Ibiza y que lo pedia, he contratado un seguro privado en la Caixa para Nimozette Nzoke esposa Tron  actualmente embarazada y cubierta por la clinica de este seguro.

    La acreditación de medios de vida suficientes . Yo, Dominique Tron he mostrado que yo recibia mensualmente una suma superior  a la suma exigida , con mi pension de jubilaciòn francesa (CPS) mas una pension de jubilaciòn complementaria ( Humanis). Ademas he presentado un acto de propriedad de nuestra residencia con un testamento a favor  de Nimozette Nkoke Tron . He suministrado el certificado bancario, pedodo oralmente por la oficina de Ibiza, enseñado que tenia en mi cuenta màs de los 8513 euros requiridos . Pero a la cita del 28-10-2013 la responsable de la oficina de extranjeria de Ibiza pretendiò que habia pedido 15525 euros requeridos en la cuenta bancaria . Eso porque yo, D.Tron, tengo el terreno y la casa de Formentera a mitad con mi exesposa Christine Imbert Tron. Christine vive en la otra parte de la casa con su novio Antonio Marin Sanchez independientemente de nosotros, ellos tienen sus proprios ingresos y no son a mi carga . Solamente mi esposa Nim esta a mi carga.

    En los escaneos  ajuntos en la pagina web, hay todas las pruebas de los papeles presentados con fecha de menos de 3 meses a la fecha del 28-10-2013 con sus traducciones oficiales. Igualemente hay papeles con fecha  anterior y posterior . Hay un escaneo de la carta de la oficina de extranjeria del 11-04-2014. Como la television anunciò un proceso de expulsion de Formentera de los extranjeros sin tarjeta de residencia, tememos esta detenciòn durante una nueva cita en la oficina de extranjeria en Ibiza que niega haber visto nuestros papeles el su carta de 11-04-2014. Hemos contactado Don Alaro Gil-Robles que nos aconsejò de solicitar la ayuda de usted, el actual defensor del `pueblo en España. Atentamente

    Dominique Tron , NIE : Y1495755-X

    Nimozette Filola Nzoke esposa Tron, NIE provisional Y3208760K, pasaporte camerunès : 01715004

    Los escaneos del papeles y los traduccionnes :

    1)los papeles enseñando el casamiento (que sean los para la cita de 28-10-2013 como los del 03-07-2013 http://fr.scribd.com/doc/222895463/1-mariage -

    2)los papeles enseñando los dos seguros de salud para Nimozette Nzoke TRON y el seguro de Dominique Tron , con muchos detalles http://fr.scribd.com/doc/222897299/2-Assurance

     3) los papelos papeles  de los ingresos de dominique Tron (pensiones, certificados bancarios, el titulo de propriedad) http://fr.scribd.com/doc/222899432/3-revenus

    4)nuestros papeles de identidad, y la carta de rechazo de la oficina de Ibiza el 11-04-2014, los certificados de empadronamiento y de conviviencia http://fr.scribd.com/doc/222901235/4-carta-id-etc

    5)otros documentos como  el visado familiar UE , el certificado de la escuela de idiomas para los extranjeros, el testamento a favor de Nimozette, el certificado del ginecologo, de las ecografias probando el embarazo en 2014, el certificado de los ingresos de mi exesposa Christine Imbert Tron, y de su novio Antonio Marin Sanchez , el certificado del traductor oficial http://fr.scribd.com/doc/222902406/5-otrosDoc

     

    • 29août 2014 : la carte de séjour a finalement été accordée à Nim suite à l'intervention du défenseur des droits en Espagne et d'une avocate ...Le defensor del Pueblo nous a transmis la réponse du bureau de Majorque : les papiers demandés par le bureau d'Ibiza et copiés pour le defensor n'avaient jamais été transmis, on nous suggérait de faire une autre demande .Cette fois , le dossier de demande a éte enfin transmis à Majorque puis approuvé mais ilne comportait aucun des papiers demandés par la chef fanatique qui les bloquait en contestant leur véracité, papiers qui avaient coûté de longues et coûteuses démarches d'avocat et de traductions officielles, ces papiers supplémentaires n'étaient pas nécessaires selon la loi...Le dossier a pu être transmis par l'employée d'Ibiza à Majorque un jour où sa chef de bureau était en réunion avec la police.L'avocate qui nous a secondée au final était une argentine devenue espagnole qui elle même au temps de ses études avait mis cinq ans à obtenir sa carte de séjour. Pour nous, le processus global aura pris six ans et sa résolution est une bouffée d'air car la non existence administrative tuait d'avance tout projet de façon ruineuse et faisait vivre dans un climat de crainte d'expulsion ... Lorsque l'employée a tenté de demander d'autres papiers que ceux que nous avions réunis pour sa chef, l'avocate venue de Barcelone lui a fait clairement comprendre quels aient les papiers réellement exigés par la loi. Plusieurs avocats nous ont confirmé (tout comme un consul de France , comme je je raconte sur http://oriata.blog4ever.com/ ) qu'officieusement les obstructions sont encouragées en haut lieu au delà de celles légalement programmées)  Le processus de concrétisation de ce changement va prendre quelques temps, et ce septembre , Nim accouche de Noa.. Merci à tous ceux qui ont facilité nos démarches matériellement ou soutenu psychologiquement.

       Le 7 septembre 2014 : Nim a retiré sa carte de séjour au bureau de la police d'Ibiza, et notre enfant Noa est né le 13 septembre. 

     

     


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  • D'Elsa Triolet et d'Aragon, ce couple étonnant qui se portait chance et portait chance, ma connaissance est relative. Je m'en suis rendu compte depuis que j'ai accès à Internet, car j'y ai découvert toutes sortes d'aspects de leur existence que j'ignorais. Par exemple, si j'en crois un texte de Ristat sur le net, j'ignorais qu'ils avaient chacun eu des amants tout au long de leur idylle commune... et j'apprends par Nicolas Mouton l'existence d'une lettre d'Elsa où elle espère qu'Aragon la comprenne plus authentiquement et la rencontre enfin… moi je les avais vu jusque là comme un couple  exclusif et satisfait  , et je trouvais bien perverses  les  langues stylées qui susurraient,  afin d'expliquer leur intérêt à mon égard , que j'avais été moi même le jeune gigolo de l'un ou de l'autre . J'ai découvert également à l'ère du Net  que  je ne fus pas le seul  qui  en les fréquentant fut appelé fils... 

    Bref, les souvenirs que j'ai d'Elsa et Aragon sont en fait  incrustés dans les circonstances personnelles qui me les firent connaître, et c'est la raison pour laquelle j'ai eu une réticence à les publier avant que cela me soit demandé, car je ne peux parler que de moi-même dans mon rapport à eux, et ce que j'ai perçu d'eux fut nécessairement conditionné par ce que je vivais avant de les connaître. Je vais donc parler de tout cela sans fard, juste comme j'envoyais un texte à Aragon pour son journal, certain d'avance d'avoir carte blanche ...  Tant pis pour les étranges admirateurs d'Aragon capables de dénigrer Elsa et qui estimeront mon témoignage hors sujet et excessivement égocentrique...

    En Septembre 1965 fut publié mon premier recueil de poèmes STEREOPHONIES, par Seghers, avec une préface d'Elsa Triolet. J'avais correspondu avec Elsa depuis décembre 1964.

    C'est  fin décembre 1965  qu'afin de la connaître, elle ,et Aragon , je suis monté dans le train de nuit  pour Paris, sans prévenir mes parents. C'était une fugue, je venais d'avoir 15 ans. Cette année-là, mon père Ferdinand pas une fois ne m'avait adressé la parole, il me faisait manger dans la pièce voisine.

    Il fouillait mes affaires, pour m'interdire la poésie et la pratique de tout art, car il n'y voyait que piège, illusionnisme, vanité  périlleuse, et cela compromettait l'image qu'il se faisait de moi en tant que prolongement instinctif de lui-même, géomètre... Comment pouvait-il imaginer, lui tant angoissé  et  dénué de tendresse, qu'il pourrait me convaincre ainsi d'adhérer à  son utopie technocratique... Ma mère, soumise et impuissante,  souvent en larmes , ne jouait plus de piano. Sur ordre de son époux, elle y avait renoncé et avait cessé de me l'enseigner,  tandis que mon frère cadet était envoyé au Conservatoire, alors que sa motivation était faible. C'était comme si la gouvernance familiale de mon père consistait à plier les destinées à  des décisions prétendues sages mais qui étaient complètement incohérentes. Ma mère Yvette  racontait  craindre  que je n'assassine son mari  Ferdinand en pleine nuit, pour la venger. Elle qui avait été premier prix de virtuosité au Conservatoire de Marseille, elle se lamentait aussi de n'avoir pas épousé plutôt Barbizet qui avait été son condisciple et qui était ensuite devenu célèbre.

    Le couple de mes parents, né d'un mariage arrangé par leurs proches,  me paraît  aujourd'hui l'association d'un pseudo esprit scientifique et d'un pseudo esprit artistique  excluant tout esprit de recherche et de création, mathématiques et  musique  n'étant valorisées  que comme des activités sociales.

    Yvette avait d'abord pratiqué  puis enseigné le piano sous le portrait de Pétain avant de rencontrer Ferdinand qui, lui, persécuté et radié du port de Marseille par le même  Pétain parce que né étranger, avait répondu à une annonce pour un poste de géomètre en Afrique. A peine arrivé  il y avait été mobilisé puis s'était déplacé avec les bataillons de cette  France Libre où les Noirs étaient majoritaires. Après le débarquement de Marseille il fut transféré de nouveau au Soudan Français, puis fut recruté au Maroc. A Marseille, Ferdinand épousa ma mère lors de ses vacances de décembre 1948, puis repartit avec elle et le piano à Bin el Ouidane où je naquis en 1950 . Ils revinrent à Marseille peu après l'indépendance du Maroc.

    Lorsque j'étais en classe de 6ème, Ferdinand, même  le dimanche ou en vacances, m'enfermait à clef  avec la mission de résoudre des équations du bac. Alors j'avais insularisé les éjaculations de mon  mental dans les équations mathématiques, et avec  les outils balbutiants de cette prison je m'étais construit une voie vers la liberté intérieure, celle que procure la concentration créatrice... Mais je préférais  poursuivre cette concentration à travers  la poésie, qui était une façon discrète de retrouver  l'accès à la musique  qui m'avait été interdite  après les premières années de l'enfance... Je m'étais donc mis à faire sonner les mots en silence et en cachette – puisqu'il ne me fallait faire aucun bruit dans la maison, toute ma vie étant supposée devoir se consacrer à l'idéal technocratique de mon père, caricature de modernité. 

    Ce n'était pas contre le bel équilibre des mathématiques que montait ma révolte, car les nombres règlent partout le cosmos, mais contre la surveillance manipulatrice de ma vie quotidienne dans une société semblable à celle des termites, où des comités secrets dévorant les reines manipulées vivantes, aveuglent les travailleurs et tuent ceux qui naissent avec des ailes. A l'époque j'étais amoureux d'Elisabeth, mais l'enfermement où nous confinaient nos deux familles réduisait notre fréquentation à la rue où nous attendions pour cheminer ensemble vers nos Lycées, le sien le lycée Longchamp de jeunes filles, et le mien Saint Charles de garçons.

    Et donc ce mois de décembre 1965, sur un coup de tête, j'étais monté, sans prévenir ma famille ni personne, dans le train de nuit à la rencontre d'Elsa et Aragon. En lisant leur histoire et leurs ouvrages, j'avais projeté sur eux une image de parents idéaux. Dans le wagon froid et humide, je rêvais d'eux comme à de vrais parents chaleureux et encourageants qui allaient m'ouvrir les portes d'une chambre pleine de douce plénitude. J'imaginais l'oreiller, les tapisseries, la chaleur, la patience et l'écoute. Et c'est vrai,  ils eurent à mon égard  la sagesse de la bonté, de l'indulgence, ils savaient reconnaître en un enfant les dons spirituels susceptibles de croître en dépit de son désordre mental, et toute ma destinée d'artiste en fut ensuite miraculée, tellement ils se montrèrent dithyrambiques à mon égard, ce qui favorisa mes projets, en fait loin de la France où je ne restai que quelques années. 

    J'étais donc arrivé dans leur salon, j'étais maintenant seul face à eux dans un fauteuil moelleux, pour la première fois tout près d'Elsa, à sa droite et face à Aragon silencieux, souriant avec un regard tendre et malicieux, comme  étonné par l' audace de ma fugue et hochant la tête pendant que son épouse parlait. Comme on se tape la tête sur un mur, elle ressassait ce qu'elle savait des politiques totalitaires qui avaient fait souffrir continûment les siens en Russie, et qui les  avaient abusés en dépit de leur bonne foi, de leurs idéaux de jeunesse. Mirage des propagandes, de la fonction poétique prompte à maquiller le cynisme, les sacs de nœuds de l'Histoire. Elsa écrira un peu plus tard dans ''La mise en mots'' qu'elle avait pu se tromper, être trompée, à cause de sa propension à faire naïvement confiance. Mais le pessimisme  têtu définitif n'est-il pas encore davantage mortifère ?

    Elsa  et Aragon étaient pour moi des icônes de  véritable humanité, actives à résister à l'absurdité de la vie sociale, et capables de compassion pour les résignés. Ils étaient conscients de ce que leurs souffrances passées avaient été  semblables à celles de tant d'autres humains. Et même s'agissant de leur amour dont ils parlaient comme de la chance de leur vie, Elsa affirmait que d'autres couples avaient également certainement trouvé un équilibre de même type, ils étaient seulement beaucoup moins visibles en raison de leurs activités moins voyantes et des concours de circonstance. Je voyais Elsa et Aragon  comme des gens exceptionnels étant restés plus modestes que les médiocres orgueilleux qui jugeaient de tout, quelle que soient leur origine sociale, et qui étaient des références de sagesse pour mes propres parents. Elsa et Aragon me souhaitèrent la Bienvenue dans l'humanité.

    En 1965, Elsa venait d'écrire ''Le Grand Jamais'', et dans notre première conversation, elle m'informa du fait  qu'en Union Soviétique on gommait sur  les photos d'archives l'image des disgraciés. Puis elle s'interrompit, m'ouvrit une boîte de chocolats, me questionna  sur la musique de Xenakis, car dans un courrier,  j'avais prétendu imiter avec des mots la quête de paroxysme de ce compositeur, qu'elle ne connaissait pas encore, mais elle était un esprit curieux de toute nouveauté. En fait j'avais plutôt projeté sur une œuvre de Xenakis, Metastasis, mes exaltations, mes retrouvailles avec l'infini et la musique, la mise en explosion progressive de ma tragédie personnelle, qui avait débouché sur la poésie.

    La poésie était pour moi une façon instinctive  et de transposer mes rêves de musique, de danse et de peinture, pratiques qui ne pouvaient  être assumées clandestinement  dans l'appartement familial  et  auxquelles je pus ensuite consacrer ma vie, pour une grande part suite  aux  interventions d'Elsa et d'Aragon pour  en obtenir les moyens matériels. 

    Aimantée par le mythe du Paris artistique, Elsa avait quitté la Polynésie où elle avait fait un long séjour mais elle s'y ennuyait, quoique les pics de Moorea lui fasse penser aux tours du Kremlin. En plus grandiose, forcément. Sur la suggestion de Gorki, cela avait donné son premier livre. Or c'est dans ces îles que j'allais surtout vivre ma vie adulte, et m'épanouir au niveau humain et artistique, et continuer à me sentir bienvenu dans l'humanité, tandis que l'Europe ne m'avait laissé que souvenirs d'une mystification colossale, mis à part ce couple et quelques autres qui parvenaient à  y surnager et à y répandre presqu'en vain leur éthique.

    Ensuite, plus tard, à l'âge adulte, mes instructeurs furent des danseurs, des musiciens : Roger Ribes, Pak Lemping, Sri Kothandaramen, Anuben Purani, et  encore plus radicalement  le yogui  Agastyar. Mais ce sont Elsa et Aragon qui, lors de mon adolescence, facilitèrent mes aspirations à une vie libre et choisie, par cette attitude paternelle et maternelle qui consiste à donner carte blanche à un enfant. Pour moi, ce n'était pas ordinaire cette confiance qui prend le risque de l'erreur, mais sans laquelle toute nouvelle vie  est maudite comme semence stérilisée... D'autres jeunes qu'ils encouragèrent centraient leurs  ambitions sur Paris, mais ce n'était pas mon cas, car moi lorsque je débarquais chez eux, je ne rêvais que des Galapagos, c'était même là où j'avais situé le paysage de ma première pièce de théâtre, à 14 ans, une histoire de marins en quête de Paradis, mais qui portaient en eux des graines d'enfer, pièce qui avait été aussitôt rendue publique à Marseille par la compagnie des 4 Vents, par le truchement d'André Remacle, romancier communiste qui m'avait donné l'adresse d'Elsa et Aragon.

    Mon utopie, c'était une vie à deux près de ces oiseaux des Galapagos qui ne craignaient pas encore l'être humain. Voilà ce qu'était mon obsession dans la conversation de ce jour-là, rue de Varenne. Le tableau de Matisse accroché au mur offrait par des couleurs un avant goût d'un tel Eden, ou du moins des circonstances de l'esprit le rendant accessible. Je songeais qu'il  pouvait être vendu à un prix extraordinaire, qui pourrait avoir la capacité de concrétiser assez vite mes rêves d'évasion vers l'infini via le Pacifique. Aragon  qui comprit ce que je voulais suggérer,  m'interrompit pour me dire à quel point il tenait à la présence quotidienne de cette peinture. Mais il ne vit qu'innocence dans ce qui eût paru bien coupable à des nantis. Cette première visite de Décembre 1965, Elsa l'évoque dans une lettre à sa sœur dont j'ai pris connaissance bien plus tard, lorsque sa correspondance fut publiée, après son décès. A Lili, elle m'avait décrit comme sale, radin et génial. Aouéé ! Elsa  exprime aussi des réminiscences de cette journée là dans  une émission où elle présenta, juste après, mon livre à la télévision *note 3 

    Génial ? A l'âge adulte je me suis demandé  ce qui avait donc fait qu'elle me trouve génial, moi  qui avec le temps en était venu à considérer mes écritures d'adolescence  comme un pot pourri d'intuitions salvatrices et de confusions chroniques de la conscience... Mais à l'époque, j'étais assez immature pour être sidéré d'entendre Aragon  lui-même dénigrer plusieurs fois comme plutôt futile ce qu'il avait écrit avant le Crève-Coeur (j'ai découvert  bien plus tard, sur le Net, qu'il avait fait la même confidence à Michel Apel-Muller). Pour ma part, une fois adulte, j'estimais erratique tout ce que j'avais produit avant le théâtre catalytique des oiseaux de paradis et ses gymnosophies.

    Or, même au 21 ème siècle, lorsque des lecteurs m'écrivent de France, c'est presque toujours pour s'être reconnus dans mes livres écrits avant l'âge du 20 ans, c'est-à-dire dans mon désespoir et instinct de fuite de l'époque. Je dois dire qu'avant l'âge du Net, ma production de l'âge adulte devint difficilement accessible, vu qu'il s'agissait de théâtre dansé et que j'ai passé la majeure partie de ma vie loin d'Europe. Mais je sais  que dans une multitude d'îles de Polynésie, exercent des institutrices  et d'autres anciens élèves qui ont gardé de moi le souvenir de l' animateur qui les a accueillis adolescents avec sa flûte de Pan dans l'utopie évolutive de son théâtre, près d'un grand pamplemoussier, sur la colline au-dessus de Papeete. A vrai dire, pour vraiment apprécier les œuvres de ma maturité, il faut être un lecteur ou une lectrice se penchant sur mes productions comme sur des partitions à déchiffrer pour se construire et s'instruire en pratique, notamment en dansant et chantant.

    D'évidence, l'adjectif génial est attribué aux artistes qui correspondent aux attentes de celui qui le prononce, et je suppose, à lire l'art poétique de Boileau, que ce dernier n'aurait trouvé génial ni Rimbaud ni  les surréalistes, et pas même les romantiques.  De la même façon qu'un micro ou un haut-parleur restituent un spectre sonore limité, les musiciens de sensibilité baroque, rock, gambuh, kébyar, karnatique, kaïna, catalytique ou autre, ont besoin d'une écoute volontariste pour découvrir les richesses de leurs confrères d'autres sensibilités. Par chance, chez Elsa, l'écoute était spontanée.

    Alors je peux comprendre  que mon obsessionnel refus  adolescent d'un contexte social  asphyxiant  ait pu paraître génial ,comme l'annonce d'une évasion ,ce qui est au fond une aspiration généralisée chez les humains. Je crois que ce  qui leur a plu c'est ma capacité à ''mettre les pieds dans le plat'', et c'est aussi ce qui me valut par la suite d'être boycotté par tant d'autres en Europe .  Mettre les pieds dans les plats des parades mondaines de littérateurs en quête de carrière plus que d'envol ... le genre d'animaux  qui gravitaient en grand nombre autour de la notoriété d'Elsa et d'Aragon. Pour moi , dès le début , la danse de l'artiste était porteuse  de germes d'évolution de l'espèce humaine vers un quotidien vivable, et la poésie en était un souffle ... Par chance je n'étais pas seul à me révolter obsessionnellement contre  l'indignité sociale banalisée , c'est ce qu'avaient fait toute leur vie Elsa et Aragon. .  

    Je suppose donc  que ce qu'Elsa avait trouvé génial dans mes balbutiements d'adolescent c'est cette révolte crue contre les fatalités prédatrices qui s'exprime avec tant de subtilité et de spontanéité dans ses romans. Et il me semble que c'est cette quête tellement sincère et sans apprêt de femme résistante au mauvais sort qui fit qu'Aragon avait tendance à répéter qu'Elsa lui avait tout appris, je suppose qu'il s'agissait des réflexes d'humanité et d'écoute qui n'étaient qu'embryonnaires auparavant dans sa conscience.

    Si j'avais envoyé mes poèmes à Elsa, c'est que j'avais pris son Louis  au mot, et cinquante ans plus tard  je crois carrément qu'Elsa Triolet fut pour Aragon une inspiratrice spirituelle. d'ailleurs  dans ''Elsa'' , Aragon écrit : " Je suis sourd à toute plainte qui n’est pas de ta bouche / Je ne comprends des millions de morts que lorsque c’est toi qui gémis" .On dira ce qu'on voudra de son ostentation amoureuse, pour la démystifier, mais les relations humaines sont tellement gangrénées par les malentendus  qu'il me parait raisonnable, quand on aime , de se prendre comme un acteur au jeu de son texte. C'est là que la Poésie est créatrice de réalité, et que le réalisme des cyniques se révèle illusion mortifère.

    C'est un grand art déjà que de concrétiser l'utopie amoureuse  à force de la sublimer de façon flamboyante ,comme la flamme même de la vie qui aide l'espèce à croire en elle même . Mais plus grand art encore est celui de la sagesse  du coeur, et à mon avis c'est par là qu'Elsa aida Aragon à devenir le meilleur de lui même . Les deux  dans leurs écritures et leurs  actions étaient concernés  par la souffrance d'autrui,et  du moins à l'époque où je les ai connus pas du genre à se défiler par des pirouettes futiles ou des sentences quiétistes. 

    En  dépit de son air sévère, Elsa me semble avoir été  le  guide  de bonté d'Aragon , et comme il le suggère à maintes reprises, elle l'arracha à la tragédie du narcissisme futile qui illusionne tant de poètes et d'artistes . Le talent  sans les vertus humaines n'est pas rare, mais il n'est pas convaincant pour les mendiants de dignité élémentaire, ceux dont les souffrances n'intéressent pas la plupart des tribuns. Lorsqu'il parlait de ses oeuvres de jeunesse,Aragon oscillait entre l'amusement et la désolation  .Mais voilà, une fois la notoriété atteinte et confirmée, il était clair  que les dévôts feraient tout pour trouver du sens à ce qui était fantaisie hasardeuse, aux connotations parfois douteuses. Sans parler des erreurs , comme lorsque Balzac appelle caractères sanscrits , dans ''la peau de chagrin'', ce qui ne saurait en être . Alors  n'était-il pas  tentant pour l'auteur , qui a connu le mépris avant l'adulation, de chercher lui-même à  justifier toutes les étapes de sa vie ? Après tout, l'erreur est humaine ,mais finalement  c'est la qualité réelle des êtres au quotidien qui est le plus important . 

    Ce couple était pour moi un miracle, car il surfait très haut qau dessus du marécage parisien sans perdre son humanité, ce qui n'a pas été toujours le cas  d'autres talents et ''génies'' qu'on leur opposait. Evidemment tout dépend des références de chacun, et de son degré d'information et de pratique de la vie.

    Oui,  j'étais sale, et je ne le savais pas .  C'est que j'étais monté dans ce train sans ticket ni bagage , en fin de journée, pour fuir l'ambiance sinistre de Ferdinand mon père  géniteur , que j'appelais dans mes poèmes''l'empereur de Chine '',car c'est ainsi que j'imaginais l'incarnation intime du cauchemar despotique, du tyran domestique.Alors dans ces wagons sous la neige j'avais traîné de banquettes malpropres en toilettes dégueulasses, peut être en portais je l'odeur, n'ayant pas eu d'endroit où me doucher avant de débarquer rue de Varenne...

    En ces temps là les trains  n'étaient pas autant entretenus ni rutilants  comme aujourd'hui,mais les dossiers étaient plus confortables pour s'assoupir, et on pouvait ouvrir les fenêtres ... En découvrant pour la première fois ces paysages j'avais probablement semé un peu plus de désordre dans ces cheveux qu'on disait rebelles car ils poussent en tous sens .

    Mais pourquoi Elsa m'avait elle  trouvé radin ?  Ayoyo ! Aoué ! Misère ! Panique ! ... Je n'avais pas un sou en poche ... J'ai supposé à posteriori que c'était suite à sa suggestion de m'emmener manger à la Coupole  pour me montrer à quelle table  elle avait rencontré son Louis. Lors de nos échanges de lettres avant ma visite impromptue, je n'avais pas osé raconter ma galère familiale, préférant rester discret, tout entier tendu vers l'avenir où m'aimantait leur légende comme un porte bonheur ... C'est comme si j'avais eu l'intuition de la tendance  que chacun a de sous -estimer les embarras d'autrui, et de juger selon ses propres  projections ( on peut rassembler des tonnes de preuves sur une situation historique ou personnelle au présent, et on dérange, puis avec le temps l'invraissemblable apparait avoir été véridique mais tout le monde s'en fout ).

    Il eut été trop compliqué d'expliquer la folie de mon père ...A son égard j'éprouvais en alternance de la terreur et de la pitié .En effet dans ses colères s'étalait la mémoire d'une enfance sordide,et ma mère quoique résignée au mutisme et aux larmes ,avait beaucoup de mal à reconnaître que son mari avait subi souffrance et injustice depuis le début de son existence et que c'était la source de sa folie de persécuté devenu persécuteur. ''Persécuté persécuteur ''c'était dans le registre des ruminations anciennes d'Aragon, j'aurais pu m'expliquer, mais je n'aimais pas me présenter dans le rôle d'une victime, d'un cas social. Pour moi la sortie de la destinée  qui m'avait été allouée par ma famille passait par les arts et donc la poésie dans la mesure où je pouvais m'y reconstruire en dehors des conditionnements sociaux ou contre eux.

    Et malgré tout , cette année  là,en dépit de son mutisme et de ses regards terribles mon père avait quand même signé le contrat de Seghers pour mon premier livre préfacé par Elsa.Ceci dit, l'argent avait été placé sur un compte bloqué et donc je n'y avais pas accès, je n'avais rien en poche, ce n'était pas de la radinerie , et pour ne pas avoir à me justifier, et pour ne pas prolonger  hors de Marseille  le procès chronique qui me tenait lieu d'éducation, j'avais seulement dit à Aragon et Elsa que plutôt que d'aller à la Coupole, les bars étant synonymes de gaspillage d'un argent que je n'avais pas,  pour moi c'était mieux de rester dans leur logis , sous ce toit au bout de leurs escaliers escarpés, rouges. 

    Parce que là je me sentais bien , et il faisait froid dehors . Près de la fenêtre Elsa me montrait tout en bas un jardin et les flocons de neige devenus rares sous ce ciel gris...j'étais étonné car pour moi la ville m'était toujours apparue comme un royaume  maudit de béton, trottoirs,macadam, cages de partout , sauf bien sûr dans les ruines qui subsistaient de la guerre, car il y  croissait des herbes dites folles...

    Et là dans ce bâtiment, ancien hôtel particulier il y avait quand même  de l'espace et de la lumière dès la cour de l'entrée, puis des escaliers qui étaient d'abord larges comme dans un palais, avant de se retrécir pour parvenir au seuil de leur appartement  lui même vaste ,du moins en comparaison des pièces étroites où j'avais vécu à Marseille.

    Elsa fit sonner une clochette ou un petit gong je ne sais plus et apparut Maria la gouvernante,  appellation valorisante  pour une employée de maison...Elsa lui demanda de préparer un repas de légumes .Et  moi ,  tellement j'avais été étonné qu'il y eut chez des communistes  une servante,je me mis à demander à Aragon et Elsa s'ils  avaient été riches depuis toujours ... J'avais besoin de sentir qu'il était possible de surmonter les handicaps sociaux de l'existence, bref je voulais qu'ils me parlent de leurs galères, ça me donnait de l'espoir de me sortir de la mienne un jour .

    C'est alors qu'Aragon prit enfin  la parole pour évoquer le temps où ils avaient vécu de colliers confectionnés par sa bien aimée . Maintenant c'était lui qui s'était mis à parler .  Evidemment, je sus plus tard que leur vie avait été matériellement parfois difficile, mais sur le moment, même fabriquer et vendre des colliers me paraissait relever du luxe. A force de m'enfermer, mon père ne m'avait pas permis de connaître un autre monde que le sien, sauf à travers les livres, explorés à travers la bibliothèque du Lycée Saint Charles et celle d'André et Rosette Remacle.

    Et bientôt lorsque nous passâmes à table il n'y avait plus que la fascinante et lentement torrentielle profération d'Aragon, il parlait des temps passés, les temps des douleurs de la guerre et des vertiges loufoques de dada, d'un de ses amis suspendu  à un lustre  , de ce complice allemand Max Ernst   ami malgré la guerre, et d'une femme aristocrate prise au piège de sa soif d'extravagance. Il me semble qu'Aragon a  rendu presque tout cela public depuis, donc je ne vais pas répéter ce que j'entendais raconter, ce serait bien plus approximatif , il s'est passé quasiment cinq décennies depuis ce jour. 

    Peut-être qu'Aragon peaufinait-t-il sans cesse l'évocation de ses souvenirs  devant chacun de ses visiteurs, une façon de continuer à écrire en parlant . Mais c'était d'évidence  exaltant d'entendre de sa bouche même ,par exemple , comment Breton et lui, à cheval sur  un mur de l'hôpital du Val-de-Grâce avaient accouché du surréalisme, et comment il avait rencontré Apollinaire, qui avait inventé le mot, etc, etc ...

     Il y avait aussi , au fil de ce monologue, des remarques concernant l'appartement où il vivait, et des contacts qu'il avait avec Pompidou son voisin.  Lorsque les journalistes de Marseille  se mirent à  reprendre les louanges  qu'avaient fait Elsa de moi à la radio et à la télévision, ils  me présentaient comme la deuxième célébrité du lycée Saint Charles : j'avais été précédé par ce Pompidou, qui y avait été professeur ,avant de devenir banquier  puis président de la République ,et  auteur d'une  anthologie de la poésie . J'étais vraiment étonné de ce rapport de familiarité d'Aragon avec un politicien du bord opposé, sans doute y avait il alors , suite aux péripéties de la Résistance au nazisme,une plus grande capacité de dialogue chez les gens, en comparaison d'aujourd'hui.

    Parfois ,j'interrompais le monologue étourdissant d'Aragon, je  lui posais une question pour mieux comprendre son propos .Mais il semblait ne rien entendre , statue assise et regardant vers le lointain, seulement animée  par le courant majestueux de ses paroles . Il  y avait à côté de lui les sourires complices  et tendrement résignés d'Elsa  qui suggéraient avec malice  qu'il ne servait à rien de le distraire ...elle même ne  l'aurait pu, même s'il était en train d'écrire un poème où il la portait aux nues, fallait se laisser porter. Je jouissais donc du spectacle,  trouvant  approprié,raisonnable et salvateur de jouer la vie comme un théâtre, puisqu'elle en présente tellement les caractéristiques.

    Je retournais ensuite à Marseille par le train,et  suite à une deuxième fugue, je fus  hébergé chez mes grands parents maternels, puis pensionnaire en divers lieux scolaires et médicaux ,avant d'emménager avec Elisabeth   ,épousée en janvier 1969, dans une chambre que nous louait  des  descendants de Ségalen sous les toits du boulevard Saint  Michel  , puis dans un  vieux moulin à grains déglingué entouré d'immeubles, tout près du bois de Vincennes. Elsa nous appelait alors  ''les amants de Saint Mandé''... 

    Ma pratique artistique principale était  à Paris celle de la danse, il y avait beaucoup de cours gratuits pour les étudiants  ici et là . Puis je me fixais  presque seulement à ceux Roger Ribes, qui vivait avec son maître Jéròme Andrews, et qui m'avait invité gratuitement même à ses cours payants quotidiens .

    Jusqu'au décès d'Elsa je la visitais  assez souvent... J'attendais toujours  qu'elle m'envoie un télégramme ou ce qu'on appelait un pneumatique , ou une invitation par coursier, et cela arrivait assez souvent car Elsa avait décidé  de s'occuper de mon insertion  en tant que poète dans la société parisienne  ...Elsa semblait ne pas  toujours se relire car sa correspondance était généralement constellée de coquilles, mais ce n'étaient pas des messages publics nécessitant un correcteur, c'étaient des messages du coeur .... et non les pages d'un livre dont on corrige les épreuves. 

    Elle et Aragon orchestraient ma vie publique, soit pour me mettre en contact avec un bureaucrate subventionneur, soit pour que je leur apporte un poème pour les Lettres françaises, ou encore pour me faire participer à une signature de livre. Ou encore simplement pour que j'accompagne Aragon près des rotatives de l'Humanité, ou dans une rencontre avec Georges Marchais alors numéro 1 du parti communiste. Ou pour une  rencontre avec Olivier Guichard, un ministre gaulliste, qui après avoir donné du ''maître'' à Aragon, finissait par m'en donner, tellement j'avais été bien présenté ,surtout que j'étais resté silencieux  ...

     J'approfondissais mon exploration du marécage mondain   avec ses hiérarchies hypocrites criblées de rituels plutôt que fondées sur le sens et la communication . Je trouvais dèrisoire  l'ambition de vouloir réussir dans cette termitière parisienne .Mais comme , grâce mes protecteurs , j'avançais maintenant du côté chanceux de la barrière, je compris que leur aide , à travers le début de notoriété qu'ils me fabriquaient ,pourrait m'aider  à m'évader du mauvais sort citadin . Je veux dire que  le bleu du ciel dans la grande cité  n'était visible qu'entre des murs d'immeubles, et que l'hiver le froid  acculait à une tanière. Je n'étais pas un arriviste social, et je sais que cela leur plaisait . J'étais un arriviste spirituel, et ils étaient des modèles d'éthique dans les circonstances particulières où ils s'étaient implantés.

     J'avais l'impression qu'Aragon jouait la comédie humaine  tout en la tenant à distance, il savait que  sans les circonstances de la guerre où il s'était illustré comme on sait, il n'aurait pas été béatifié à ce point.  Il regrettait de façon obsessionnelle des erreurs d'appréciation du temps  de l'hypnose stalinienne , bref derrière le masque grandiloquent il me paraissait humble dans un monde peuplé de roquets arrogants . Il témoignait de l' indulgence vis à vis de tout ce qui de ma part pouvait passer pour impolitesse , et qui n´était en fait que maladresses, car je n'étais  pas issu du tout du même milieu social , et j'avais une répugnance instinctive pour toute la faune qui le courtisait et me montrait du mépris  aussitôt que je n'étais plus avec lui. En ce qui me concerne je ne percevais aucun avenir désirable à Paris. 

    Mes souvenirs d'enfance à Agadir me faisaient envisager  les villes et les hivers nordiques comme comme une sorte de malédiction dont il fallait parvenir à me dégager, et où toute réussite mondaine n'était qu'un pis aller.Certes  Paris en mandarin se dit Bali, mais suite à une émission de télévision d'Olivier Maessien sur les rythmiques d'Asie, où j'avais pu voir des danses, c'était l'île Bali un peu au sud de  l'Equateur qui était alors devenue pour moi le centre mythique de la planète, et mes protecteurs avaient compris mieux que mes parents que l'avenir qu'ils pouvaient m'aider à construire  en valait la peine. Paris ne fut pour moi qu'un lieu de passage, comme l'avaient été Tahiti et Moorea pour Elsa après qu'elle y eut laissé son premier époux  Triolet  . 

    Une fois Elsa évoqua un passage d'André Triolet à Paris, avec qui il semblait qu'elle et Aragon  avaient gardé des relations d'amitié quoique rares. Elle s'attarda davantage sur les nouvelles ahurissantes qu'elle avait de leur ami Léo Ferré. Son épouse Madeleine, pour se venger de la relation  du chanteur avec une jeune rivale, avait fusillé tous les singes qu'il abritait chez eux.

    Au coeur des polémiques Aragon paraissait indulgent même  pour ses adversaires  , qu'on l'attaque sur sa gauche ou sur sa droite. En fait ces catégories ne représentaient pas les mêmes clivages en ces temps là qu'en ce début du 21ème siècle. L'illusionnisme médiatique fonctionnait autrement mais la lucidité d'Aragon et d'Elsa était de placer les vertus humaines au dessus des  débats purement théoriques. Je crois me souvenir qu'en souriant Aragon avait répondu en mai 68 devant la Sorbonne, à  Cohn Bendit qui l'avait traité de vieux con, si je ne me trompe, qu'effectivement c'était avec les jeunes cons qu'on faisait les vieux cons ...  

    Une fois je l'interrogeai sur les auteurs  qui le sensibilisaient le plus , et à mon grand étonnement il me répondit qu'il s'agissait de Samuel Beckett et de Saint John Perse . Ainsi je partageais avec lui autant la conscience de l'absurdité des moeurs sociales que l'éblouissement des lointains exotiques , en plus de ce besoin de mythifier la femme , de l'idéaliser au point qu'elle soit tentée de ressembler à l'image sublime  qu'on répandait d'elle dans nos poèmes ...

    Un  jour , Aragon me transmit des billets pour une représentation de danses par une troupe vietcong, en pleine guerre du Vietnam . Je lui demandais pourquoi il n'avait pas préféré s'y rendre, il me répondit qu'il n'était pas intéressé par le folklore . Evidemment les cithares vietnamiennes et les danses traditionnelles  dans ce spectacle servaient surtout d'emballage à une rhétorique guerrière, il s'agissait par exemple de chanter la chute d'un avion ennemi dont on projetait l'image  derrière et au dessus des artistes. 

    J'admettais que  la poésie qui prétend orchestrer le folklore est souvent  simplificatrice, ventriloquée par les archétypes aristocratiques ou populaires , l'orchestration de la propagande variant seulement de langue de bois pour imposer des hiérarchies . J'adhérais en outre à la critique caricaturale que faisaient les situationnistes  de la société du spectacle  , en un temps où leurs textes n'intéressaient pas encore les éditeurs mais où  leurs  revues colorées se vendaient dans un kiosque du Boulevard saint Michel . 

    Néammoins la danse m'épanouissait au quotidien en deçà de tout spectacle , alors pourquoi la réduire à la parade,  pourquoi jeter les bébés avec l'eau de leur bain, la cantique des cantiques avec l'inquisition , le fou d'Elsa avec le stalinisme , et le folklore avec son instrumentalisation ? Le folklore ouvre un espace d'art total et d'éducation populaire qui est créateur de situations à la mesure des artistes qui s'y engagent, il ne mérite pas la dépréciation systématique. Voilà ce que j'expliquais.

    Arriva le jour où Elsa et Aragon me présentèrent Lili Brik . Je me préparais à la questionner sur sa vie quotidienne avec Maiakovski, dont j'appréciais tant l' usage spontané des mots , sans apprêt, cette sincérité sans oeillères comme dans son  poème ''La flûte de vertèbres'' où je fus étonné de trouver le nom de Dieu  ... moi même avait craint au début que les allusions mystiques de ma poésie et que ma répugnance à m'encarter dans un parti ne mettent mal à l'aise  Elsa et Aragon, mais ils avaient balayé mes inquiétudes  en me  faisant comprendre que ce qui leur importait, c'étaient avant tout  les vertus des individus, et que l'engagement évolutif dans le théâtre du monde avait de multiples facettes possibles  . Sauf erreur de mémoire , il me semble mème qu'Elsa ne fut jamais encartée au parti communiste, se contentant de défendre des valeurs. Elsa m'affirmait  que j'avais le tempérament de Maiakovski, elle alla même plus loin dans  la comparaison, sur Radio Luxembourg, c'était certes une projection affective qui me fit du bien quoique ma vie devait évoluer très différemment .

    Lili Brik arriva avec son nouveau conjoint, et je fus étonné de la trouver si rayonnante avec ses tresses. En dépit de son âge, il émanait d'elle comme un parfum de jeunesse  et de beauté éternelle, je n'avais jamais eu cette impression avec une femme de son âge . La première chose que Lili me dit c'est que le poète Vossnessensky l'avait chargée me saluer et qu'il aurait bien aimé être avec elle pour me rencontrer.

     Ensuite elle sortit d'un sac toute une série de cadeaux pour moi. D'abord toute une collection de cuillères de bois peintes en rouge et or, puis des poupées russes qui s'emboîtaient les unes dans les autres, et enfin un jouet qu'il m'arrive encore d'actionner lorsque je passe devant ma bibliothèque où il est suspendu . Il s'agit d'un cercle de bois avec tout autour des figurines de poules peintes, miniaturisées, qui se mettent à picorer frénétiquement  le bois lorsqu'on lui fait faire des cercles parallèles au sol, ceci grâce à un mécanisme  de ficelles convergeant vers une boule à laquelle on peut insuffler un mouvement de pendule. Lili me dédicaça ensuite  une grande  photo de Maiakovski .

    En fait comme j'étais arrivé avant Lili chez sa soeur Elsa, pour ne pas déranger leurs retrouvailles ,je restais longtemps sans ouvrir la bouche, tout ouïe . Je compris qu'en dépit du culte d'Etat alors rendu à la mémoire de Maiakovski, Lili devait vivre  dans la peur de s'exprimer trop librement, même en ce qui concernait la vie de son amoureux d'alors. Elle était notamment en colère, effarée ,parce que  dans la présentation de son ancien logis avec Maiakovski transformé en musée par les autorités soviétiques , il y avait eu falsification de leur propre histoire,le  rôle joué par Ossip Brik dans leur trio avait été minimisé. Je crus comprendre à ses remarques qu'elle vivait à Moscou dans un appartement bien plus étroit que celui de sa soeur . 

    ''La Russie  est une dictature militaire'' martelait Lili avec cet accent russe qui était aussi celui de sa soeur, et elle évoquait le sort tragique de conjoints successifs, à cause de cette dictature.  Il était paradoxal de voir ces propos obsessionnellement repris par mes protecteurs communistes, vu qu'Aragon était traité de crapule stalinienne par des artistes libertaires (qui ne décelaient pas de penchants despotiques chez Sade dont ils vénéraient les oeuvres). 

    Tout aussi paradoxalement j'entendis plus tard un ministre de droite m'affirmer à sa table , que rien ne pourrait enrayer  l'avancée du communisme, c'était le progrés et le sens de l'Histoire. Devant une toile de Picasso, le mème politicien s'imaginait aussi que Guyotat et Sollers (c'était l'époque du Tel Quel marxiste léniniste) étaient les prophètes incontournables de l'intelligence française présente. En fait , si j'étais à cette table, c'est que l'épouse de ce ministre était une abonnée des cours  de mon maître Roger Ribes, elle m'avait invité pour la projection d'un film où je dansais, film super 8  réalisé par son mari et  dont je n'eus jamais la copie.

    Aragon , à cette époque , prenait la défense des dissidents chrétiens Siniavski et Daniel lors des procès post staliniens qui leur était faits.  En fait , même si à l'occasion de cette affaire  il s'était  opposé sans discrétion aux subventionneurs russes qui facilitaient la parution de son journal Les Lettres Françaises,  Aragon me signala que cela faisait longtemps qu'à l'intérieur du parti, il critiquait les méthodes totalitaires. Il y avait eu l'affaire du portrait de Staline par Picasso, et Elsa, informée par sa soeur, avait été consciente de ces dérives totalitaires bien avant d'écrire ''Le Monument'' . 

    Aragon me raconta comment un de ses anciens secrétaires avait rédigé un rapport sur tout le mal que le poète propageait en aparté  sur  les  tyrannies pseudocommunistes, mais que Maurice Thorez, alors chef du parti communiste français, avait déchiré ces papiers devant lui , en lui disant qu'il était normal qu'il puisse s'exprimer librement , c'était dans le sens d'une évolution nécessaire, qui serait compromise s'il s'attaquait publiquement au parti lui même, et qu' Aragon était membre du comité central pour justement contrecarrer l'étroitesse d'esprit ambiante. 

    Aragon m'expliqua avoir préféré depuis longtemps manoeuvrer dans l'ombre mais  avec succès à la libération de dissidents, en tentant de persuader des dirigeants de l'Est de la mauvaise publicité qu'ils se faisaient en s'entêtant dans leurs pulsions tyranniques, en leur expliquant aussi à quel point ils nuisaient aux progrés des autres communistes  en les faisant passer pour des épouvantails à leur image. Il me racontait tout cela en me donnant des noms dont je ne me souviens plus.

    D'ailleurs  lorsqu'on me fit plus tard rencontrer le fils de Maurice Thorez, celui ci ne me parut pas porter  les stigmates d'une éducation stalinienne indélébile mais plutôt cette aspiration à la vigilance antitotalitaire.  Ainsi que d'autres communistes , il semblait tout à fait critique à l'égard des dérives des puissants dans le bloc de l'Est... Le pouvoir a tendance à corrompre  les âmes quelle que soit l'idéologie dont il se travestit. La qualité humaine est le principal, elle s'exprimera différemment selon le milieu où on évolue. Un gauchiste haineux est mûr pour se transformer en fasciste, et de même un dévôt opportuniste et mielleux d' évangiles identitaires. Bakounine lui même avait fait remarquer qu'un anarchiste pouvait se muer en tyran s'il se trouvait en position de l'être. 

    La dérive de l'intolérance affecte à des degrés divers la plupart des individus accédant à un pouvoir même dérisoire,  même dans des ashrams, à Auroville, dans des groupes folkloriques, ou des départements universitaires. Bien sûr, cela a moins de conséquences dans des coopératives autogérées que dans les hiérarchies des Etats, où l'éclat hypnotique de la puissance , l'impunité aidant, fait à l'occasion  passer les victimes pour coupables et les coupables pour victimes avec de plus graves conséquences ...

    En fait toute hiérarchie,  lorsqu'elle se sent menacée dans ses intérêts,a tendance à  neutraliser les valeurs qu'elle prétend défendre ,et ce qui est écrit dans les constitutions a tendance à être contourné sans que la majorité des citoyens ne s'en rendent compte s'ils ne sont pas eux même pris comme boucs émissaires. Les gouvernements sont des as de la mise en scène, voilà ce qui avait illusionné les invités du gouvernement soviétique , dont avait fait partie Aragon plus jeune. De même pour bien des intellectuels actuels les violations des droits de l'homme dans l'Europe de  ce début du XXI ème siècle relèvent de la victimisation et de l'imaginaire, tant qu'ils ne les subissent pas et restent conditionnés par l'hypnose médiatique dominante .

    Les francophones  déjà majoritairement africains pourront ils oublier  à quel points le pillage de l'Afrique et les drames de Lampudesa auront été traités  comme des extrapolations  hors sujet dans les mascarades parisiennes sur les droits de l'homme ? Parmi la foule des poètes de ce temps à qui ces propos sembleront excessifs il n'y aura pas de mal à déceler , si on n'a pas effacé leurs traces, lesquels   ont pris l'écoute de l'humanité harassée. Elsa et Aragon furent de ceux là en leur temps, au risque de digressions dérangeantes par rapport aux attentes de leurs contemporains confondant quiétisme et conscience en paix  . 

    Elsa et Aragon  craignaient qu'on efface ou dénature les traces de leur combat. Cela me semblait impossible, tant leur prestige semblait faire l'unanimité à la sortie de la deuxième guerre mondiale . Je n'avais pas assez vécu pour mesurer l'ampleur des désinformations programmées, quoique mon père  m'y ait fait allusion c'était d'ailleurs l 'exposé de toutes les injustices par lui subies qu'il  ressassait pour me convertir à son désespoir comme à une fatalité à laquelle on devait se résigner pour survivre.

    Mon père connaissait le contexte de la France africaine pas complètement libre, sur lequel Sembene Ousmane a fait un film  , narrant  un massacre de tirailleurs sénégalais par des officiers restés planqués en Afrique , et qui reluquaient leur solde à leur retour. Lorsque  les fascistes déguisés cherchèrent à désigner un meneur, ils avaient trouvé naturel de le reconnaître dans le tirailleur qui voyageait avec un livre d'Aragon, icône pour eux de la subversion. 

    Le chanteur Guy Béart était l'animateur d' une émission de télévision de grande audience, il voulut une fois que son émission soit centrée autour d'Aragon et d'Elsa Triolet, et ceux ci  m'invitèrent à les accompagner. 

    On me demanda de lire des poèmes, mais aussi de me sentir libre de m'exprimer librement, et je ne soupçonnais pas d'embûches. Je fus  spontané , et peut être sans m'en rendre compte ai-je été conduit  à des questions  embarrassantes  voire choquantes pour Elsa et Aragon... en tout cas je n'étais pas mal intentionné ...je ne connaissais pas les usages du milieu, puisqu'on m'incitait à me sentir libre. Peut être y avait il un accord là dessus entre Guy Béart et ses employeurs d'une part, et Guy Béart et ses invités d'autre part ,sur le fait qu'Il  ne fallait pas parler de politique dans cette émission, mais en fait  je ne voulais pas parler de politique partisane ou politicienne, bref  il y avait des tabous pas  explicites.

    On a pu  soupçonner dans mes propos des insinuations qui n'y étaient pas , et on a pu croire que je dénigrais  mes interloculeurs là où  en fait je voulais leur tendre une perche pour qu'ils s'expriment comme ils le faisaient en privé , mais évidemment je n'imaginais pas encore que tout ce qui est subtil et nuancé n'atteint pas les oreilles caricaturales . Bref en cette occasion comme en bien d'autres occasions publiques à Paris , j'ai eu l'impression de m'enliser dans les malentendus.

    Je lus un poème écrit pendant ma deuxième fugue , qui m'avait mené à Grasse, et un autre écrit dans la cave que mes grands parents m'avaient accordé  lorsqu'ils m'accueillirent aprés cette deuxième fugue .

    ''Ce n'est pas facile d'être jeune '', affirma Elsa dans cette émission '' car on n'a pas encore appris tellement de choses'',avait elle dit cela pour moi, comme s'ils voulaient amortir le décalage entre ma sensibilité à fleur de peau et l'ambiance bourgeoise des figurants issus d'un milieu où on ne met pas les pieds dans le plat ? Peut être je projette de façon abusive  ...je pris également pour une façon de me mettre à l'aise  la référence d'Aragon à la têtée lorsqu'il reconnaissait que jeune on ne connaissait rien d'autre. 

    Et ,disait-il aussi , lorsque les surréalistes étaient jeunes, ils étaient pris pour des fumistes, et Rimbaud n'était rien pour personne, sauf pour un tout petit nombre de gens.   A ma surprise , Aragon semblait en public encore valoriser ses copains Dada et surréalistes, alors  qu'en privé  j'avais l'impression qu'il ne prenait pas très au sérieux ses insolences d'alors et celles de ses compagnons . J'avais plutòt l'impression qu'il en jubilait en privé à cause de la cocasserie qui s'en dégageait , sans réelle nostalgie pour  toute la vie déréglée dont l'avait relevé Elsa  . 

     Lors de cette émission ''Bienvenue''  animée par Guy Béart , les questions des invités portèrent alors sur l'amour, la politique  et la place de la femme dans leur couple .Aragon confia  qu'en l'absence d'Elsa, il aurait l'impression d'affronter un récif sans phare. L'amour apparaissait à ce couple comme le principal des repères. L'amour conçu bien évidemment dans la  bonté et non réduit aux fantasmes ou à une antidote  à la solitude .Enfin Aragon affirma explicitement que la politique lui paraissait secondaire par rapport à l'amour.

    Lorsqu'on demanda à Elsa à quoi elle croyait  , elle répondit que c'était à la bonté inconsciente , spontanée. Non pas celle où on se raisonne pour dire 'je vais être bon", ou "je suis bon", mais celle qui s'exprime à l'état de réflexe.

    J'avais été vraiment perplexe de lire " il n'y a pas d'amour heureux" que je leur demandai  ce que cela avait signifié pour eux. Les relations entre la femme et l'homme seraient -elles si compliquées , même à leur niveau  ? La réponse : " l'amour ne peut se contenter de son propre bonheur... il y avait beaucoup de malheur tout autour, cela n'empêchait pas l'amour entre nous , mais la vie continue ... lorsque les évènements extérieurs sont d'un certain poids, ils se reflètent dans la poésie ". Comme il est difficile de percevoir ce poids des chantages historiques autrement qu'en théorie, sans les suggestions diaboliques qu'ils tentent  de répandre dans le subconscient et les nerfs ...

    Quelqu'un demanda à Elsa si son rôle d'écrivain l'avait aidée en tant que femme. Celle-ci répondit   : " Une femme disponible est une femme faible,de sorte que je n'ai pas connu les misères de femme, je me suis choisie pour juge ". A un autre moment , elle avance une idée qui lui était familière dans nos conversations , à savoir que les poètes pressentent l'inconnaissable, ce qui n'est pas pénétrable par la science, et qu'ils l'expriment. Je dirai mème que l'art  est porteur des virtualités de l'espèce, de ses évolutions et de ses régressions selon les artistes, mème quand leur style les rapproche.

    Aragon avait jadis écrit " le monde à bas , je le bâtis plus beau ! ". Une phrase qui pour moi résumait le sens de l'initiative artistique : refuser l'ambiance zombie et se construire dans l'espérance , que ce soit par la révolte ou des choix de vie fertiles , comme dans un poème d'amour ou une danse. Alors voilà que je demandai à Aragon de faire le bilan de cette annonce, pensant qu'il allait répondre comme je l'aurais fait, à savoir que la poésie tisse des bulles d'utopie éventuellement contagieuses. Mais non ,et  j'ai  eu alors l'impression, peut-être à tort qu'il a cru que je lui reprochais  de ne pas avoir été à la hauteur, car il répondit qu'il est toujours possible de faire plus beau que nature, voire plus laid, mais qu'il ne s'étonnait pas de n'avoir pu relever un tel défi concernant le monde ! A mes yeux il l'avait tout de même réalisé ce programme d'un monde plus beau ,à l'échelle de leur couple , au point qu'il devienne  mythique.

    Aragon ajouta que  quand  on est jeune on n'est pas modeste, et qu'ensuite on réduit ses ambitions à ce que l'on a pu faire ... "changer l'homme c'est ambitieux ... j'ai toute ma vie bataillé pour la liberté des écrivains, donc la liberté  politique ... " , et il estimait que ce serait déjà beaucoup s'il laissait la trace d'une simple tendance d'esprit, si on se souvenait un jour qu'un homme comme lui n'a pas aimé certaines choses ... .A ce stade de son existence , il avait alors l'âge que j'ai presque atteint aujourd'hui.

    Dans cette émission on me demanda quels étaient les poètes que j'aimais le plus lire ... je répondis Michaux  , Artaud,  Duprey  ... et la moitié d'Aragon  . Cela manquait il de tact  ? En tous cas mes protecteurs ne m'en tinrent pas rigueur, je crois que leur fibre maternelle et paternelle pouvait même comprendre cela , même si en public ils me vouvoyaient tandis qu'ils me tutoyaient en privé ou en m'écrivant .

     Eh oui, ce que je préférais dans les écritures d'Aragon, c'étaient ses poèmes à Elsa, je les prenais au mot et m'en imbibais  comme de recettes d'amour et en connaissais des strophes par coeur. C'était à mon avis la part de son oeuvre qui avait fait de leur couple un mythe agissant sur les consciences, un modèle à suivre. Certes l'idolâtrie des sublimations amoureuses se dévoile souvent illusoire, mais elle exprime un degré d'aspiration sincère qui ouvre une voie aux consciences.

    Puis c'est par l'entremise d'Elsa qu'Aragon semblait  avoir ouvert son coeur à l'humble camaraderie humaine des hommes de bonne volonté, en dépassant le narcissisme débridé  et son illusionnisme  , fut-il de style surréaliste .Et puis , il y avait eu  l'audace de ces regrets publics d'avoir été un temps hypnotisé par les paillettes de l'arrogance idéologique et de la langue de bois exaltée ... Le cléricalisme a réponse à tout, à cause d'un esprit de système virtuose. Mais quel progrès pour la science, l'art, la spiritualité, que de s'avouer vulnérable à l'erreur, semblablement aux autres hommes, ne serait-ce que pour nous inciter à savoir perdre la face pour nous reconstruire.

    La sincérité d'Elsa apparait nettement dans ses livres ,ce  fut de rester un témoin des signes extérieurs d'inquisition même lorsqu'ils ne concernaient plus que des minorités et que la bête immonde semblait vaincue, par exemple après la libération.  Les indignations elles mêmes sont  en effet tellement  sujettes à la mode des Ponce Pilate ... il suffit de changer le mot camp de concentration en camp de rétention, et voilà  que l'éthique semble sauvée et que les révolutionnaires  ou les humanistes  se comportent comme des féodaux insensibles ,mème  sous la bannière du socialisme, ou celle des libertés et des droits de l'homme. L'imposture des mots visibles trahis par les actes invisibles pousse alors les victimes à avouer des actes qu'ils n'ont pas commis, à avoir honte de leur déchéance, voire à s'automutiler pour donner une forme visible à l'angoisse où ils doivent suffoquer.

    La leçon d'Elsa et d'Aragon fut aussi de m'aider à  percevoir qu'à travers le théâtre mensonger du monde, la fiction voire le mythe pouvaient accoucher de véridicité et de lucidité.  Alors  que bien des capitulations devant la tricherie sociale se déguisent en victoires de la sagesse , il peut subsister,sous les allures de l'adaptation au théâtre mondain, surtout lorsqu'on y est déjà intégré, la possibilité d'être un acteur de son dynamitage progressif . Ainsi peut-on  un peu, peut-être,au coeur même  des sphères de décision, contribuer à renverser progressivement  les hiérarchies de la conscience humaine . Une façon d'éviter  la crucifixion par une forme de théâtre quotidien assumé avec distanciation.

    Je me suis limité ici à ne parler que d'Aragon et Elsa et de moi même à leur rencontre, mais lors de cette émission et à bien d'autres occasions  je  fus en contact avec toute une variété de caractères humains, et je ne pus que constater que le Paris des artistes et des littérateurs était  le plus souvent une lamentable mascarade de mesquinerie, de snobisme , de caprice et de vanité et  je n'eus ensuite jamais le regret de m'en éloigner , au lieu d'y faire fructifier les opportunités que mes deux protecteurs m'avaient  rendu accessibles. Je raconterai ailleurs ce que j'ai observé ou vécu dans cette faune. Il y avait presque seulement Catherine Ribeiro dont l'authenticité et les qualités tranchaient positivement avec le contexte des arrivistes . Bien sûr l'être humain n'est pas souvent plus reluisant aiilleurs, je l'ai vu ensuite, mais avec moins de tapage , il existe dans la nature des îlôts de bonté  et de responsabilité humaines revigorantes comme le grand air, même s'ils ne sont pas affichés comme tels par ceux qui les entourent.

    A Paris, Elsa et Aragon m'ont paru comme d'atypiques survivants de l'humanité, assumant par fatalité un rôle de pédagogue au coeur de cette faune tourbillonnante et superficielle qui réduisait le monde à ses projections virtuelles . Car le jeu des égos animaux produit en permanence des malentendus, dès qu'on ne se contente pas de s'illustrer dans les conventions . Bougainville ne racontait il pas qu'une fois de retour à Paris, il y rencontrait des savants qui pensaient pouvoir témoigner de Tahiti mieux que lui, quoiqu'ils n'aient fait que lire son récit ...

      En toute contrée il y a des survivants de l'humanité,parfois presqu'anonymes, et qui sont aussi de  vrais maîtres pétris de vertus malgré leurs limites, tandis qu'une  foule d' héritiers supposés défigure la signification des héritages culturels et autres, qui deviennent des faire-valoir , des chasses gardées et non plus des semences d'évolution spirituelle et sociale pour l'espèce humaine . Mes protecteurs avaient compris  que la superficialité aimante, mais qu'elle peut devenir une invitation à approfondir, et pour sauver l'optimisme , ils modéraient de façon réaliste leurs espoirs dans les capacités de l'humanité  à mettre en oeuvre les idéaux qu'elle grave en lettres d'or sur ses étendards. 

    Les royalties que j'avais finalement encaissées à ma majorité légale furent aussitôt destinées à l'organisation de  ma vie future qui était prévue désormais pour Bali , où je partis en 1970 pour quelques mois  afin d'étudier  la danse . Je n'en revins qu'avec le plan de mieux m'organiser pour y retourner. A la descente de l'avion du retour, je m'étais  précipité au cours de Roger Ribes avec un xylophone de joget bungbung en guise de cadeau, avant même d'aller me reposer du voyage dans la bicoque louée à Saint Mandé, un ancien grenier à grain qui avait survécu cerné d'immeubles.

    Le temps vint où, pour gravir les ultimes escaliers plutôt abrupts menant à leur demeure , Aragon fit installer pour Elsa un siège à la place de la rampe, un siège avec un moteur pour la hisser mécaniquement jusqu'à la porte ... là je fus glacé d'effroi ... Elsa parlait pourtant de la mort prochaine avec sérénité, comme d'un chapitre de roman ... le rossignol chante avant de mourir ...j'étais encore bien jeune et cette déchéance physique d'Elsa me plongeait dans une tristesse profonde, comme si ce sort allait être le mien un jour, je ne pouvais pas encore voir comment la soi disant mort pouvait être une victoire de la vie ... A chaque visite Aragon m'offrait des livres , notamment les éditions grand format de ceux qui portaient le nom d'Elsa, et leur légende était pour moi un modèle d'autant plus que le couple de mes parents était désaccordé et que j'aspirais à une harmonie durable dans ma vie de couple.

    Comment, de toutes façons , ne pas célébrer cette obsession de vouloir croire à l'amour  et au progrés de l'humanité qui peut s'en inspirer, en dépit de toutes les limites humaines qui pourraient nous rendre sceptiques ? N'en suis je pas encore à 64 ans à danser mon Théâtron de sorte à prendre mes distances avec les règles du jeu de la termitière tout en cultivant des reflexes  capables de concrétiser l'utopie ,au moins dans ma sphère personnelle de liberté . Celui qui capitule pour avoir la paix est mieux dévoré que celui qui ruse avec les puissances prédatrices, et extirpe  de lui même leurs instincts tenaces .Par une concentration  des cinq sens articulée au mental,  le théàtre catalytique est une méthode pour exorciser les sequelles des  terribles épreuves de la vie, imposées par le réalisme  de l'identité prédatrice de l'espèce humaine au stade primitif actuel ... le rêve peut chroniquement ensemencer la vie quotidienne.

     Dans ''La Lumière de Stendhal'', dont Aragon m'avait offert un exemplaire ,j'avais lu , à propos de  ''Sisyphe et la Mort'' de Robert Merle: ''Ce sont les notables qui font alliance avec la Mort, pour dompter la plèbe, le maintien de leurs privilèges exigeant le maintien de la Mort dans le monde''. A cette constatation fit plus tard écho pour moi  le vers d'Aurobindo traduit par Mira  Alfassa : ''Dans la région de la Mort rapatrier l'immortalité''( Savitri, livre X, chant III). Pour moi , aujourd'hui, la vraie vie est dans l'âme, les corps s'ils n'assument pas son rayonnement, sont des fantômes  .

    Depuis que j'ai vécu dans le théâtre balinais , je le sais plus proche de celui de La Fontaine que des cris de Duprey et des sophismes d'Artaud. Je reste sensible au merveilleux normal de Michaux pour consoler son Plume, mais les chants de Rumi m'y recentrent de façon plus définitive. Mais quoi de plus précieux , pour ne pas avoir à renoncer à l'évolution de l'espèce que d'avoir encore accès à des  consciences  comme celles d'  Elsa et Aragon qui , avec moins de sectarisme que  Gandhi, nous rappellent de ce que les injustices subies par quelques uns sont des atteintes à la bonne ambiance de vie pour tous.

    Arriva un télégramme , car je n'avais pas le téléphone, pour annoncer le décès d'Elsa. Elisabeth était absente de Paris .Aragon me demandait de venir immédiatement , ce que je fis . Il me fit alors monter dans sa voiture, s'assit  devant à côté de son chauffeur  et nous partîmes tous trois vers la maison de campagne à Saint Arnoult ,  où Elsa allait être enterrée. Il n'y avait aucune distance protocolaire entre  Aragon et son chauffeur, qui semblait lui même assumer son rôle dans une famille communiste.  La campagne avait des éclats jaunes , avec des champs inondés d'épis, alternant avec la verdure, et au delà de la grille  du  moulin de Villeneuve, il y avait un couple de serviteurs qui nous préparèrent une boisson chaude, avant qu'Aragon ne leur donne congé ainsi qu'au chauffeur..

    Je restais seul avec Aragon dans cette propriété, il se gardait serein quoique triste, mais une tristesse sublimée par la légende qu'il avait su créer autour de sa vie avec Elsa, et où leur existence astrale  se poursuivait... il me montra dans le parc où il avait prévu qu'ils soient  tous deux enterrés , il évoqua les moments passés dans la barque avec elle dans le petit bassin de l'ancien moulin. Après la promenade il  me proposa de prendre une douche et d'aller m'allonger sur un lit, le temps qu'arrivent les invités .

    Je ne peux dire  qui furent  les premiers arrivés , car il me laissa dans la maison pour les accueillir dehors. Je restais dans un fauteuil à l'intérieur pour ne pas paraître importun en me mettant en avant, en allant rejoindre  ses amis en mème temps que lui . Seule une jeune femme  noire  pénétra dans la pièce pour s'asseoir en face de moi . c'était une danseuse américaine que j'avais vu sur la scène duspectacle '' le regard du sourd'' auquel m'avait emmené   Edmonde Charles Roux... 

    J'étais ravi de la présence de la présence  de cette jeune femme noire, tellement  dans le milieu de la danse je me sentais plus à l'aise, en toute simplicité, que dans le milieu des littérateurs, des peintres et des musiciens  ... sans doute parce que la pédagogie de Roger avait commencé par faire mettre nus tous ses éleves  , chacun les yeux bandés à son tour pendant que les autres les faisaient bouger en soulevant leurs  membres comme on joue avec un chaton ... Combien au contraire  je me sentais en porte à faux avec les égos d'artistes mondains qui généralement considéraient la danse comme un art mineur ou une sorte de défoulement , et  qui ,indulgents envers les plus ineptes  de leurs postures contracturées, étaient d'une intransigeance fanatique pour évaluer la qualité des danseurs.

    Pour moi le théâtre dansé était l'art qui les englobait tous et même donnait une respiration, une direction évolutive  à la vie, un art tellement exigeant qu'il rendait modeste . De là la communication et la complicité  m'étaient plus faciles avec ceux qui avaient pris l'habitude de s'entraîner tous les jours presque nus, à construire par la danse une harmonie dans leur corps, leur âme et les situations , sans médisances, dans l'Ecoute , l'humilité ...

     Lorqu'elle n'est pas juste une façon de s'intégrer à une cuistrerie de ballettomane, la danse est un art gratifiant qui fournit la récompense de nos efforts par la félicité de l'harmonie que l'on construit soi même. Le danseur sait d'où il danse mieux que le public, tandis que la plupart des autres artistes sont comme des papillons obsédés par se faire remarquer par le chat qui va les abattre d'un coup de griffe. Bien sûr tous les arts peuvent ètre des outils de résistance à l'anthropophagie , et la danse a été souvent un outil de prostitution, mais elle peut aider à se recentrer et à relativiser tout envol ... A l'époque elle  était une écriture sur le sable, alors qu'avec la démocratisation de la vidéo, elle ne l'est désormais pas moins que la ronde des mots... 

    Je restais longtemps seul  face à cette jeune actrice danseuse dans la connivence d' une sérénité yoguique, pleine de retenue car les circonstances ne se prêtaient pas à une tentative de rapprochement, et pourtant je sentais que nos présences silencieuses et les quelques mots prononcés irradiaient la vie comme il fallait en ces circonstances, avec la bénédiction d'Elsa et de son Louis ... je sentais comme le regard content d'Elsa venir flotter près de nous puis ressortir  car y avait de plus en plus de monde  devant la maison, avec beaucoup de conversations qui s'apaisèrent lorsqu'une voix forte avec un accent latino généreux commença en français un discours qui était comme chargé de fruits ... c'était Pablo Neruda ... 

    Cette voix forçait l'écoute tant elle me paraissait porteuse de vie , en net contraste avec celle de la plupart des écrivains même célèbres que j'avais croisés ici ou là... Les grands artistes, de mon point de vue  et c'est ce que furent Elsa et Aragon dans cette banlieue aride du monde qu'avait commencé à  devenir Paris ,ce sont des êtres qui sèment de la vie et transforment les murs en légendes  même après leur mort ,y compris lorsque tout leur environnement est en ruine ... leurs  oeuvres sont comme les miettes d'une trajectoire solaire pour réveiller l'espèce humaine de sa torpeur ... 

    Bien sûr ces miettes seront trouvées géniales ou dérisoires selon l'écoute de l'époque , mais elles montrent le chemin de l'évolution de la conscience créatrice, même si elles sont issues d'un corps de bête humaine avec ses limites... L'inspiration poétique ouvre des fenêtres  aux consciences prisonnières du temps et de l'espace, voire des sorties pour s'évader des limites. Je ne suis pas de ceux qui conteste aux millions de poètes le fait d'en être, je constate seulement que sont très rares ceux qui brûlent tout dans le feu du Phénix, et que cela arrive davantage à des danseurs anonymes et quelques fois à des poètes célèbres, qui alors donnent leurs chances aux aspirants artistes. Il y a beaucoup de poètes et d'artistes, mais combien d'humains capables de comprendre les injustices et les souffrances infligées aux exclus du Système ? Or participer à la création du monde, c'est une responsabilité au moins culturelle, et non juste faire la preuve qu'on s'intègre aux hiérarchies de la mode d'un temps et d'un lieu. 

    Il y eut ensuite le déplacement prés de la pierre tombale  , et avec mon âme  j'avais l'impression d'accompagner l' âme d' Elsa, que je ne pouvais identifier avec ce corps sans vie. Elle me paraissait présente par sa bonté dans le rayonnement Divin de la vie sur cette planète... Vu qu'au nom des religions la bête humaine  n'a cessé pendant des millénaires de promouvoir ses préjugés ,ses aveuglements, sa surdité, je ne trouvais pas étonnant que les vertus Divines aient pu rayonner davantage à partir du couple Elsa Aragon et de deux autres couples communistes qui m'avaient pris sous leur protection, celui de Rosette et André Remacle et celui de Charles et Nicole Martin, également d'anciens  résistants, quoique moins connus .Lorsqu'Elsa avait dit  croire avant tout à la bonté , je crois qu'elle avait fourni la définition même de ce qu'est Dieu pour moi aujourd'hui, á savoir l' Amour créateur de vie,  et qui reste un espace de connivence entre les âmes en dépit de la mort des corps.  Dans son roman ''l'Ame'', qu'elle m'avait offert avec la dédicace ''A Dominique, pour qu'il dise l'âme de demain'' voici ce qu'avait écrit Elsa :

    ''Nathalie frissonna dans son fauteuil . Les voilà qu'ils parlent de Dieu ! Un comble . Quand les hommes se mettent ensemble après diner, pour, enfin, pouvoir être à leur aise ... Christo était un homme . Et cette fumée ! Ce soir, la défense de fumer ne jouait pas , Nathalie  ne pouvait pas les ennuyer si gravement. Elle avait mal aux yeux et à la tête. Tout venait de ce qu'elle était assise trop loin et ne pouvait se déplacer , simplement une question de sièges poussés près des murs et , elle, restée au milieu ... Nathalie eut l'impression d'appartenir à l'âge de pierre, le monde s'éloignait, elle n'en percevait déjà plus que les feux arrière, à peine. Incapable de soutenir une conversation, même avec un enfant. Tous ses concepts de primaire dépassés , physique, chimie, arithmétique, disparaissant à l'horizon ... Et le concept chancelant de Dieu allait peut-être  reprendre son équilibre sur une base différente, avec un nom différent . Question de terminologie. // Elle ne les écoutait plus . Elle s'écoutait... Quelque chose d'encore jamais éprouvé ... la sensation d'être arrivée à la limite de sa vie.''

    Puis les invités quittèrent Saint Arnoult, et l'américaine partit avec une des célébrités présentes dans la voiture qui l'avait amenée . Je restais seul avec Aragon,et il me dit  : ''Il faut absolument que tu lises Peter Ibbetson, je vais te chercher ce livre''. Je le vis  scruter pas mal de temps ses étagères de livres, même dans les rayons en altitude. Ce bouquin, me disait il ,avait été tellement important pour lui, mais il ne le  retrouva pas.... Il revint alors avec un jeu d'épreuves de ''Matisse, roman'' ... Matisse était de loin mon peintre préféré ,dont j'ai d'ailleurs copié à ma façon , pour m'entraîner, pas mal de toiles dans mes carnets sous d'esquisses annotées que j'ai publiées sur le net, en marge des photos de mes propres peintures sur toile. Son jeu avec les couleurs m'a toujours inspiré, même davantage  que celui de Kandinsky, Gauguin et Miro . 

    Aragon me  fit s'asseoir à côté de lui devant une longue table de bois et se mit à me lire lentement son ouvrage tout en le corrigeant, et en me montrant les illustrations au fur et à mesure . Voilà comment nous passâmes le temps jusqu'au soir. Il me suggéra de passer la nuit dans une chambre et de repartir avec lui le lendemain matin . Puis je le vis se mettre à se raser . J'étais étonné qu'il se rase le soir, et il me répondit : '' Toi tu ne ne te rases pas le soir pour avoir la peau douce avant de te coucher avec Elisabeth ?'' A vrai dire, répondis  je ,personnellement je fais rarement l'amour la nuit , pour moi c'est plutòt  une activité du jour ... Devant ma réaction, Aragon poursuivit : ''Maintenant Elsa n'est plus là mais je continue comme si elle était là ''. 

    Au fil des questions qu'il me posa ensuite , il apprit que j'avais un entraînement  de danse le lendemain matin , avec mon ami d'alors Zia Mirabdolbaghi qui en même temps s'entraînait au dombak , ou zarb, et avec qui je partageais des projets d'art plastique  . Je ne ratais jamais aucune des occasions d'entraînement avec autrui ni même un cours, y compris quand  j'étais malade, car c'ètait dans cette nouvelle nature  que je me délivrais  de mon karma  héréditaire ,par une poésie totale de la vie sur tous les plans de la perception, pour y refondre mes hérédités .Je n'avais pas trop envie de dormir au Moulin, je ressentais cette nuit là venir une sort de froidure métallique  . Après que je lui aie confié ces impressions,  Aragon me proposa de téléphoner à son chauffeur  pour lui demander s'il pouvait  venir nous chercher , puis  dès son arrivée nous retournâmes tous trois à Paris où nous nous séparâmes.

    Apres le décès d'Elsa, je ne reçus plus de message pour passer d'urgence la visiter, aussi  il se passa quelques temps sans que je revoie Aragon. Puis un jour, alors que je sortais du cours de ballet contemporain de Rober Ribes , rue du Bac, voilà que je me retrouve sur le trottoir nez à nez avec lui. Joyeux, il me fait la bise et  me sort : '' Alors pourquoi tu ne viens plus me voir ?'' . En fait c'était parce que je n'étais jamais allé chez Elsa sans avoir reçu une invitation, donc je ne me voyais pas imposer ma présence de façon impromptue, vu que  je n'avais reçu aucune invitation. 

    En règle générale , je ne me souciais jamais de ma tenue vestimentaire ou plutôt je me promenais le plus souvent dans un habit orange qui avait l'avantage de permettre une mobilité complète de mes membres, c'était un vêtement d'une seule pièce qui avait toutes les qualités d'un collant , je me promenais dans cet accoutrement du fait que j'allais toujours d'un entraînement de danse à un autre, y ajoutant seulement un pull si le temps était trop frais, et  en salle, s'il faisait trop chaud, je me déshabillais pour ne garder qu'un maillot de bains . 

    Je ne changeais jamais de cet habit orange, je le lavais  et le faisais sécher à ma fenêtre ou au dessus du chauffage, c'était rapide car il était léger. La coupe de ce costume était ample pour danser en tous lieux, par exemple au bois de Vincennes mais aussi en toute circonstances urbaines . J'avais compris que la possibilité de réaliser mes rêves  dépendait de mon aptitude à m'épanouir dans l'ascèse, ainsi je n'aurai pas  à prostituer mon temps  , je survivrai avec le budget minimal qui était le seul que je puisse espérer en restant libre . J'avais l'impression de ne pas avoir besoin d'habits particulier pour plaire, à cette époque là il n'y avait quasiment que des femmes dans les cours de danse, et je me sentais apprécié sans avoir faire d'efforts , et certain qu'il serait vain de plaire à ceux qui étaient branchés sur les fringues de ville, et pour moi  s'il fallait m'habiller élégamment ce ne pouvait être qu'avec un costume de scène, pour danser.

    Ce que je voyais ce jour là , c'est  qu'Aragon déambulait dans un costume de ville très chic de couleur crème, avec une écharpe, ce n'était pas du tout le genre d'accoutrement que je lui connaissais jusqu'alors. Et lui dut remarquer que mon habit orange était usé , délavé avec des petites déchirures , car il me fit : ''. Tu dois être bien  fauché , je suppose, pour ètre si mal habillé'' . Sa coquetterie s'était décuplée depuis le décès d'Elsa, et j'avais entendu plus d'un bruit sur sa transformation,  et sur  ses penchants homosexuels dont j'avais imaginé qu'ils avaient été seulement ceux de sa jeunesse, avant Elsa.  Je me mis à redouter que l'affection réciproque qui s'était exprimée  avec distance entre nous ne s'exprime désormais  d'une façon embarrassante,  car seul le charme féminin m'exaltait physiquement. 

    Il m'était arrivé de me décider à céder aux avances d'amis homosexuels ou bisexuels ,notamment  mon maître de danse, tellement ils étaient attentionnés et serviables à mon égard, et tellement ils semblaient frustrés de ma distance, mais à peine  ils commençaient à frôler mon corps, j'étais pris d'un profond malaise , comme le mal de mer .Alors il m'était impossible de me forcer. Contrairement à un préjugé alors très répandu, tous les danseurs mâles n'étaient pas ''gays'', je ne fus jamais attiré par les hommes .Même les femmes me paraissaient généralement trop masculines , j'avais besoin de ce que l'on appelle en yoga tantrique l'ojas de la femme danseuse, c'est à dire ce rayonnement  ultra féminin créé par leur ondulation magnétique. Dès mes premiers cours de danse à Bali en 1971 Nyoman Djayus  m'avait expliqué comment alterner en moi même les vibrations manis et keras ( yin et yang) , et j'ai dans mon répertoire  aussi bien des danses réservés aux femmes qu'aux hommes, ainsi que des katas d'art martiaux  . Je peux aimer danser de façon féminine sans être pourtant attiré par les hommes. En Inde l'interprétation féminine est dite lasyan, elle est ondulée, tandis que l'interprétation masculine, tandava, est plutôt raide, et mon professeur Krishna Rao insista plus tard pour que j'imite le moins possible le style lasyan  qui s'exprimait tout autour, puisque ce sont surtout des femmes qui pratiquent la danse. 

    Personnellement, en improvisant mes fables dansées, j'oeuvre, selon les suggestions de Sri Agastyar, à rétablir  en moi même cet équilibre entre l'expression masculine et l'expression féminine que l'on pense pouvoir n'obtenir qu'en couple. Certes en couple , l'énergie est davantage réveillée ,  on a l'impression d'un passage de témoins, et de participer à l'humanité pour la fertiliser,  la vie corporelle fait sens ,  la félicité spirituelle parait  compatible avec le plaisir physique  . Néammoins  avec l'androgynat yoguique apparait une opportunité  de se soustraire à l'illusion des désirs et leur cortège de catastrophes , mais comment ne pas rester coincé dans l'horloge ? Hors de l' alchimie hétérosexuelle , mes relations avec autrui ne peuvent procurer que des extases intellectuelles, ce qui n'est pas moins intéressant que les relations physiques , mais dans les deux cas, l'accord nécessite une harmonie volontariste réciproque .

     Je sais pourtant que l'attraction instinctive est davantage prisée que l'ajustement harmonieux, mais en ce qui me concerne le sexe n'existe pas en soi, pas plus que l'oreille et les yeux, et le mental dépollué par le feu du Phénix devient le coordinateur des sens et le scrutateur de la Conscience cosmique .L'intellect est un  pôle électrique  qui à son paroxysme  devient magnétique , ce qui attire vers le sexe de la personne au mental rayonnant, et si on se prète au jeu , le mental devenant magnétique, c'est le sexe qui devient électrique . S'ensuit un courant alternatif qui entre les partenaires inverse continûment les pôles masculins et féminins. De là , que désirer ? Désirer c'est prendre le risque d'une impasse de plus dans la destinée animale, alors autant contempler le Je cosmique à l'oeuvre , le souffle qui anime la marionnette d'os, mème en parlant  avec le langage  limité de l'humain, s'il y a un désir d'écoute .

     Je bafouillais, pour répondre à Aragon : '' C'est clair que je suis fauché, je ne sors que pour la danse, et seulement là où c'est gratuit''. et voilà  qu'il me réplique , en se désignant de la main : ''Alors si tu es fauché  pourquoi tu ne demandes pas à papa ? Viens, je vais t'acheter une chemise et un pantalon'' . J'étais confus et j'expliquais  que j'avais juste besoin de vêtements pour prendre le métro d'un cours de danse à l'autre , que j'avais horreur de me sentir serré dans des tissus , sans pouvoir lever bras ou genou à ma guise , et horreur  du cinéma mondain, où en plus, désargenté comme j'étais, je ne pouvais accompagner aucune consommation .

     En fait avec cette disposition d'esprit, je me sentais riche comme la nature, je n'ai découvert que j'étais pauvre que vers soixante ans, quand des parasites identitaires avec pouvoirs de rétention, d'expulsion ou d'interdiction de séjour ont refusé visa ou carte de séjour à mon épouse parce que socialement je n'avais pas assez d'argent en banque . Là j'ai compris que le vrai diplôme chez les fascistes assassins de Lorca ou de Manouchian, c'est l'argent, ou la couleur de la peau , et que l'ascèse lorsqu'elle porte chance porte ombrage à ceux dont la créativité se limite à dompter les esprits par la matière. Jusqu'à ce qu'on me demande de montrer tant d'argent pour que soit respectés mes droits de citoyens , jusqu'à  ce  que cette règle du jeu m'oblige à me ruiner judiciairement et en acrobaties économiques je pensais être riche parce que je l'étais en amour, en ferveur studieuse et en air pur.

    Car déjà à la fin de mon adolescence , après une lettre de Simonne Jacquemard  reçue dans un établissement psychiatrique où m'avait placé ma famille, je m'étais  mis  , pour m'affranchir de toute trace de l'identité grégaire,  sur la voie d'un yoga centré sur mes ressources intérieures. Les bars , les restaurants, les  divertissements étaient pour les autres, ils n'illusionnèrent jamais mes désirs. Bien sùr je n'étais pas contre la réussite sociale pourvu qu'on soit aimanté par l'utopie  de vie dans laquelle je commençais à m'insulariser, mais je n'avais déjà aucune motivation à faire des concessions pour plaire selon les normes vestimentaires de mes contemporains. Bref je vivais sur le plan de mes choix de conscience. Cependant  j'étais vraiment  ravi d'entendre Aragon  exprimer son affection en me parlant comme à un fils d'une façon dont mon père fut toujours incapable. C'était comme être adoubé par l'enchanteur Merlin dans le monde Réel, avec un mot de passe pour dégainer Excalibur du rocher où l'épée avait été plantée.

    Aragon me parut réjoui de retrouver mon franc parler, et mon type d'ambition  dénuée d'arrivisme, et ajouta : ''Bon ,viens à la maison, qu'on discute un petit peu'' . La rue de Varenne était toute proche, nous gravîmes  les escaliers et il me fit asseoir en face de lui dans son bureau, dans lequel je n'étais jamais entré...  En effet du temps d'Elsa on se rencontrait dans le salon, c'était avec elle que je conversais, et lui passait de temps en temps, comme pour nous observer, ou s'il stationnait, c'était pour savourer et jubiler d'observer la relation de type maternel qu'Elsa entretenait à mon égard pour tenter de me sauver du Déluge.

     S'il parlait, sollicité par Elsa , il se transformait alors pour moi en statue du Commandeur, ce qui suscitait chez elle un regard tendre et ironique  . Bref au temps d'Elsa je n' avais pas connu Aragon familier. Lors de l'enterrement j'avais senti que ma compagnie lui faisait du bien , j'étais certain d'avoir été proche de son coeur, je suppose parce que j'avais été avant tout le  protégé d'Elsa. J'avais senti que ma présence le mettait à l'aise car elle ne nécessitait  ni  grands discours ni  conversation nourrie. Maintenant donc ,  allais je avoir avec lui une communication décontractée comme celle que j'avais eu avec Elsa ? 

    Moi j'avais attendu d'être invité  pour ne pas avoir l'impression de m'imposer, et ce jour où je m'assis dans son bureau  je le découvris différent de ce que je l'avais connu auparavant. Bien sûr il ne pouvait parler que de sa mythologie dans l'Histoire , mais la statue n'était plus de pierre ou de carton pâte, c'est comme si la douleur du deuil l'avait transformé, et que la douceur de l'âge meurtri l'ait précipité vers des réflexes de complicité adolescente ... d'ailleurs il disait avoir du mal à supporter la fréquentation des vieux cons , et là forcément je reconnaissais une affinité, puisque j'étais allergique aux pantins  du milieu artistique et littéraire tellement hypocrite et vaniteux, où l'accessoire mille fois ressassé  empêche de communiquer sur l'essentiel qu'est la simplicité des aspirations humaines matérielles et spirituelles. Je ne dis pas que les autres milieux sont plus fiables, mais que les poètes font comme s'ils suffisait d'annôner de grands mots avec grand style pour se faire passer pour voyants, lucides, prophètes... le cléricalisme est mortifère, mème avec une rhétorique anti conformiste.

    Nous étions face à face assis chacun d'un côté de son bureau, et   Aragon  se lança encore dans ses souvenirs, mais comme s' il ne s'agissait plus  d'un temps révolu, mais d'un temps presque retrouvé. Puis voilà qu'il me sortit, après m'avoir toisé de façon songeuse et amusée : '' Tu me fais exactement penser à moi quand j'allais rendre visite à Barrès'' . J'étais plutôt stupéfait, car il venait de me parler de sa rencontre avec Apollinaire et maintenant c'était  Barrès, carrément un homme de droite, loin de partager comme moi   les opinions de Jaurès sur les nationalismes ... Jaurès, qui  a même écrit des poèmes mystiques d'autant plus  plus convaincants qu'il n'instrumentalisait pas le mot Dieu dans ses discours politiques...  Je savais que Barres  avait compté  pour Aragon , mais de là à se comparer à lui ....j'exprimais mon étonnement. Il me répondit quelque chose comme : '' Tu sais, petit, l'important ce sont les hommes eux mêmes, leurs qualités personnelles, et puis  dans la vie , quand on est à la poursuite d'un idéal, on ne sait pas tout de suite quel sera son visage''. Néammoins  moi à dix ans , ce n'est pas Barrès qui m'avait exalté   mais '' les Mille et une Nuits'' , l'édition illustrée d'Antoine Galland.

    ''Mais, me récriais je , je suis tellement différent de ce que vous étiez à cette époque... '' Il poursuivit : '' Tu es quand même avec une Elisa, l'amour à l'amour ressemble... quoique .... c'est vrai, ton visage me fait plutôt penser à celui de Desnos'' et il partit sur une longue tirade sur Desnos des temps surréalistes jusqu'à sa fin. ''J'espère'', dis je'' que mon destin ne sera pas aussi tragique...'' ... peut être me voyait il maintenant ressemblant à Desnos,à cause de mes yeux obstinément cernés ... J'avais l'impression qu'Aragon dansait avec les mots  au fil du temps qui passe, pour imprégner de la flamme d'éternité l'instrument  passagèr du corps parlant, écrivant, et qu'il s'absorbait parfois dans ce que les dalangs conteurs malais du théâtre d'ombre, appellent lupa - l'Oubli - dont ils s'enivrent alors extatiquement, à force de mémoire.

    Je me remis à passer voir Aragon  rue de Varenne et un jour je  lui demandai pourquoi il avait refusé d'être le candidat du Parti communiste à une élection présidentielle où il en avait été question, cela lui avait été suggéré . Dans ma naïveté je supposais qu'un président vraiment sincère comme lui  aurait pu inspirer une révolution véritable  . Il me répondit  : ''Tu sais, fils, la Révolution a déjà eu lieu '' .... '' Ah bon, quand ? ''lui répliquais je , étonné. '' Mais en 1989  ! ''me fit-il , ''et on n'a mème pas mis en oeuvre toutes les possibilités démocratiques  qu'elle a rendu possible .... ''

    Aragon  me demanda une autre fois  si j'avais un livre en cours, je lui parlais de LA SCIENCE FICTION C'EST NOUS dont je venais de finir une version.  Il me dit de  lui apporter ça. En fait ce livre est le dernier de ma première époque , et alors que je le finissais, j'avais commencé les PICTOGRAPHIES , la première oeuvre  de ma deuxième époque, où apparait l'oiseau du Paradis  .Ma première époque d'adolescence s'achevait avec une auto-psychanalyse personnelle élargie à celle de la planète... j'en avais déduit que l'exploration psychanalytique  ne peut changer un destin, juste nous adapter aux vasanas , aux traces des déterminismes  dans notre destin, et aux vikalpas, au bruit psychique qu'elles font. La découverte livresque de ces concepts m'inclina vers une rupture identitaire plus radicale. Je n'étais plus artiste pour me faire comprendre mais pour me construire, les arts seraient désormais pour moi des outils yoguiques d'expansion et de rétraction des sens . Comme on le constata dans le journal ''Le Monde'', j' avais déçu les attentes placées en moi. Car mes attentes à moi étaient très loin de ceux qui jugeaient de tout dans leurs chapelles . 

    Mes PICTOGRAPHIES , c'étaient  des dessins . J'y  apparais  d'abord prisonnier dans une caverne, et dehors  un  Phénix guide ma danse ,  prête  à affronter des avalanches de rocs de le  le rejoindre ,à la façon d'un éclair. Puis je m'envole sur la grille qui m'emprisonnait, ma tête devient un soleil ... En ces temps là , je n'avais pas encore découpé  ces Pictographies comme une succession de poèmes avec des titres. Il  s'agissait alors d'un rouleau de papier dessiné , je pensais que cela allait déboucher sur  une commande de fresque  géante avec les participations  de mes amis Zia Mirabdolbaghi et Alain Sabatier, car ce dernier  nous annonçait  une commande du Musée d'Art Moderne qui ne se concrétisa jamais. La maquette d'un épisode de cette fresque  était affichée en permanence, en grand ,sur le mur de l'appartement de Zia.

     

    Alain , Zia et moi avions  oeuvrions alors au sein de  la Horde Catalytique, à l'origine un groupe de jeunes artistes produisant des improvisations  de musique contemporaine sur des instruments de toutes origines culturelles. Edmonde Charles Roux, nous avait invité à jouer dans une émission de télévision qui lui était consacrée, et  Aragon vint assister à un de nos concerts lors du Festival de jazz du Vieux Colombier de 1971 .Dans ''les Lettres Françaises''  il  nous donna  l'occasion de publier nos manifestes pour annoncer ce concert.  A la fin du spectacle, il vint nous saluer sur scène mais mes camarades d'alors se défilèrent, l'un d'eux se montra même impoli à son égard, sans même prendre le temps  de recevoir sa main tendue, comme s'il craignait de se compromettre avec le revenant d'un monde obsolète. Heureusement Aragon savait comment les jeunes artistes , comme à son époque, avaient tendance à l'arrogance vis à vis des anciens . Je restais seul alors avec Aragon, à expliquer qu'ils étaient intimidés et devaient d'urgence débarrasser le matériel , car les responsables du théâtre avaient demandé de  vider la scène  après le spectacle . . 

    Ce groupe cessa d'exister lorsque je partis m'installer à Bali en janvier 1974 ,les membres se dispersèrent, puis je fus pendant plusieurs décennies seul à me réclamer d'un art catalytique et en proposer des définitions et mises en pratique . Finalement  en 2013 me vint l'idée de  ressusciter  cette Horde catalytique sur internet en y accueillant plusieurs amis  poètes et artistes, comme Patrick Quillier,  Alexandre Gerbi, Jay Cee , André Orphal, Sylvia Bagli et je ne cite ici que les participants les plus concernés , les autres savent qu'ils peuvent également se réclamer explicitement de ce groupe dans leur vie publique  , que leurs initiatives sont bienvenues au nom du groupe, dans le respect des individualités, dans la mesure où ils partagent notre conception de l'art comme outil de l'évolution de l'espèce humaine, comme catalyse fusionniste. Un groupe qui réunit plusieurs dizaines d'artistes et auteurs dans la mise en scène virtuelle de l'Histoire de ce siècle 21.

    Aragon confia le manuscrit de LA SCIENCE FICTION C'EST NOUS à Edmonde Charles Roux qui l'apporta à Eric Losfeld et celui ci le publia, avec une photo du concert du Vieux Colombier en 4ème page de couverture. A chacune de mes visites Aragon continua   à me donner de ses livres ou d'autres  , d'Elsa ou une anthologie d'écrits sur l'art par Eluard. Certains ont disparu , comme pas mal d'archives car lorsque je partis  vivre  en Asie , ce fut  juste avec un sac, et donc lorsque je revins beaucoup plus tard chercher mes affaires , l'appartement étant resté occupé par des amis du groupe,je n'ai pas tout retrouvé.

    Elsa , Aragon ,puis Edmonde n'avaient jamais économisé leur soutien pour que je puisse réaliser mes projets, ils savaient téléphoner avec insistance pour débloquer des crédits, qui quoique maigres , suffirent presque à m'organiser à Bali et en Inde ( où j'eus ensuite d'autres faibles sources de revenus, travaillant dans des institutions françaises avec un salaire indien, c'était alors 20 fois moins qu'un salaire français. J'ai vu des amis artistes, dont je parlerai ailleurs peut être , claquer en quelques semaines des sommes  du genre de celles qui me permirent d'étudier des années en ascète , quoique presque continûment en couple . Pour des questions liées à la difficulté d'obtenir des visas permanents , et parce que j'étais intéressé par étudier dans ces deux pays, ma vie allait se partager entre eux une dizaine d'années, passées à apprendre, présenter  puis organiser et créer des danses , avec la bienveillance complices de mes professeurs. 

    Je revins à Paris  en décembre 1977 soutenir une thèse sous le titre ''Animations corporelles à supports mythique, rythmique et rituel en Inde et en Indonésie'' . La soutenance était suivie d'une présentation de la première version de mon théâtre des oiseaux de Paradis, qui combinait des ressources de danse de plusieurs origines, européenne et asiatique. J'avais envoyé d'Inde une invitation à Aragon mais je n'eus aucune réponse et je ne le vis pas arriver le jour venu. A l'époque il n'existait pas de téléphone portable  et  en Inde je vivais loin de tout téléphone fixe, je ne téléphonais jamais. J'avais prévu de réduire au minimum la durée de mon séjour en France , pour ne pas m'éloigner trop longtemps de ma nouvelle compagne et partenaire Christine  et des cours que j'animais dans plusieurs villages.

    Et voilà qu'après la soutenance, quelques jours avant la date programmée de mon vol de retour pour l'Inde, je reçois à Marseille un long télégramme d'Aragon m'expliquant qu'il avait reçu l'invitation trop tard à cause d'une grève, la date était dépassée . Il voulait absolument que je le visite  avant de repartir. Dans un deuxième télégramme qu'il m'envoya peu après télégramme , il affirmait que mes envois d'images ´´etaient  affichés sur son mur. Il s'agissait en particulier, vis je plus tard, d'une photo de moi dansant dans un temple balinais,prise en 1974. Je n'avais à l'époque eu aucun appareil de photo, j'avais donné à mon maître Ida Bagous Ktut Raï Datah tout ce que j'avais alors pour qu'il puisse se construire un toit qui protège sa famille de la pluie, et pour qu'il me nourrisse et m'instruise toute l'année. C'est son cousin le peintre Astawa qui m'avait offert cette série de photos .Le télégramme me parvint chez mes parents où j'étais de passage, je m'apprêtais à prendre le train pour Paris et de là , l'avion pour le retour en Inde. Après avoir atteint la gare Saint Lazare, je me rendis directement au domicile d'Aragon.

    Il me parut vieilli, comme  flottant parmi ses propres meubles. Il me parla d'abord de ses dentiers, qu'il ne cessait d'égarer dans l'appartement, sans parvenir à les retrouver, ce qui l'obligeait à en acheter de nouveaux, il me disait les prix, il se désolait des prix . Face à son affolement et à ses redondances, je sentais monter en moi une angoisse. Je lui demandais ce qu'il écrivait en ce moment, il me répondit qu'il n'écrivait plus ces temps, et qu'il allait faire de son éditeur Gallimard  son héritier. En fait il semblerait qu'il a changé de décision par la suite, à moins que son exécuteur testamentaire ne soit chargé  de ce plan sous une forme ou une autre.

    En tous cas, j'étais surpris car Aragon m'avait jadis recommandé de reprendre le copyright de mes livres imprimés  dès que je le pourrai, ce que j'avais fait pour mes livres lorsque les délais de réédition prévus par les contrats étaient dépassés. Pour moi, cela correspondait à un désir de produire de meilleures versions de mes poèmes  et de les mettre en musique. Je lui remémorais ce conseil, mais il m'expliqua que s'il m'avait dit cela c'est qu'il lui avait fallu attendre au dela de ses cinquante ,à 60 ans, pour que les royalties de ses écrits lui permettent vraiment d'en vivre. Mais là avec Gallimard ce serait un contrat pour que l'éditeur réédite les ''oeuvres croisées'' pendant cinquante ans après sa mort. 

    J'étais carrément étonné qu'il s'inquiète de sa postérité , tant elle semblait assurée . Je lui demandais alors s'il craignait vraiment de tomber dans l'oubli, cela me semblait tellement invraissemblable, il était désormais reconnu comme une référence centrale dans l'histoire littéraire du XXème siècle ... Mais  il me répondit , l'air inquiet, qu'en fait tout dépendait des orientations politiques du futur , rien n'était gagné d'avance.... contrairement à ce que j'imaginais, une résurgence de la barbarie fasciste serait encore possible, sous d'autres masques,  qui ringardiserait tout ce à quoi lui et Elsa  avaient cru ... 

    Je dois dire qu'il m'a fallu attendre de connaìtre  avec mon épouse actuelle les tribulations des couples franco étrangers au XXI ème siècle pour comprendre à quel point il avait vu juste et  avec quelle subtilité il est devenu de plus en plus possible en France  de neutraliser par de nouvelles doxas médiatisées toutes sortes de  témoignages véridiques , fussent ils abondamment étayés ... Aragon savait que l'Histoire connaissait divers procédés de falsification depuis des siècles, et qu'ils ne resteraient pas nécessairement  le monopole des fascismes explicites et du stalinisme du siècle 20...

     Même lorsque s'y pratiquait le massacre amérindien et l'esclavage, les Etats Unis d'Amérique se proclamaient bastions des libertés et de l'espérance humaine, et cela faisait consensus en Europe . Il n'y a que lorsqu'un pouvoir est vaincu que ses méfaits sont mis en relief . L'Europe se prétend actuellement le bastion des droits de l'homme, il suffit pour le croire de ne pas en avoir vécu le déni, et lorsque je rapporte avec force détail tout ce dont j'ai été le témoin ou que j'ai subi depuis que je vis avec Nim , mon actuelle épouse , d'origine africaine, je vois que je me grille chez les intellectuels médiatisés et que je peux passer dans ma propre famille pour un fou qui invente , exagère,par parti-pris idéologique, un conspirationniste farfelu et victimiste.  

    Partout, les privilèges des nomenklaturas et des exploiteurs réduisent leur entendement, et comme les castes nanties estiment leurs privilèges basés sur leurs mérites personnels, ceux qui sont traités comme bétail leur paraissent nécessairement avoir mérité les tribulations de leur karma.  Lorsque juifs, palestiniens, tatars, roms, tutsis , couples franco-étrangers ,  homosexuels vivent sous une épée de Damocles dans un pays , ce qui a toutes sortes de conséquences pratiques asphyxiantes, cela est rarement reconnu  par leurs contemporains ,pas même par les minorités auparavant persécutées , et qui au contraire conçoivent comme raisonnables les nouvelles ségrégations qu'elles exercent, sans en peser les conséquences , puisqu'elles ne sont médiatisées que pour les minimiser */note 3. Ce n'est que lorsqu'il est trop tard  et que l'épée de Damocles est irréversiblement tombée, que l'on dénonce reconnaìtre le mal, et encore ...

    Mais Aragon avait vécu la période de la gouvernance pétainiste et Elsa avait témoigné sur les lendemains de la libération, et donc ils savaient comment on fabrique ou ruine les réputations, comment le résistant avait été  nommé terroriste, puis comment l'opportuniste avait été capable d'antidater ses retournements de veste, et de se servir des mots comme d'une fausse monnaie . Aragon  savait, lui, qu'il suffisait , pour des gens de pouvoir ayant des complicités médiatiques, de lancer l'opprobe sur tel ou tel auteur , pour que tout à coup, personne n'ait plus envie de le lire. Il savait qu'on pouvait perpétuer l'adulation d'un écrivain en le valorisant médiatiquement, et qu'il lui serait trouvé des justifications pour même ses faux pas , tant que durerait sa béatification et qu'il ne serait pas préjudiciable d'en prononcer le nom en société . Tandis que moi je croyais encore que l'espèce humaine progressait en conscience de façon irréversible, avec la certitude que mon théâtre des oiseaux de Paradis serait dans le futur la référence providentielle de l'unité humaine dans toutes les langues de la planète, une sorte de folklore sensé pour un saut évolutif de l'espèce .

    Face aux affolements divers  d'Aragon et à ses redondances  lors de nos retrouvailles , j'avais senti  monter en moi une angoisse parente de celle qu'avait suscité en moi la décrépitude d'Elsa. Car ce jour là il ne ressemblait plus à l'Aragon que j'avais connu .Il paraissait  accablé par une crise de  dislocation , de froide sécheresse , il ne rayonnait  plus dans le rôle du voyant inspiré qui inspire mais dans celui d'un vieil homme qui contemple sa réussite pour éviter de s'attarder sur son délabrement présent.  Bien sùr, je comprends aujourd'hui qu'un pédagogue ne souhaite pas voir poubellisée l'oeuvre de sa vie, il est légitime qu'elle atteigne ses destinataires pour les éclairer. Mais là j'avais l'impression d'un affollement mental, d'une solitude aigue qui  se rassure en prenant les allures  d'un ''gentleman farmer''  gérant  ses propriétés et ses intérêts post mortem. Etait ce une crise passagère de perte d'identité? J'avais la nostalgie du rôle de témoin historique  dont Aragon avait su jouer avec efficacité et distanciation pour faire évoluer ses auditeurs . Là ses phrases sortaient comme dénuées d'inspiration, limitées à des considérations  matérielles dérisoires et futiles, comme s'il était redevenu, selon ses propres mots sur son passé, '' l'escamoteur que l'on fait disparaître''. C'était tragique car c'était seulement une façon de se masquer un désastre  par une démonstration de cohérence  qui suintait comme un délire , une atteinte de la mort vivante.

    Alors comme  Aragon m'avait dit avoir regretté de ne pas été informé à temps de la soutenance de ma thèse , qui s'était terminée par  la présentation de mon théâtre des oiseaux de Paradis , je décidais de rompre avec cette ambiance délétère qui me mettait mal à l'aise  : Je me levais et lui dit que j'allais lui montrer ma poésie dansée actuelle... J'explicitais  d'abord ma conception de la poésie dans le sillage des antiques  poètes indiens Jayadeva et Binda, à savoir d'une  poésie indissolublement liée au chant , à la danse , au symbolisme yoguique d'une mythologie  , d'une poésie qui puisse agir sur les divers plans sensoriels et mentaux comme une catalyse du théâtre de la vie quotidienne , de sorte  que l'évolution spirituelle de l'espèce  ne soit pas juste des mots sur un étendard. Je demandais si je pouvais pousser les fauteuils pour danser , car j'avais besoin d'espace, il acquiesça comme soulagé d'ètre extirpé  de ses balbutiements répétitifs . 

    Alors, comme je me mis à danser en chantant , je vis revenir sur sa face   son regard inspiré, éveillé, son écoute, sa disponibilité , et je me sentais de nouveau en confiance devant sa bienveillance paternelle retrouvée. Je sentais que le décalage créé par ma longue absence se dissipait, je retrouvais un regard qui semblait ravi de voir que je n'avais pas perdu mon temps, mon activité prolongeait les intuitions qui l'avaient exalté dans ses songes andalous et ses tâtonnements en  langue malaise : Bref que ce n'était pas en vain qu'Elsa puis lui m'avaient soutenu dans mes projets, même si je n'avais pas fait fructifié à Paris ma notoriété naissante de jadis, car j'avais pris pied dans mon utopie, j'avais réalisé mon rêve et il était prêt à être partagé avec qui serait réceptif . 

    A vrai dire, à Paris le succès était d'être un grand homme déclaré  incontournable par sa tribu, on déifiait le grand poète et on ricanait du poète raté mais qui lisaient vraiment l'un ou l'autre ? Même ceux qui le faisaient ne projetaient-ils pas ardemment leurs certitudes sur les deux ? De ce fait dans les deux rôles on pouvait se sentir dans un malentendu qui zappait la résonance du sens dans la vie quotidienne . En dehors de mon alchimie intérieure d'artiste, qu'avait été ma vie à Paris sinon une alternance de glorifications et d'humiliations également dérisoires, sur la foi d'utopies qui  portaient ombrage si elles ne restaient pas virtuelles . Par contre , en communiquant avec ma danse devant des publics populaires d'ethnies diverses, je déjouais le regard des snobismes orthodoxes , on ne pouvait nier mon rayonnement qu'en détournant la tête, je sortais de la pesée des spécialistes et de leurs attentes . Le public non patenté est généralement humble donc réceptif, car même si sa perception est limitée , il ne cherche  échapper au rayonnement de la danse puisque c'est ce qu'il est venu chercher comme un réconfort . Ce sont les organisateurs  , imbus de leur pouvoir, qui ont tendance à être pétris de  snobismes , comme des fonctionnaires de la culture  qui n'ont pas vraiment le temps de regarder ce qu'ils recommandent pourvu que ce soit déjà adoubé  par des célébrités.

    Lorsque j'eus fini de danser, Aragon me dit : ''il faut que tu restes à Paris, je vais appeller Cardin et il va organiser des  spectacles dans son théâtre ''. Cardin était un couturier très célèbre , on dit un ''grand couturier' ,qui avait ouvert une salle de spectacles à Paris, l'espace Cardin , et Aragon semblait désormais fréquenter cet homme de près . J'étais heureux de sentir que la foi d'Aragon en moi paraissait  soudain redevenue aussi vive que jadis, et même davantage ,mais mon billet d'avion était réservé et confirmé pour le lendemain. J'étais amoureux de Christine , qui avait pris le relais des cours de danse que j'animais à Auroville  et dans les villages tamouls environnant . A cette époque là , je croyais être installé en Inde pour toujours,je croyais  que les difficultés financières et surtout administratives seraient vaincues, et Paris me semblait un sable mouvant propice aux marchés de dupe, sans suivi donné aux  enthousiasmes passagers  .

    Je vivais en ascète , c'est à dire avec des besoins matériels limités au strict nécessaire, cela me permettait d'éviter toute prostitution de mon temps à une termitière qui avait d'évidence d'autres priorités que les miennes . Ce qui était néammoins plus retors c'était déjà d'affronter le verrouillage progressif des frontières . Les constitutions sont pleines de préambules humanistes mais sont le plus souvent des masques pour les prédateurs vampires des nations et leurs sociétés de contrôle. A Paris  mon patron de thèse m'avait proposé en vain *note 4/ de prendre la succession de Roger Ribes pour les cours de danse à l'université, au département théâtre. Apres des années de vacations régulières  où Roger n'avait pas été payé , l'argent qui lui était dû était enfin arrivé à l'université, mais plus personne ne savait où le contacter, car il avait démissionné pour aller ouvrir un cours à Venise , sur l'invitation d'une école de danse. Voilà ce qu'on m'apprenait, et j'étais le seul à avoir gardé le contact avec Roger pour l'informer ....

    Je repartis vivre en Inde, puis encore à Bali, puis je revins fin 1982 en France pour une tournée de danse . Christine et moi nous avions aménagé un  véhicule en camping-car pour sillonner les routes avec des haltes prévues dans les théâtres et autres salles où nous allions danser .Nous arrivâmes à Paris à l'aube, ma première visite fut tôt ce matin là pour Aragon... il venait de décéder. Il me semble que sur la première page  du livre d'or posé pour les visiteurs , j'esquissais  un oiseau de paradis, et que  j'écrivis quelque chose pour exprimer comment l'Amour  est un témoignage du Divin . L'offrande Divine s'exprime davantage  dans la pratique de l'amour  créatif au quotidien que dans les dogmes religieux  ou les discours ostentatoires. Répondant à mes questions devant le lit rue de Varenne Jean Ristat me rapporta qu'Aragon avait souffert des mois, perclus d'escarres. 

    Aprés deux années de spectacles , je partis vivre en Polynésie où je vécus 22 ans,j'obtins de faire  créer des ateliers et options théâtre  au Lycée, suite à une loi votée en 1983, ce qui me permit de faire vivre mon théâtre catalytique et de mettre en scène des pièces d'autres auteurs . Après de nombreuses années ,Christine attribua ses ennuis de santé au climat humide ,et fut jalouse de mes élèves sans que je n'en ai fréquenté aucune aucune intimement.  Elle voulut revenir vivre en Europe, et je la suivis, puis nous nous séparâmes et je repartis pour la Polynésie  . Il me semble que c'est en 2002 que Riro,la vahiné qui m'accompagna ensuite , me dit un jour que la compagne de sa fille s'appelait Hinatea Triolet.

    Dans son premier livre , évocation de son temps en Polynésie, Elsa compare les pics abrupts de Moorea aux tours du Kremlin... mais elle raconte aussi son ennui, et finalement elle était repartie seule à Paris, où elle allait rencontrer Aragon. André Triolet était resté en Polynésie, et y avait eu apparemment une descendance ... 

    En janvier 2009, je déménageai  en Afrique et j'y vécus depuis  avec Nimozette, jusqu'à l'épouser, nous vivons ensemble encore à cette heure  . Nous fîmes , et faisons encore l'expérience d'années de galères administratives et financières, cette fois en raison des frontières renforcées des états Schengen, où les préambules et le droit strict des lois sont bafoués par des artifices procéduriers interminables et l'impunité de fonctionnaires qui récidivent mème lorsqu'ils perdent des procès ... Oui, le poème de ''l'Affiche rouge'' et ''le Rendez vous des étrangers d'Elsa'' sont toujours d'actualité, même si chaque époque a ses masques spécifiques , son narcissisme ostentatoire propre , sa façon de maquiller ses méfaits et de judiciariser le combat pour obtenir le respect des droits théoriquement garantis par les constitutions et les accords internationaux. Il n'y a plus de pancartes pour menacer de poursuite les mariages raciaux, mais des sabotages à tous les niveaux, un fascisme rampant d'autant plus virulent qu'il bénéficie de l'impunité et de l'indifférence de ceux qu'il épargne ou flatte.

    Elsa et Aragon  avaient finalement démystifié le théâtre des apparences ,ce qui ne les empèchait pas d'y jouer, bien au contraire .Ils pouvaient  concevoir et faire connaître  les souffrances et les injustices subies par d'autres qu'eux mêmes dans une termitière humaine  largement dépourvue de conscience , sauf superficiellement. C'est là que les activités d'un poète , d'un artiste ont du sens  : il s'agit de partager une ambiance où amour et liberté ont droit de cité , même si c'est en marge des hiérarchies dominantes. Bienvenue dans l'Humanité , voilà  ce que je répète pour pouvoir l'entendre. MAEVA, MANAVA,AROHA (ou Aloha en hawaïen) !

    Dominique Oriata TRON  *note5/

    ______________

    *note 1: Pour des raisons trop longues à expliquer ici, j'ai éprouvé le besoin d'écrire  en tahitien le sous titre de cet opus, comme je le fais pour mes peintures. Cela veut dire quelque chose comme '' la rencontre ancienne de la bienveillance'' (AROHA exprime en fait l'amour spirituel désintéressé du coeur, la salutation qui porte chance,  alors qu'HERE  - prononcer héré-exprime l'amour des amants)

    *note 3: voici la transcription, faite  à partir d'une ancienne bande magnétique  d'une émission  de télévision qui fut diffusée le  Samedi 5 février 1966 sur la 1ère chaîne en France ( à l'époque il n'y avait que  deux chaînes). Cette émission s'appelait '' la vitrine du Libraire '' et on y trouve des interventions d'Elsa Triolet, Guillevic et Pierre Seghers, ainsi que de moi même et de mes parents (l'émission est un montage d'enregistrements réalisés à Paris et à Marseille, tout le monde n'est pas présent en même temps devant la caméra)

    Jean PRASTEAU : ''STEREOPHONIES, de Dominique TRON... C'est l'oeuvre d'un poète, mais d'un poète assez particulier puisqu'il a quinze ans. Pierre Seghers, quelle est l'histoire, la courte histoire de Dominique TRON ?''

    Pierre SEGHERS : Pour moi, cette histoire commence en 1964, peu avant Noël. Dans l'ensemble des manuscrits que nous recevons en tant qu'éditeur , tout à coup je trouve , sur une feuille de papier écolier, une lettre rédigée de façon très étrange, et il y a trois poèmes avec... alors... je lis toujours le courrier qui me parvient, et immédiatement... j'ai trouvé, dans ces trois poèmes, une présence très particulière, une affirmation, quelque chose qui me paraissait révéler vraiment un poète. Et ... comme dans sa lettre ce jeune garçon me disait qu'il venait d'avoir quatorze ans, j'ai failli même ne pas croire  que ce Dominique TRON existait...puis deux ou trois jours après, me rendant chez Elsa Triolet, au cours de la conversation, madame Elsa Triolet me dit  : "Mais connaissez vous un garçon de Marseille qui s'appelle Dominique TRON ?"... Ce garçon avait envoyé  de son côté à Elsa Triolet certains poèmes, et nous nous sommes rencontrés tout de suite sur cette certitude que Dominique TRON était un vrai poète. Alors nous l'avons encouragé, je lui ai écrit, nous avons eu des manuscrits, j'ai lu tout ce qu'il faisait , et de plus en plus je pense que nous avons avec ce très jeune garçon un écrivain en puissance et déjà réalisé avec le livre STEREOPHONIES.''

    Jean PRASTEAU : ''Nous avons demandé aux parents de Dominique TRON ce qu'ils éprouvaient en voyant le nom de leur fils dans la vitrine du Libraire''

    YVETTE : "Bien sûr , de voir mon fils dans les vitrines ça m'a fait plaisir, mais enfin je ne sais pas où l'avenir...''

    FERDINAND : ''Eh bien c'est très agréable de voir son fils édité, c'est évident, seulement je crois que la priorité doit être laissée d'abord à ce qui sert de base à la vie , les succès universitaires. La poésie ne peut être, à l'heure actuelle, qu'un divertissement.''

    Jean PRASTEAU : ''Elsa Triolet a rencontré Dominique TRON . Elle a préfacé Stéréophonies. Que pense t elle du poète ?''

    Elsa TRIOLET : ''Je crois que ce qu'il écrit maintenant, et ce qui me confirme absolument son talent tout à fait exceptionnel, eh bien ça correspond à cette évolution du tragique en lui ... Il y aussi un très grand changement dans la forme de ce qu'il écrit ... il est maintenant influencé par la musique ... Il a toujours été influencé par la musique , mais maintenant il a découvert le compositeur grec Xenakis qui base dans une certaine mesure  sa musique sur le calcul des probabilités, c'est une intrusion des mathématiques dans la poésie de Dominique TRON, en tous cas, il le croit, et ça change beaucoup la forme. C'est devenu beaucoup plus dur... Bref , je regarde ça avec un très grand intérêt, où ça va , et comment ça va se développer, parce que ce qu'il y a eu jusqu'à présent, ce qui nous différencie de lui.... je suis presque une aïeule par rapport à lui, eh bien c'est qu'il a digéré et englobé dans sa poésie tout ce qui a été nouveauté... Lui ce n'est plus de la nouveauté pour lui, enfin les cosmonautes sont déjà ses frères, à peine ses aînés ... ce qui est intéressant aussi dans le cas de Dominique TRON, c'est que ça dépasse sa personne, ça dépasse ce qu'il fait, lui . Nous n'avons pour ainsi dire pas de poètes de vingt ans... enfin, tout ce que je reçois de garçons de cet âge, que ce soit ici, ou les poètes soviétiques dont je m'occupe tout de même, eh bien ils ont trente ans , c'est ce qu'on appelle maintenant les jeunes poètes. Or lui, il en a vingt, enfin, qu'est ce que je dis, il en a quinze. Alors ce que nous trouvons de neuf chez lui se répètera peut-être dans une génération...''

    Jean PRASTEAU :''Dominique TRON, comment êtes vous venu à écrire ? Quel est le premier poème que vous avez écrit ?''

    Dominique TRON : ''Le premier poème que j'ai écrit est en rapport avec Agadir. J'ai en effet vécu à Agadir pendant deux années lorsque j'étais tout jeune, et j'avais appris avec ma mère le piano... aussi, comme mon petit frère avait été mis au piano, lorsque j'ai commencé à écrire, c'est à dire il y a deux ans, en janvier 1964, j'ai tout de suite pensé à Agadir... Agadir qui est un peu, comme le dit le poète suédois Lundkvist, un paradis terrestre''

    Jean PRASTEAU : ''... et la suite ...les autres  qui sont venus après ...''

    Dominique TRON : ''J'ai été encouragé par un romancier qui est assez proche de nous ,qui est André REMACLE, et heureusement que j'ai connu cette personne, car autour de moi, personne, personne ne s'intéressait à la littérature vivante''

    Jean PRASTEAU : ''Quelles sont les lectures qui vous ont influencé ?''

    Dominique TRON : ''D'abord j'avais découvert dans la bibiothèque de mon père, au grenier, un volume d'Apollinaire, et ensuite André Remacle m'a prêté des livres d'Eluard, d'Aragon et j'ai commencé à être influencé par lui, par eux , puisque je les lisais, et ensuite, mais pas dans ce recueil de poèmes, j'ai été influencé par Henri Michaux  que j'ai découvert il y a un an maintenant, et qui depuis un an est mon poète préféré...

    Jean PRASTEAU : ''Quand vous écrivez , est-ce que le poème vient d'un seul jet ou bien est-ce que vous travaillez beaucoup?''

    Dominique TRON : ''Il y a un an je travaillais beaucoup le poème, et je ... il était fait surtout de petites pièces détachées que je choisissais par la couleur et que j'assemblais, et maintenant, il me semble que c'est surtout un cri ...''

    Jean PRASTEAU : ''Pourquoi avez vous intitulé votre recueil Stéréophonies ?''

    Dominique TRON : ''Parceque j'ai voulu faire penser d'abord à de la musique, et ensuite une musique qui envahirait tout l'être par plusieurs haut-parleurs, et d'ailleurs dans le livre on trouve des phrases parallèles qui sont comme des échos à d'autres phrases ...''

    Jean PRASTEAU : ''Monsieur Guillevic, lorsque vous avez ouvert Stéréophonies, vous poète, quels sentiments avez vous éprouvés ?''

    GUILLEVIC : ''Le mot "ouvert " ne me parait pas exact, parce que vous savez je suis un lent, moi, je ne pénètre pas très vite dans la poésie des autres... j'avais déjà lu avant, d'ailleurs, des poèmes publiés soit dans les Lettres Françaises, soit le petit fascicule publié par Pierre Seghers, et je n'avais pas été très accroché. C'est en lisant , en recevant le livre et en le parcourant peu à peu que je suis arrivé à me faire une image, une idée de la poésie de Dominique TRON ... en gros je crois qu'il y a là un poète très doué, son âge ne m'intéresse pas... je ne crois pas  qu'il faille être plus indulgent envers un poète de quinze ans  qu'envers un poète de trente ans... je ne le serai pas ... bien sûr, comme l'a dit Elsa Triolet dans sa préface, ce qui est très intéressant chez lui, c'est qu'il nous donne un monde de son âge, mais ceci dit, je m'intéresse à la facture, et il me semble que ce garçon est déjà sur le plan de la facture, de l'écriture, un homme mûr, un adulte... il est certes encore plein d'influences, la plus nette, la plus marquée me parait être celle d'Apollinaire, il y a aussi celle d'Aragon, et  celle que j'aime moins, de Cocteau, mais il y a quand même, il y a déjà une voix, il y a une voix... Je prends par exemple le premier vers de son livre :  "Soda, couleur de réclame" ... en même temps qu'une très jolie invention verbale, il y a une belle ellipse qui me parait neuve... rattacher quelque chose de concret comme un soda, à quelque chose de vague sinon d'abstrait : couleur de réclame .... je crois qu'il y a là vraiment quelque chose de neuf dans le moderne ... tout n'est pas de ce ton là parce que plus loin, par exemple, il dit: "les poissons roulant dans l'onde", ça ça fait encore à mon avis... le mot onde est un mot de la tradition poétique... et bien sûr cette poésie est mélangée... mais il se dégage quelque chose, n'est-ce pas... je prends le dernier vers de ce poème, il parle du réfrigérateur : " il a givré tous nos murmures d'enfants" ... il y a là un accent qui me parait très vrai dans le sens  où nous l'employons maintenant  pour notre poésie, que nous appelons la poésie moderne... Et, pour finir, j'ai le sentiment qu'il y a même chez ce poète, chez Dominique Tron, quelque chose de neuf que moi je n'arrive pas encore à distinguer et encore moins à formuler...et ce n'est pas étonnant  parce que nous ne formulons le neuf qu'après coup, quand on l'a mis au jour... j'ai le sentiment qu'il court dans ces poèmes quelque chose qui sera du neuf demain ou après demain...''

    *note 3 : Les ségrégations  sont rarement reconnues pour telles par les privilégiés de tel ou tel système social,sauf par leurs victimes et  sauf bien sûr s'il s'agit d'événements éloignés dans l'histoire et le temps, et encore,selon l' appartenance ethnique à laquelle on s'identifie, on continue de mythifier les massacreurs glorieux, de Colomb à François 1er, de Saddam Hussein à Bokassa, etc ..., car ils se sont débrouillés pour épargner leur terreur à des majorités consentantes .Je voudrais citer quelques lignes écrites par  Scolastique MUKASONGA, dans NOTRE-DAME DU NIL (Gallimard, 2012) :'' - J'ai honte de te le raconter , ça me fait peur, à présent j'ai peur de tous les hommes , je sais que chaque être humain cache en lui quelque chose  d'horrible. Même mon petit ami , je ne veux plus le voir : il m'a écrit qu'il était fier de s'être conduit en bon militant, d'avoir frappé les Tutsi (sic) de son établissement, il ne sait pas s'il en a tué , mais il espère qu'avec les coups qu'il a donnés, il y en a qui resteront infirmes;''

    *note 4 : En vain.... Quelques années plus tard   Maurice Fleuret assista également au théâtre dansé des oiseaux de Paradis,quelques temps avant de  démissionner de son poste de directeur de la danse au Ministère  parce que les budgets attribués n'étaient servis qu'aprés des délais très longs peu gérables par les artistes... Il m'avait proposé également d'enseigner  ,dans un conservatoire, mais son inspecteur Eric Barrault me contacta, j'avais déjà trouvé mon emploi en Polynésie et je ne voulus pas changer.

    *note 5 :Une table d'orientation pas vraiment compléte pour l'instant  de l'ensemble de mon oeuvre (peintures,poésie, proses, musique, théâtre dansé) se trouve dans une des pages du blog ART CATALYTIQUE (overblog). On explorera utilement également les publications  des EDITIONS DU GRIOT (eklablog) , des EDITIONS A L'ECOUTE (blog4ever) et les playlists de la chaîne DOMINIQUE ORIATA TRON (youtube) offrant en accès gratuit  plusieurs centaines  de fichiers vidéo. Sur facebook, on trouvera toujours en accès gratuit  sous forme de scans la plupart de mes livres imprimés à l'époque de mes rencontres avec Elsa et Aragon  ,dans les albums de WORLD SOCIAL GOVERNANCE , des photographies de mes peintures (certaines des toiles restent à vendre) dans les albums de FONDATION ABALYON et des photographies de mes spectacles ainsi que leurs textes dans THEATRE CATALYTIQUE DES OISEAUX DE PARADIS, puis mes nouvelles publications sont généralement annoncées sur la page du groupe HORDE CATALYTIQUE POUR LA FIN DE L'ANTHROPOPHAGIE. Pour une notice biographique consulter également la fiche Wikipedia Dominique TRON.

    ________

    La photographie qu'avait affichée Aragon  chez lui, avec ma danse dans le temple de Batuan à Bali, et autres documents :

    opus 793 : BIENVENUE DANS L'HUMANITE (TE FĀREREIRAA TAHITO O TE AROHA *note1/)

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    jouet et cuillères  offerts par Lili Brik :

    opus 793 : BIENVENUE DANS L'HUMANITE (TE FĀREREIRAA TAHITO O TE AROHA *note1/)

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    opus 793 : BIENVENUE DANS L'HUMANITE (TE FĀREREIRAA TAHITO O TE AROHA *note1/)

     

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    opus 793 : BIENVENUE DANS L'HUMANITE (TE FĀREREIRAA TAHITO O TE AROHA *note1/)

     

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    opus 793 : BIENVENUE DANS L'HUMANITE (TE FĀREREIRAA TAHITO O TE AROHA *note1/)

     

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    opus 793 : BIENVENUE DANS L'HUMANITE (TE FĀREREIRAA TAHITO O TE AROHA *note1/)

     

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    opus 793 : BIENVENUE DANS L'HUMANITE (TE FĀREREIRAA TAHITO O TE AROHA *note1/)

     

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    opus 793 : BIENVENUE DANS L'HUMANITE (TE FĀREREIRAA TAHITO O TE AROHA *note1/)

     

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    opus 793 : BIENVENUE DANS L'HUMANITE (TE FĀREREIRAA TAHITO O TE AROHA *note1/)

     

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    opus 793 : BIENVENUE DANS L'HUMANITE (TE FĀREREIRAA TAHITO O TE AROHA *note1/)

     

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    opus 793 : BIENVENUE DANS L'HUMANITE (TE FĀREREIRAA TAHITO O TE AROHA *note1/)

     

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    opus 793 : BIENVENUE DANS L'HUMANITE (TE FĀREREIRAA TAHITO O TE AROHA *note1/)

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    opus 793 : BIENVENUE DANS L'HUMANITE (TE FĀREREIRAA TAHITO O TE AROHA *note1/)

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    opus 793 : BIENVENUE DANS L'HUMANITE (TE FĀREREIRAA TAHITO O TE AROHA *note1/)

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    opus 793 : BIENVENUE DANS L'HUMANITE (TE FĀREREIRAA TAHITO O TE AROHA *note1/)

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    opus 793 : BIENVENUE DANS L'HUMANITE (TE FĀREREIRAA TAHITO O TE AROHA *note1/)

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    opus 793 : BIENVENUE DANS L'HUMANITE (TE FĀREREIRAA TAHITO O TE AROHA *note1/)

     


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  • version 1 :

     

    opus 154 : NOUBA

     

    version 2 :

     

    Dans un jardin à Marrakech

    une fontaine et des oiseaux

     

    Les oiseaux picorent dans l'eau

    les reflets du soleil de midi

     

    Sous des arches des musiciens

    s'accordent pour la nouba du matin

     

    Arabes , berbères et juifs séfarades

    chantent accompagnées de cithares

    de luths et de la derbouka

     musulmans ou chrétiens ces musiciens

     n'ont de Dieu que l'Amour

    qui se donne et prend soin des arbres

     

    Le jardin est vert avec quelques palmiers dattiers

    Sur une table basse sont posées des pommes

    les oiseaux s'en approchent puis reculent

    craignant la colère improbable des hommes

    et des femmes éblouis par le chant

    qui raconte les amours cristallins 

    du soleil , des ruisseaux, et de la fontaine

     

    Un enfant joue avec une balle

    et esquisse des pas de danse

     

    Des hommes en djellabahs blanches et chapeaux rouges

    tiennent des tambourins à sonnailles

    ils ressuscitent le temps andalou

    en dépit  des chefs bandits féroces

    qui depuis des millénaires

    se partagent nos héritages

    en verrouillant nos destins par leurs guerres

     

    La pomme est verte comme les prés 

    le ciel est bleu comme justice

    les oiseaux jaunes et la fontaine blanche

    rouges les lèvres des femmes

    châtains  les cheveux des hommes

     

    Une datte est posée sur la table

    elle est pour toi le visiteur

    qui entendant sonner les maqams 

    a frappé à la porte verrouillée

     

    les  dévots égarés iconoclastes

     ont accusé de blasphème la musique

    et couronné le mauvais coeur d'Iblis 

    du titre de docteur de la Loi


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  •  

    opus 586 : POEME D'UNE VIE ANTERIEURE

     

    version 1

     

    Il s'agit d'un poème  écrit le 25 mars 1966 qui a été dit  par moi même à la télévision, au Club des poètes de Jean Pierre Rosnay en 1966 ou 1967 . Pour voir et entendre cliquer sur  :

    http://www.youtube.com/watch?v=xq1Pfl2qPzs&list=PL3D927E87226FF9DF&index=2

    ou

    *

    version 3

     

     

     

    Je me suis tué un soir de septembre

    J'avais froid et je voulais danser avec toi sur les violons

    mais tu n'as pas tenu ta promesse

    Je suis monté seul dans l'avion vers le soleil couchant

    j'ai mis fin à ma vie passée en Occident

     

     

    J'ai voulu mourir à cette vie en résidence surveillée

    à cette vie où il fallait adorer les capitaines du vaisseau fantôme 

    et vénérer leur despotisme déguisé en immémoriale sagesse

     

    Fuir, fuir, mais où ?

    Je suis monté dans un avion qui m'appelait portes ouvertes sur la piste

    J'ai appuyé sur les boutons enchantés pour allumer le moteur

    et j'ai tiré sur  la poignée du décollage ,

    j'ai soulevé la vitre à côté de mon siège ...

    Et j'ai foncé vers le soleil couchant !

    L' air des hauteurs me nettoyait enfin des remugles de la ville ...

     

     

     

    Avant de partir   j'ai anéanti l'empereur de Chine

    sur les détritus de mon enfance .

    Les membres de ma tribu de singes m'appellaient Paul ou Poltron

    je ne sais pas si c'était pour  me retenir

    ou me pousser au meurtre qu'ils n'avaient pas le courage d'accomplir

    Il faut parfois la moitié d'un siècle pour démasquer les hypocrites ...

    Non , leur répondis je , je ne m'appelle pas Paul

    ne me provoquez pas davantage

    oui , je m'enfuis, je suis un escapiste ...

    Peut être  je reviendrai , mais pas pour parader dans les salons !

     

    Je me suis envolé vers le soleil couchant

    c'est comme cela que je me suis tué , en y plongeant

    Mes ancêtres regardaient cela de leur planète obscurcie de nuages 

    et ont crié : regardez, il est devenu transparent !

    mais qu'auraient ils donc pu voir, qu'auraient ils plus entendre ?

    Ma musique n'était plus conçue pour exalter leurs nostalgies

    Ils n'y retrouveraient plus jamais leur piment

    alors leur langue resterait morte d'être entêtée dans ses aveuglements

    Ils diront que j'ai perdu tous mes élans, ils penseront seulement

    que je me suis tué un soir de septembre !

     

    Mon ami Jean Noël  qui jouait de la guitare  

    accusait  les survivants  d'avoir voulu voler mon âme

    en l'enchaînant, en la défigurant, en la déguisant, en la manipulant ...

    Et d'autres concluaient que j'avais eu un égo géant

    Mes tribulations étaient comme des impasses inventées

    pour retenir l'attention des égarés

    ceux qui comme moi pour plonger en eux mêmes

    ont préférer aller découvrir ailleurs ...

     

    Au premier rang des flatteurs il y avait cette femme

    exaltée de clamer qu'elle m'accompagnerait jusqu'au bout du monde

    mais elle n'est pas même venue danser sur les violons tziganes !

    Tout ce qui l'intéressait c'était de s'enivrer

    et de capituler devant les projecteurs de la mondanité

    tout en se donnant des airs de rebelle fidèle ...

     

    J'étais une ombre qui  cherchait la réalité 

    dans l'offrande de son esprit, de son coeur, 

    de ses seins, et de sa vulve entre ses jambes ...

    Je n'étais pas encore né , j'attendais cet évènement de ses baisers

    mais elle m'aimait ombre parmi les ombres

    et non pas pour construire au moins à nous deux un meilleur monde ...

     

    Et maintenant je ne me souviens ni de son visage ni de son nom

    Peut être s'agissait il de cette fille d'armateur richissime

    à qui j'ai fait rêvé d'une vie sur les cimes ...

    En fait elle me voulait comme un caniche dans son salon

    qu'on retient pour toujours en lui mettant  des loukoums  dans la bouche ...

     

    Ah non je n'agoniserai pas en me tuant,

    je m'en irai joyeux, loin des voraces  voraces ...

    Je ne suis plus l'enfant d'une famille , d'une nation,

    ni l'amant d'une traîtresse ...

    L'urgence c'est seulement que je disparaisse

    Les trônes de vanité sont enduits de glu

    qui brûle la peau des fesses !

     

    Je me suis tué un soir de septembre 

    Et c'est comme cela que je suis devenu vivant

    car le soleil couchant où je me suis immolé

    était déjà soleil levant pour une autre face de la planète !

     

    J'ai seulement disparu du regard

    des despotes d'Orient et d'Occident ...

    Pour m'enfuir alors qu'ils pensaient me couper en deux 

    le bibliothécaire avait commandé sur ma suggestion

    un attirail de prestidigitateur amateur ...

    Néammoins  il ne pouvait agir que sur les apparences

    ce n'était pas la magie de la mort et de la nouvelle naissance  .

     

    Maintenant voilà que j'ai pris refuge  dans un corps illuminé

    Celui qui danse en moi est esprit, personne ne pourra le tuer

    Je me suis laissé habité par la féérie des bienveillants célestes

    J'ai appris l'invisibilité pour déjouer la hargne des robots animaux

    Les  arbres m'ont confié leur secret de jouvence, surtout le cocotier

    lui qui bande vers le soleil sans jamais se lasser

    et qui donne son eau  immaculée et puissante

    avec une foule de mamelles toujours renouvellées !

     

    O toi qui m'entends , ne capitule pas !

    lève toi et danse et chante !

    Et même immobile, en méditation en silence

     fais reculer la hiérarchie  qui ensemence les   offenses !

     

    *

    Sauf celle où je suis à côté du Cessna , les photographies publiées ci dessous ont été prises par moi même par la fenêtre de ce petit avion, par lequel un ami de Moorea m'emmenait le matin  travailler à Tahiti, et me ramenait ,  dans les années 90.

     

    *

    opus 586 : POEME D'UNE VIE ANTERIEURE

     

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    opus 586 : POEME D'UNE VIE ANTERIEURE

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    opus 586 : POEME D'UNE VIE ANTERIEURE

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    opus 586 : POEME D'UNE VIE ANTERIEURE

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    opus 586 : POEME D'UNE VIE ANTERIEURE

     

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    opus 586 : POEME D'UNE VIE ANTERIEURE

     

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    opus 586 : POEME D'UNE VIE ANTERIEURE

     

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  • Ce poème a d'abord été publié dans "Poésie 65 " puis dans "Stéréophonies" chez Seghers , puis dans "Provence Magazine" ( scan ci dessous , et il y a aussi  des photos de Dom Dom , d'abord avant mes publications dans l'immeuble ou je vivais, puis aux Vallon des Auffes , par Robert Doisneau)

     

    AILES FOLLES

     

    *

     

    AILES FOLLES

     

    *

    version 1

     

     

    AILES FOLLES

     

    *

     

    version 2

     

    Lorsqu' à Marseille j' étais un encore un gamin 

    inscrit  au Lycée Saint Charles

    sur la colline alors couverte d'herbes 

    sauvages au dessus des trains 

    je partais presque chaque matin avec entrain

    cheminer par la rue Guibal puis le  boulevard  National ...

    au coin des deux il y avait  des feux  

    pour régler la circulation.

     

    Le vert signifiait aux automobiles qu'elles pouvaient circuler

    Le rouge, c'était pour les arrêter

    et que les piétons puissent traverser la rue

    et le feu orange,

    c'était pour se préparer à un changement de directive.

     

    Comme depuis tres longtemps je vis comme un ermite

    j'ignore si ce dispositif automatique existe encore

    en tous cas je l'ai expliqué aux éventuels extraterrestres

    qui  dans des années-lumiere  trouveraient interessant d'étudier

    les moeurs des fourmis humaines vivant jadis dans les cités.

     

    Parfois je stationnais là  près des feux l'air de rien 

    juste pour attendre    le passage  tellement désiré 

    de Mireille qui elle aussi allait au Lycée par ce trajet

    Je pouvais alors lui parler un peu , si le feu était au vert

    mais ensuite elle se hâtait de passer devant moi

    il fallait s'engouffrer dans un tunnel creusé  sous la gare

    et sauf à l'entrée où s'abritaient quelque clochards

    le trottoir devenait tres étroit

     

    La fumée devenait  si épaisse qu'on ne voyait même pas 

    la lumière  de la sortie de l'autre côté dans le matin 

    ce n'est que plus tard que le maire Gaston Defferre

    Fit percer une grande bouche d'aération dans le plafond 

    entre les aiguillages

     

     

     

    Alors  je me contentais  de suivre Mireille de près 

    Elle avait de très longs cheveux chatains

    qui brillaient sous les rares lampes jaunes

    cela me faissait la trouver belle

    sans doute parce qu'étais puceau

    car en fait elle n'était qu'une sorte de poupon maigrelet

    avec dans les yeux l'âge et l'intelligence

    de ses plus anciens ancêtres préhistoriques

     

    Néammoins  la frustration juvénile

    nous installe sur des radeaux de naufragés sans cesse multipliés ...

    N'importe quel rivage ou rencontre

    sont alors vécus comme une chance !

    Mais au fond aujourd'hui Mireille ne me me ferait aucun effet

    Lorsque je lui offrais un poème, elle était

    tellement bête qu'elle ricanait

    bref elle avait intérêt à ce que je ne la connaisse pas de trop près ...

    Comme sa bonté son lait était déjà tari  sous ses habits épais

     

    Mais dans mes rêves je pouvais l'idéaliser

    Jusqu'à ce  qu'elle se mit à m'appeler  Sécotine pour me dire bonjour

    du nom d'une colle forte dont on a du mal à se nettoyer le doigt ...

    La courtiser  c'était consentir à descendre les escaliers  ...

    Par contre un autre  jour, plus loin

    une charmante pute  m'invita à les monter

    Elle semblait si gentille et savoureuse

    que je n'avais pas compris qu'il fallait payer

    elle n'avait pas de son côté compris

    que j'avais les poches complètement vides...

    Bref  j'ai redescendu les marches 4 à 4

    carrément soulagé mais inquiet

    de ne pas savoir à l'avance qui était prostitué.

    Beaucoup de monde, il est vrai.

     

    Heureusement par la suite ce sont les femmes 

     qui se mirent à me draguer , suite à mes passages à la télé

    et à m'offrir directement ce que Mireille m'avait toujours refusé ...

     

    Même pas un baiser dans l'obscurité du tunnel !

    C'est vrai qu'on n'aurait pas pu faire halte,

    on aurait empêcher de passer

    toute une foule de morts vivants marchant d'un pas mécanique

    vers la machine à décerveler installée par les exploiteurs 

    ceux qui ont hérité du monde chez le notaire...

     

    Mais quand même  à la sortie du tunnel on aurait pu s'embrasser 

    sous un platane. Les oiseaux , eux  ,  moins farouches 

    me parlaient avec leur musique  et tout autour de moi picoraient

    Mais là Mireille tout de suite  prenait le chemin du Lycée Longchamp

    dans la direction opposée à celle de mon Lycée

     

    Maintenant peut être elle est pensionnaire à l'hospice des vieux

    ou dans un appartement luxueux à s'en asphyxier

    et sans doute si elle me voit un jour sur l'écran de sa télé

    elle changera de chaîne pour ne pas s'ennuyer

     

    Mais à l'âge où j'étais écolier ,

     

    j'étais même amoureux des grenouilles !

    Dans un grand bocal, j'élevais  des têtards 

    trouvés dans un bassin, une piscine en forme de haricot

    abandonnée  sur le grand morne au dessus de la ville

    où jadis se baignaient  les cheminots mais aujourd'hui 

    presqu'envahie  de roseaux, avec une plage de boue presque  séchée

    et entourée d'herbes folles et de coquelicots

     

    Je  regardais mes têtards devenir peu à peu des grenouilles,

    d'abord seules les pattes de derrière apparaissaient

    pour elles j'avais  bricolé une petite échelle  

    avec des branchettes et des allumettes  

    qui avaient déjà flambé à leur extrémité

     

    Lorsque mes têtards devenaient de mini grenouilles

    je ne les nourrissais plus avec des miettes mais avec des mouches

    que j'emprisonnais dans de petites cages faites avec des aiguilles 

    et deux fines rondelles de bouchon. Pardonnez moi les mouches

    D'avoir été à votre égard totalitaire...

    Je ne sus que plus tard que les souffrances qu'on endure

    échappent à l'attention des singes à la fausse éducation.

     

     

    Ah mes grenouilles  je croyais vous aimer  

    en vous capturant avant que vous sachiez sauter

    Je vous imaginais  accueillir mes pleurs et mes baisers

     et j'aurai vraiment tout tenté en vain

    pour vous transformer en femmes !

    il fallait peut être vous accepter 

    comme vous m'apparaissiez ...

    Vous n'aviez pas peur de moi

    vous me donniez de grands espoirs 

    en l'humanité !

     

    Hélas le destin des têtards, des mouches et des humains 

    parut bientôt  scellé sur différents chemins

    quoique nous ayons en commun des pattes et des yeux

    un estomac un intestin

    et qu'à l'école on affirmait 

    que l'homme était la créature clairvoyante

    capable de gérer  cette planète en jardinier intelligent

    ce qui nous donnait le droit de nous emprisonner nous mêmes

    pour  nous prouver que nous étions civilisés !

     

    Alors ma chère grenouille à la beauté méconnue

    va  donc jouer aussi  en sautant sur sa tête

    avec Mireille l'écolière orgueilleuse et méprisante d'être adorée

    Sois ma messagère , apporte lui 

    quelques unes de mes larmes, 

    fais nous sourire émerveillés

     

    je suis sorti avec entrain de l'appartement familial

    car si c'est ça une famille, je voudrais fuir encore plus loin

     Ce matin les feux rouge vert orange sont en panne

    Il faut traverser la rue à nos risques et périls

    ce serait dangereux de se tenir par la main

    La ville et comme un cimetière avec des coupoles d'or

    où les bandits intégrés se préparent de somptueux cercueils

     

    Tu vois Mireille je t'ai attendu caché derrière un platane

    as tu vu que mon coeur est plein de couleurs 

    comme les plumes de l'ara du zoo et du perroquet ?

    Non je ne l'ai pas recopié dans un livre mon poème ...

    Ah bon, il n'a pas de sens ? t'as décroché avant de le finir ?

     

     

    Mais  de loin ne sens tu pas mes baisers courir sur ta peau

    pour nous guérir de ce monde de fous où l'on fut enfanté ?

    Quoi ? tu dis que c'est moi qui suis fou et que le monde est raisonnable

    il suffirait d'emprunter les chemins balisés

    à l'avance et d'être un enfant sage ...

    Oh non baisers revenez moi en dansant ,électrisés 

    Et laissez sur mon corps vos marques

    vos suçons comme des trophées

    faut il apprendre à aimer les coups de fouet

    n'y a -t-il que des bouches savantes pour humilier?

    Non , sois plutôt la première à me voir enchanteur ...

     

    On dirait que dans la nuit à peine éclairée

    de ce tunnel plein de fumée épaisse

    une fusée nous emporte sur une autre planète moins polluée

    Zut elle a explosé en vol mais dans cette

    pollution on peut quand même essayer

    de ressusciter au milieu des feux d'artifice ...

    Est ce que tes yeux tes cils sont vraiment le trésor dont j'ai rêvé ?

     

    Pourquoi les voitures ont allumé leurs phares en klaxonnant ?

    est ce pour crier mon grand désespoir, mon manque en ta présence ?

    afin qu'il t'enveloppe comme des lianes grimpantes

    et que nous apprenions à nous consoler, c'est si simple, 

    même du bout des lèvres, vais je m'empoisonner ?

    c'est toi qui craint ça ? Mais j'ai brossé mes dents ,  

    je suis derrière toi sur mon radeau

    chaque jour différent à la dérive ...

    Et toi ne serais tu pas également naufragée ?

     

    Non ;aucune plante ne parvient à croitre sur le macadam, 

    Ni le béton noir de suie comme nos poumons en ces temps

     

    Heureusement que  j'ai appris à habiter d'abord mes rêves

    alors je ris d'imaginer qu'on se réveille toi et moi

     ensemble  dans une cabane avec juste des habits de feuillages

    en haut d'un platane au milieu des oiseaux , des chenilles , des papillons

     

    Par ailleurs  sais tu qu'en passant sous cette lampe jaune grillagée

    mon ombre est tout de même parvenue à te caresser

    Qui ne dit mot consent , bon je suis rassuré

    je suis maintenant assis sur le cerf volant 

    de tes cheveux brillants  qui tombent presque jusqu'aux fesses 

    comme des feuilles encore vivantes de sève et parfumées

     

    Oui je ris même à retardement 48 ans et demi   apres

    Je ris de ma naïveté et de ta danse même pas esquissée

     danse des 7 et  milliards de voiles

    même  quand la bête est dénudée

     car ne n'était qu'en enfer qu'on pouvait se rencontrer

    nous ne suivions pas le même chemin malgré les apparences

     

    ah oui aujourd'hui tu m'as fait bien rigoler

    sois en remerciée pauvre âme errante, espèce de bêcheuse

    heureusement que pour toujours après toi j'ai renoncé à draguer

    car c'est moi le tapis enchanté qui pouvait te faire voyager

    même assigné à résidence par les éleveurs d'enfants

    qui ont déjà programmé le sort des vieillards poignardés ...

     

     

     

     

    http://ekladata.com/mQXAeCn2mz-_hhlk9gqVOmxJRrs.jpg http://ekladata.com/R7lP1JnDF4C2p3KaNy7hJavIuFU.jpg


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  • Ce poème est issu de deux autres poèmes plus anciens publiés dans la Dépêche de Tahiti en 1991. La troisième version fut publiée le  mardi 9 août 2011dans les articles de la page FaceBook "Dominique Oriata Tron" . La présente version est à peine modifiée. La scène  de l'écoute du soleil était originellement située lors d'une éclipse à Tahiti, j'y ai assisté dans la cour du Lycée où je travaillais . Ensuite je l'ai visualisée à Formentera au bord de la mer Méditerrannée où je venais souvent seul ou avec Flavia, lorsque j'étais avec elle, j'y passais des journées entières, je lui faisais faire la méditation des couleurs apres une séances d'asanas  à la façon qu'elle enseignait. Il y avait des matelas d'algues qui , recouverts d'un simple paréo, rendaient ensuite  confortable le fait de faire l'amour à l'ombre plutôt que sur les rochers. Devant , il y avait une petite plage de sable rose. L'hiver suivant une grosse tempête enleva les algue et le sable  L'opus 125 ci dessous évoque ce lieu, vu de l'intérieur de la caverne , tandis que l'opus   décrit le petit cap juste à côté, vu de la mer, puis les rapporta, autrement. La première fois où nous abordâmes à ce lieu , ce fut à la nage, à partir de l'autre côté de l'anse . En remontant la falaise il fut ainsi plus facile de trouver un chemin d'accès , notamment de savoir par où nous allions descendre la falaise les fois suivantes

    D.O.TRON- opus 125 : te one e te ra i te otue o Berberia - sand and Sun at the Berberia Cape - sable et soleil au cap de Berbéria, île Formentera

    opus 490 : LA LOGIQUE DU SOLEIL ET DE L ' ILLUMINE

    op 32- TE TAERA'A MAI O TE RA I ROTO TE MATA, acrylique sur bois, 60 x 40

    Té taéra'a maï o té ra- i roto te mata.L'arrivée du soleil dans mes yeux, mon visage. Comme en indonésien, le mot mata veut dire les yeux. En tahitien, le singulier suffit pour les deux yeux et même le visage. Ce tableau, sitôt fini, a été acheté par un américain du Sud, m'a dit le copain qui l'exposait.

     

    opus 490 : LA LOGIQUE DU SOLEIL ET DE L ' ILLUMINE

     

    *

    version 4

    J'avais dormi à l'orée de la grotte en bas de la falaise.

    Là je ne sentais plus le passage même muet des ondes de la télé

    ni des prédateurs humains acharnés à programmer mes pas

    seulement les cris des gaviotas, espèce de goelands ou de mouettes

    Qui tournoyaient dans les parages  de  leurs nids cachés sur les pentes

     

    Et comme le soleil se levait

    J 'ai cru l'entendre proclamer :

     

     

    " Ici le président  de l'union des  créatures libres ...

    (enfin, relativement libres, libres dans leurs esprits ...)

    Ne vous inquiétez pas

    peuples de tortues

    peuples d'abeilles

    peuples de pingouins

    et de manchots

    peuples d'araignées

    peuples de panthères et de requins !

     

     

    Vous savez bien que je n'ai pas l'intention

    d'imposer mon gouvernement à vos indépendances fictives

    ... déjà vous ne pouvez vous passer de moi ...

     

     

    mais je n'ai pas l'impression que vos caprices de nations 

    vous garantissent la félicité...

    Vous avez peur d'être victorieux par la Lumière 

    mais vous ne craignez pas d'être vaincus par les ténèbres ...

     

     

    Vous vous barricadez à l'intérieur de vos frontières

    mais l'Empire  sans frontières vous parque comme du bétail !

    Vous imaginez qu'il vous défend contre l'axe du mal ...

    Or il en a besoin pour nourrir vos inquiétudes

    et vous faire oublier qu'en fait votre planète 

    est toute enveloppée de mes rayons de vie

    et que c'est là qu'il faut poser vos questions

    sur le passé, le présent et le futur , et le sens de chaque acte...

     

     

    De savants singes me comparent , moi le Soleil

    à une perpétuelle explosion nucléaire ...

    Et toi DomDom, Oriata,  si on te coupe un bras , tu es encore en vie

    mais si je disparais , ton cerveau et ton coeur n'ont pas d'avenir ...

    Alors lance ta danse dans ma Conscience

    et ma Conscience habitera ta danse ,

    et elle fera scintiller sa trace dans les mémoires,

    celles qui tamisent le présent avec le sable du passé et les reflets de l'avenir ...

    Respire pour toujours en moi, mon souffle sera tien !

    Ca te soulagera de la malédiction de  la raison d 'Etat 

    des  porcheries associées ,des castes , des cris des abattoirs ...

     

     

     

    Nombreux sont les patentés du savoir et les inquisiteurs

    qui affirment que moi le soleil je ne suis que matière stupide

    mais que resterait-il de leurs lumineuses pensées si je m'éteignais  ?

    Vous pouvez tous me rencontrer car nous partageons une âme commune ...

    Elle danse  au plus profond de votre amour et de votre paix.

     

     

    ils sont victorieux  à chaque battement de leurs coeurs

    ceux qui ont soif  de véritable identité  humaine !

    Même s'ils n'y croient pas , s'ils en ont les vertus, ils agissent en Dieu !

    Appelons le Amour,  feu du Phénix cosmique !

    Patience, Courage, Bienveillance !

     

     

    Eh, vous ,qui avez soif de puissance  et de richesse

    n'y a-t-il pas plus d'énergie à puiser dans le ciel que sous la Terre ?

    Soyez donc des ouvriers de l'Harmonie

    et non des prédateurs , des sorciers, des spéculateurs

    prêts à tout vendre et à tout acheter, et nous persécuter ....

     

     

    Les maîtres de la Mort  cherchent en vain le contentement de la Vie

    Ils jouent aux grands seigneurs,en fait  ils sont les chefs bandits ...

    Ils se font craindre pour tenter de donner de la crédibilité à leurs ombres !

    Même en tuant ils ne pourront s'échapper de leur identité de zombies !

     

     

    L'eternité ne s'obtient que par la reddition totale

    Il faut des oreilles et des yeux  accueillants pour la descente du supramental

    L'amour gratuit est offert de toute parts

    A celui qui fait tinter sa Conscience dans ma Lumiere ! "

     

    wouah ,j'é kan mêm fé dé progré en dicté ...

    je blague, je ne vais pas prétendre que le Soleil m'a vraiment parlé

    En fait à sa manière il  a parlé à la cendre de mes os

    à chacun des pores de ma peau mais il ne parlait pas français

    mais plutôt le langage des couleurs où j'aime me nettoyer

     

    Bon cela ne fait aucun doute je suis un illuminé, 

    c'est à dire pour ceux qui ne croient qu'en l'obscurité

    un grand délirant qui ne se repose jamais 

    Pourtant la nuit je dors, même si ce n'est pas rentable

    Pour les vampires il n'y a pas de sommeil, time is money...

    Les faussaires  savent seulement que  dans la jungle il faut intimider

    Peu leur importe la lumiere au dessus de la forêt

    ce sont des poissons cannibales qui ont juste besoin de nous faire glisser dans leur marigot

     

    Les  prédateurs de leurs prochains et des bêtes réconciliées avec les humains

    sont déjà damnés au jour le jour par les flammes de leurs convoitise.

    Bien sûr ils nous harcèlent de leurs foudres d'injustice

    et nous font passer pour des menteurs ,

    ils nous bombardent de mille façons , nous privent de visas sur notre Terre

    ils ont même une police de l'amour pour nier notre identité

    Et ceux qu'ils n'ont pas encore fait brûler dans leurs fours crématoires

    se disent que ceux qui souffrent l'ont sûrement mérité,et qu' ils exagèrent.

    Mais chacun son tour , les clapiers sont pleins.

     

    Ils appellent démocratie la chasse gardée des financiers illusionnistes, 

    Dans leur labyrinthe ils ont ricané sur les envols de la Conscience et sur ses utopies

    Leurs dieux ce sont leurs appétits, ils sont disciples de leur fatalité

    Ils tuent nos corps ou nos destins ici et là  à petit feu

    se disant qu'on ne croira jamais ceux qui se mouilleront  pour des minorités

     

    Alors nous avons pris refuge dans l'âme du monde

    car c'était de là que l'écho revenait

    avec le souvenir des trains qui avaient jadis déraillé

    et c'est nous qui allons petit à petit les dévaluer

     

     

     En tentant de nous emprisonner les fauves orgueilleux et sans pitié

    se sont enfermés dans les barbelés de leur tricherie !

    L'ascèse était le souterrain où ils ne pouvaient nous atteindre 

    L'amour était l'élixir de l'immortalité...

    et le soleil la porte du Graal qui  apaise les plaies.

    Leursmises en scènes religieuses étaient d'hypocrites  complots de mort-vivants !

    La peur qu'ils avaient semée les empêchait de guérir de leurs angoisses !

     

    Alors merci à ceux qui ont soif de véridique

    Et  multiplient l'écho et les reflets  de la logique du soleil

    Lui qui pense au delà du crâne des singes

    lui le premier illuminé mais ils sont des milliards dans le Ciel

     

    Mais pour la bête enfermée dans son miroir

    Chacun de nos pas est  un piège

     chaque offrande est une offense,

    et chaque parole un malentendu

     

    L'élan d'amour  se fane s'il n'est qu'humain

     

     

     

     

     

     

    *

     

    Commentaires de la version 3 :

     

    Patrick Quillier, Patricia Valdin et 2 autres personnes aiment ça.

     

     

     

    Epervier Bleu sublimissimeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeee!!!!!!!!!

     

    11 août 2011, 18:04 · J’aime

     

     

     

    Chantal Féedesroses Je suis aux anges en te lisant Dominique ! Merciiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiii ♥♥♥

     

    11 août 2011, 19:12 · 

     

     

     

    Epervier Bleu  :tes peintures sont vraiment magnifiques, j'aime beaucoup....

     

    11 août 2011, 22:59 · 

     

     

     

    Patricia Valdin  : Enfin un beau texte new âge ! Merci Dominique.

     

    28 août 2011, 19:54 · 

    *

    version 1

     

    opus 490 : LA LOGIQUE DU SOLEIL ET DE L ' ILLUMINE

    *

     

    version 2

     

    opus 490 : LA LOGIQUE DU SOLEIL ET DE L ' ILLUMINE

     

     

     


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  • opus 127

    D.O.Tron : opus 127 :  la cage des perruches ,version 2

    Ci dessous  photos des perruches , la volière a été construite derrière l'endroit où je  danse  , juste  après le bassin , c'est à  l'ermitage Abalyon ,sur l'île Formentera dont il y a aussi une photo que j'ai prise  par le hublot d'un avion . 

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    D.O.Tron : opus 127 :  la cage des perruches ,version 2

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    D.O.Tron : opus 127 :  la cage des perruches ,version 2

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    D.O.Tron : opus 127 :  la cage des perruches ,version 2

    .

     

    Je croyais être transparent comme le bleu du Ciel...

    Hélas il fallait tout prouver, tout prouver,

    tout prouver sauf l'essentiel, qui devait rester voilé 

    par les usurpateurs de la Beauté et de la Bonté,

    et finalement c'était le mensonge qui était autorisé

    du moins  au sommet de la hiérarchie des humains

    car les pins eux , offraient un refuge  

    même aux cigales  pour leurs études terrestres , en dépit de leurs tics

    et je n'étais plus un passager clandestin ...

     

    .

    .

     

    Il était tentant  d'imaginer le congossa  des perruches

    dans la volière quand elles caquetaient dans la volière  :

    "  Nos protecteurs humains  sont sûrement  des Dieux

    omniscients, omnipotents, omniprésents"

    L'orgueil de l'enfant est ingénu,

    le chat joue avec la souris, il la tourmente... 

    .

    Elles étaient belles les perruches 

    arrivées exténuées sur la falaise de l'île !

     

    Elles étaient arrivées seulement  deux ,

    l'une d'elle, la femelle, était blessée

    et semblait ne plus pouvoir prendre son envol .

    Elle  trottinait près du petit bassin de l'oasis .

    Le mâle traversait en volant  le bosquet à l'entour, en tous sens

    attendant que sa compagne retrouve des forces.

    .

    Mon ami andalou Antonio Marin, qui était venu sculpter là

    comprit qu'il fallait protéger la perruche blessée

    Il voulut construire  une cage où pouvait tenir six hommes et six femmes debout, les bras levés

    avec un toit transparent pour éviter la pluie

    et je l'aidais avec la tenaille à fixer le grillage aux barres de fer .

    .

    Au milieu de la volière fut planté un arbuste  , 

    avec des nids artificiels

    de bois au parfum de genièvre

    .

     

    Bientôt le mâle revint rejoindre sa bien aimée

    El la cage fut fermée.

    A travers le grillage tout autour coulaient des graines 

    que les oiseaux amoureux picoraient.

    C'est alors qu'ils se multiplièrent ...

    Elles étaient belles les perruches !

     

    Il y en avait des bleues et des dorées 

     

    des rouges et des grises !

     

    .

    Leurs enfants sortaient de leurs oeufs chacun à son tour

    puis un matin décisif ils se lançaient dans les airs

    se jetaient du haut des planchettes posées sur les branches 

    et parvenaient directement à voler

    sans parachute ni hélicoptère !

    Quel était donc leur secret

    comment avait-il pu à ce point pénétrer leur chair ?

    .

    Au bout d'un an, Antonio, dit Toni, décida de laisser ouverte la porte 

      par laquelle il passait pour entrer nettoyer la volière.

    La moitié des perruches décida de sortir,

    mais elles restèrent stationner à l'entour.

    Certaines étaient capturées et dévorées par des oiseaux rapaces de la forêt

    La cage se révélait abri.

    .

     

    Ainsi nos corps sont des refuges pour l'âme 

    sans cesse harassée par les vents forts de la confusion ...

    Dans l'Univers Divin, la liberté est tellement accessible

    que les rêves se déchaînent pour le meilleur et le pire

    et nous nous apaisons dans la distance de nos cages thoraciques

    afin de  mieux nous orienter le jour de la sortie

    et ne plus  sacraliser nos attentes

     vêtues d'habitudes mentales !

    nous apprenons à voler par le dedans   de la chance

    avec les ailes de l' Amour

    sans  maudire le jeu exigeant du déchiffrage.

     .

     

    Nous ne sommes pas omniscients, omnipotents, omniprésents

     Nous sommes calés dans nos limites et et nos estomacs

    mais la Lumière nous incite à des fusions  Divines

    et le savoir des couleurs déborde de nos mâchoires et de nos oreilles !

     

    .

    Là sont les espérances de nos révoltes

    Afin que soit reçu le supramental possible

    pour une évolution de l'espèce enfin créatrice 

    délivrée  des esclavages et des convoitises ...

    .

    La Lumière donne le choix de l'ombre ...

    Dans l'obscurité nous pouvons aussi nous égarer

    ou nous retrouver, renaître différents, et désirer la source !

    .

    D'abord élançons nous sans crainte vers le haut 

    mais pour trouver la direction il nous faut tâtonner

    et la vigilance est salutaire.

    .

    La mémoire de nos alliés balise aussi les chemins de l'air,

    chacun est une facette du diamant transparent

    où le regard pénètre les scintillements des arc-en-ciels intimes

    .

    .

    _____

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     D.O.Tron : opus 127 :  la cage des perruches ,version 2

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    D.O.Tron : opus 127 :  la cage des perruches ,version 2

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    D.O.Tron : opus 127 :  la cage des perruches ,version 2

     

     

     

     

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     Ci dessus : Toni dont il est question dans ce poème , Toni  qui  a été après moi  le conjoint de Christine  à partir de 2001 ,et qui est en train de sculpter , puis  debout bras ouvert sur un rocher 

     


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    Dominique Oriata TRON en 2012 

    opus 535 : L'ETUDE ET L'INQUIETUDE

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    .

    version 7

    .

     

     

    .

     

    Ayant perçu le rayonnement amoureux des étoiles 

    en chantant je gravis  les rayons noirs de la nuit !

     Même les lèvres closes mon chant me conduit au refuge

    où le tyran jamais ne parviendra

    lui qui préfère la souffrance à la mort de l'égo

    .

     

    La voix qui chante en moi est pétrie de silence

    et me dit que la mort n'existe pas

    .

    Sur ce rivage  immaculé d'enfance et de sable infini

    le tyran un empereur de Chine sans trône ni pays

    écoutait angoissé les mauvaises nouvelles

    à la radio, j'avais peur de le voir cracher du feu et hurler

    mais il se contenait hypnotisé et il  semblait se consumer

    .

    Dans le jardin des géraniums rodaient aussi

    des esprits volatils peut-être jeteurs de sorts

    au milieu des parfums lancés par les feuillages

    tout près de l'océan  tellement calme cette nuit là

    .

    Ecoute,  l'empereur, la sagesse n'est pas

    de résonner sans fin dans le cri des vampires ...

    Ils ne pourront jamais éteindre la lumière avec leurs crocs.

    Ils sont là certes pour piéger toutes les familles d'humains

    Alors tu dois savoir  : la misère difficile à soigner

    c'est l' obsession de régner pour toi seul sur la terre !

    Ta clairvoyance est seulement de la résignation

    .

    Entre dans la chanson qui te consolera 

    et t'aidera à voir en face ta souffrance

    et peut être qu'il sera vaincu le dragon cannibale ...

    Alors pour mieux l'abattre aime ta femme et ton enfant

    et sans ciller porte la croix de ta naissance jusqu'à l'étoile !

     

    Et là soulage toi  du poids de tes erreurs

    et des coups  encaissés et de tout  ton malheur ...

    Oh oui je sais tu n'as appris nulle part ce chemin là, 

    c'est pour cela que je chante en dépit des obstacles

    afin de les franchir et que l'écho de ma voix 

    fasse sonner  aux oreilles de  l'enfant tracassé par ta folie

     le jour d'  espoir et  de courage  !

     

    ;

     

    Bien sûr que l'être humain a des dents comme une bête

    Aussi pour ne pas avoir à imiter les salopards

    ouvre ton coeur et tes oreilles à la chanson 

    qui fraye  le sentier où tu te sauveras 

    par l'amour en dépit de tous malentendus !

    .

     

    Et  même abandonné de tous  avec ce chant tu trouveras 

    l'âme qui est Toi même et  te guidera  joyeusement vers le ciel !

    Faut il toute une vie pour comprendre l'enfance ?

    .

     

    Sonne, sonne , piano, et toi bats la mesure , enfant

    fais tinter le triangle argenté qui scintille et t'éveille !

    Il  te donne les armes  de ta délivrance 

    alors même que la horde des animaux 

    te menace même en rêve avec ses couteaux ...

    .

    Ah oui je veux jeter mon destin dans le feu

    et gravir en chantant l'échelle bleue du matin

    et toi Nanihi mon amour danse encore sur mon chant 

    afin de me donner la réplique  et la preuve 

    qu'il n'aura pas été dans cette vie un soliloque !

    .

    ___

    .

    .

     

     

     

    .

    AUTRES VERSIONS 

    .

    .

    Ce poème et ces images sont des réminiscences d'une scène à laquelle j'ai assisté dans mon enfance à Agadir en 1954 ou 1955 . Contrairement à la vision édénique de l'oiseau du paradis récurrente dans ma vie, il s'agit d'une sorte de cauchemar, probablement  éveillé, avec sur la véranda , ma mère Yvette posant sa jambe sur mon cheval de bois . Sa jambe en effet ne pouvait plus se plier suite à un accident de vélo. Mon père Ferdinand écoute la radio et  enfant je perçois son angoisse comme de la colère. Je suis rentré précipitamment du jardin sur la plage car j'ai cru sentir un mauvais esprit roder . C'est l'époque où ma mère me fait débuter en musique, mais lorsqu'on quitta le Maroc , Ferdinand voulut m'en interdire l'étude  que je ne repris  qu' adolescent  , après avoir quitté la maison de mes parents.  Je fournis  ci dessous diverses versions de cet opus, de la plus récente à la plus ancienne. Pour lire les notes de musique ci dessous, il faut savoir que le u indique le dièse. du = do #, les majuscules indiquent l'octave inférieure, et les notes  écrites plus petites  et plus haut indiquent l'octave supérieure. Adapter à la tessiture qu'on a plutôt que de se référer au la 440. On trouvera une explication plus complète de ma notation dans l'article "Méthode catalytique d'étude musicale" aux éditions A l'ECOUTE, hors commerce sur le net. 

    .

    version 6

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    version 5 :

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    version 4 :

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    version 2 :

     

     .

     

    Dominique Oriata Tron à Agadir à l'époque de  la scène évoquée par cet opus , en compagnie de ses grands parents Louis et Marie Rufine Cottalord : 

    opus 535 : L'ETUDE ET L'INQUIETUDE

    .

      Note de Dominique Oriata Tron : Le présent  blog  http://tron.eklablog.com/ est une  continuation du blog Editions A l'écoute,  arrivé à saturation vu qu'au delà de son remplissage actuel le site Blog4ever demande de payer, or je suis endetté à cause de problèmes administratifs artificiellement créés par des fonctionnaires  pour qui mes choix de vie menaceraient la civilisation des blancs , ou leurs privilèges. Donc désormais  j'archiverai sur http ://arevareva.eklablog.com    toutes sortes de textes que j'ai aimé lire , pour les relire, et je les effacerai  sur simple demande de l'auteur. Pour des explications détaillées  de ces problèmes voire des actions solidaires , consulter d'abord  les Editions à l'écoute , hors commerce, telles qu'elles ont rayonné de novembre 2012 à janvier 2013  http://oriata.blog4ever.com/blog/index-515069.html  Pour mon blog central   ART CATALYTIQUE, cliquer sur : http://tronoriatadominique.over-blog.com/ 

       

     

     

     

     

     

     


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     opus 1 : TE ARARA'A MĀTĀMUA, acrylique sur carton encadré , 66 x 50

     

     

     

     

    Cette année là nous avions pris le bateau à Casablanca

     Et lorsque nous sommes passés devant le rocher de Gibraltar

     ma mère Yvette me tendit ses jumelles  et me dit

     "Regarde les singes !"

     

     

     

    Puis nous sommes arrivés jusqu'à la maison de l'oncle Antoine

     au milieu de ses vignes , en Provence.

     

     

    Un matin, à l'étage .

     La fenêtre est largement ouverte ... 

     

     

    Près de mon lit se dresse un chevalet 

     avec une toile blanche sur son chassis.

     

     

     

    Les pinceaux  sont posés tout près .

     

     

    Peut-être aujourd'hui Antoine va se remettre à peindre

     après avoir encore contemplé la campagne 

     l'esprit dans le vide et dans la paix .

     

     

     

    A mon éveil

     un oiseau pénètre à toute allure dans la chambre...

     Il fonçe sur la surface blanche , 

     puis s'en écarte aussi vite, pour s'en retourner

     par la fenêtre...

     

     

     

    J'entends l'écho du glissement de l'air

     sur les plumes  colorées  lancées à toute allure

     

     

    Lorsqu'il a fait son virage j'ai cru voir son aile  traverser la toile

     Pourtant elle ne l'a pas déchirée.

     

     L'oiseau bariolé a fait demi tour 

     Il a plongé dehors vers le haut, très haut, très haut

     dans le ciel bleu de sa naissance !

     

     Les couleurs laissées par l'oiseau 

     rayonnent, palpitent sur la toile de lin

     se fixent

     puis s'effacent

     

     Par la fenêtre :  les collines du Lubéron, au loin.

     Et plus près, une rangée d'arbres fruitiers 

     à la limite des vignes ...

     Des orangers, des grenadiers et des figuiers,

     un cerisier

     

    je grimpe sur une grosse branche

     je cueille une cerise rouge.

     

     

    Maintenant tout ést silencieux

     Aucun bruit à  l'étage ni au rez de chaussée .

     

    Puis les cigales

     cricrissent

     

     

    Beaucoup, beaucoup, beaucoup plus tard 

     j'ai soupçonné ce souvenir

     d'avoir été un rêve et non une vision

     comme lorsqu'un oiseau se cogne à une vitre

     mais qu'est ce que cela change ?

     

     

     Ce matin là reste plutôt gravé dans ma mémoire 

     comme celui de l'Eveil !

     

     

     

     Eveil ,

      théâtre de Lumiere dans l'or de mon sommeil

     les yeux clos dans la paix des rayons du Soleil ...

     Une halte dans la marche forcée vers le néant 

     où nous orchestrent  en aveugle  

     les mâles dominants ,comme au zoo 

     chez les babouins !

     

    Eveil pour démentir  dans mon intimité

     La voie des  empereurs , le despotisme

     universel ou domestique, 

     sur le territoire minuscule ou immense

     de toute contrée!

     

     

    Oui 

     c'est là que mon âme a trouvé

     le réflexe instinctif  de l'éveil

     pour digérer le songe de l'incarnation

     le temps qu'elle allait durer ...

     

    Etre poète c'est se donner le souffle 

     de tout dire ,

      y compris l'ineffable bon ou mauvais

     sans crainte des primates mal intentionnés

     allergiques à la clarté

     comme à l'obscurité .

     

     

     

    Mon soliloque s'est ouvert en toute langue

    à l'instant propice à l'audace

    dans le consentement au dialogue.

     

      

    Avant de savoir si ta naissance

    est chance ou malchance

     enfant dépose le fardeau des générations 

     qui t'ont précédé, et l'autorité

     de leurs ventriloques toujours prêts

    à justifier leur règne empoisonné!

     

    Pèse le sens de tous les héritages

     il y a l'héritage des chaînes, et les sentiers de liberté.

     

    Je  n' hésiterai  plus  , avant de m'en aller   

     à mettre ma mémoire en partage

     

    Une foule de raisonnables patentés

    se donnent le relais pour se pavaner

    et du coup leur délire passe pour vrai,

    la loi de la jungle revue et corrigée pour te piéger !

     

     

    Attention, ton  dressage 

     n'a pour priorité que la gouvernance  

     du fermier sur le bétail ...

    On distribue encore des bibelots aux singes

    pour qu'ils consentent à l'esclavage

     

     

     

    Certes pour éviter les fauves il est parfois prudent

     de brouter derriere des fils barbelés .

     Le fermier est lui même un des acteurs de la basse cour

     mais s'il est cannibale

     vas tu dissuader  avec tes cornes 

     le berger qui te raconte son évasion ?

     

     

    Sur cette planète il y avait aussi

     ceux qui applaudissaient  à l'unisson 

     à la fois le sensé et l'insensé

     mais trouvaient finalement plus de sagesse

     dans la trahison  ...

     

     

     Êtres doubles , déchirés

     C'est à cause de vous que je dois mendier

     à moins qu'il soit davantage digne

     de vous cirer les souliers.

     

     

    Qui empêchera les déguisements

     de l'âme libre vendue aux démons ?

     Les humains rêvent de Dieu à leur image...

     

     

    D'autres ne voient dans le Soleil qui les tient debout

     qu'un gyroscope de feu 

     un objet ignorant 

     car eux seuls se sont qualifiés d' êtres pensants

     

     

    Eveil hors du cauchemar

     de la gloire et de l'exemple des titans  .

     

    Evade toi du rythme absurde

     de la peur minutieusement calculée 

     qui t'asservit à leurs chantages

     

     

    Selon ce que j'ai vu, les rituels de l'histoire 

     servaient le plus souvent à contrôler l'espace et le temps

     et les générations tournaient en rond dans des déserts stériles

     

    sans savoir se nourrir des arbres de cristal

    que des illuminés avaient fait croître !

     

    La confusion enchaîne le maître avec l' esclave.

     

      

    L'oiseau savant peut guérir ton attente et  te fortifier 

     Résiste aux illusions déguisées en fatalité

     Résiste à l'autohypnose des bêtes ensorcelées

     celles qui ont  bu le poison mélangé au lait

     Résiste  à qui a préparé cette mixture

    même si elle l'odeur de miel de l'hydromel.

     

     

    L 'oiseau Phénix  un jour m'a fait l'offrande

     de son identité transparente

     quelle que soit la forme aimable 

     que je lui créerai !

     

     

    L'empereur et sa concubine

     n'ont que des yeux , des oreilles d'animaux

      Ce qu'ils veulent perpétuer c'est leur espèce

     Ils brisent le miroir muet qui affiche  

     avec insolence leur orgueil.

     Ils ne voient pas digne d'hériter

     l'enfant au coeur tatoué de couleurs et de chansons

     

     Les sens humains sont limités

     Oiseau Phénix  tu es mon fils et et mon père...

     Seuls sont logiques Amour et  Liberté

     Mais pour les comprendre il faut l'humilité

     et la patience de les déchiffrer !

     

     La foudre était jadis tombée

     sur ce mas de Provence.

     Elle était entrée par une cheminée.

      

    Tante Léocadia avait roulé dans un tapis d'étincelles

     Le feu avec elle avait dégringolé l' escalier

     Sans la blesser

     

     

     

    La famille était incrédule  pour tout ce qu'elle n'avait pas vu ,

     par exemple   l'oiseau venu m'inspirer 

     Mais ce dont on est témoin , comment le nier ?

     L'éclair qui avait ailleurs tué

     on le respectait.

     

     

    Et moi  cet oiseau je l'ai vu même si c'était en rêve.

     Il m'a montré comment orienter le hiéroglyphe 

     de mon incarnation passagère

     afin qu'elle me soit plus légère.

     

     

     

    Aussi je dois, avant de retourner au Ciel

     armé du seul passeport

     de mon âme invisible aux contrôleurs inhumains, 

     je dois te tatouer lecteur de ces lueurs

     

     Attrape ce boomerang de lumière

     et fais passer.

     Chacun s'illumine dans le relais.

     

     

     j'accomplis ma tâche  pour que les vents me poussent

     ainsi qu' une antique montgolfière

     vers là où les malédictions

     ne pourront plus me souiller !

     

     

    Il fait chanter le temps  ce  travail

     de témoigner des bienfaits de l'éveil ,

     mais aussi 

     des crimes et mensonges

     presque parfaits .

     

     

    Ceux pour qui je ne suis pas un parasite à balayer,

     m'ont fait parfois  l'aumône sans même m'écouter 

     ainsi qu'à un mendiant qui délire

     devant la porte de leur église .

     

     

    Merci quand même, cela prouve au moins 

     Que  les perroquets ont un rôle à jouer

    tant qu'ils  ne se sentent pas menacés

    par le  Phénix, Quetzacoalt,

     e Simorgh, Taaroa, Hamsa ton propre souffle,

     

     

    Alors mon frère, ma soeur en humanité

    accueille le nouveau monde vivable

     épris d'air pur et de lecture

    loin de tout marchandage !

     

     

     

    Accueille moi un peu dans ton regard

     Es tu  si sûr de détenir toutes les clés

     pour ouvrir toutes les serrures ?

     Montre moi le chemin de ton rivage !

     

     

    Là où le phénix demeure ,

     nous serons tous  recompensés

     de nous oublier dans le partage

     de son écho, même fredonné

     

     

    Ceux qui s'en fichent peuvent bien ricaner

     de la veillée ...

    Il est essentiel de négocier des lois

    pour chasser le renard du poulailler

    il s'est clamé gardien, l'illusionniste

    A notre tour de l'escamoter.

     

     

    E te manurere o te Pārataito,

     Meho Nui Ha'atupua,

     'ua 'ite 'oe iā'u te ara o te arara'a :

     

    Parau mau ! 

     E'ita e mo'e iā'u 

     i tō 'oe mau 'ū pohe 'ore !

     

     

     

    Mého Nouï, Garouda, Bouroung Chandrawasih ,

      toi c'est mon moi pour me sortir de la noyade !

     

     

     Et ce qui est véridique aussi

     c'est le mauvais coeur qui inquiète 

     la chenille en gestation dans le cocon

     en dépit de la bonté inlassable 

     des couleurs de l'Eternité

     

     

     

    *

     

     

     

    TE ARARA'A MĀTĀMUA,

     

    opus 1 : acrylique sur carton encadré , 66 x 50

     

     

     

     

     

    Tel  est en effet  le titre inscrit au dos de ce tableau, avec la signature, car je ne signe jamais sur la face peinte, ce serait comme écraser une mouche sur une vitre en regardant un paysage . Les voyelles se prononçant différemment en tahitien, entendre  : Té arara'a ma+ta+mou'a , ce qui veut dire en français : l'éveil ancien, premier, du début..

     

     

     

     Lorsque j'étais enfant au Maroc, mes parents vinrent  une fois passer des vacances en Provence où étaient leurs familles, notamment dans la campagne de Pertuis (Vaucluse) où mon grand-oncle, Antoine Krébil, vivait avec tante Léo dans une maison entourée d'arbres fruitiers et de vignes. 

     

     

     

    Tout comme mon grand-père Louis Cottalord, tonton Antoine aimait peindre, en particulier les paysages de Provence. Et à l'étage, dans la petite chambre où je dormais seul, il y avait un chevalet avec une  grande  toile vierge, qui faisait face à une fenêtre ouverte. Cela faisait du temps que l'oncle n'avait pas touché aux pinceaux , il avait peut être laissé là ce matériel pour être tenté ...mais qu'ajouter à la beauté du paysage ? ou alors peindre est l'occasion d'aiguiser le regard ?

     

     

     

     Or un matin , en m'éveillant, je vis, à la vitesse de l'éclair, un oiseau multicolore qui se précipitait   par la fenêtre jusqu'à la toile, puis, sans ralentir , son parcours fit une boucle , et il repartit d'où il était venu. Ensuite, pendant quelques instants , subsista la trace multicolore de son passage sur la toile vierge, comme s'il s'agissait de son sang, de sa chair, de sa vitesse.

     

      

     

     Trace indélibile dans ma mémoire , rayonnant un message d' éternité, et je peux m'imaginer chevaucher son double astral pour accompagner cet oiseau là au dessus de la campagne. Mais  à force  pédagogue, il semble que les graines  de  l'Eveil ne prennent qu'un temps  sur cette Terre. C''est peut être l'indication d'une étape ultérieure où soit durable l'éveil à la conscience cosmique , par libre choix .  

     

     

     

    C'est que les mots ne suffisent pas. Tout le monde veut renaître Phénix, mais il y a les flammes purificatrices et celles de l'enfer, et à force de mélanger les ambitions contradictoires, on se retrouve au pays des iwawas, des zombis, des tupapau , prononcer toupapaw ... il y a un sens aux actes et aux choses en deçà et au delà des mots. Je  suggererai que ce soit cela leur sphotas, même si je ne suis pas sûr que c'est ce dont veut parler   Daumal, dans Bharata, quand il évoque  le sens dénominateur commun à un mot et à sa traduction .

     

     

     

      " Une langue inconnue parle en nous, et nous mêmes nous en sommes des mots, détournés du réel" écrivait Pessoa, traduit par Quillier . Sans le sens métaphysique des formes  d'esprit et de matière où s'engendrent les créatures ou les objets , pauvres sont les mots, juste utiles à jouer avec  l'anxiété de survie de la bête. "

     

     

     

    Avec l'âge ,je me suis dit que ce qui m'était arrivé avec cette première vision de l'oiseau bariolé, ce n'était peut être pas une vision reçue au moment où j'avais ouvert les yeux, mais un rêve. J'avais peut-être dormi jusqu'à ce que les rayons du soleil viennent colorer mes paupières closes. Mais qu'importe, même aujourd'hui, en repensant à ce moment crucial de mon existence , j'en ai un souvenir comme d'un fait plus réel que tout ce que je vivais alors.

     

     

     

    Mon frère Freddy n'était alors pas encore né . L''ambiance familiale au Maroc avait tendance à se limiter, depuis quelques années aux mines renfrognées et aux coups de gueule d'un père que je percevais comme un despote. Dans mes poèmes adolescents je l'appelais "l' Empereur de Chine", puisqu'en dépit  du dernier empereur devenu jardinier, c'était en principe contre le despotisme qu'on faisait des révolutions . A moins que le despote , le fauve prédateur ne soit en chacun une option actualisable, pour prendre le relais des potentats.

     

     

     

     Ferdinand pourtant avait souffert du pétainisme,radié de son emploi de dessinateur parce que né étranger,  mais voilà, ayant peu connu la tendresse de ses propres parents harassés par la vie, il ne savait pas rayonner l'amour. Seulement une angoisse déguisée de certitudes sur ce qui était réaliste dans la vie, et pour le chien de garde c'est la voix de son maître qui est l'exemple absolu, quand on a  trouvé un peu de répit dans une niche . 

     

     

     

    Et voila que par ce rêve, le visage baigné par le soleil dans mon petit lit, s'était révélée une Réalité tellement plus consistante que je n'allais plus laisser ma mémoire s'en éloigner. On pouvait bien tout tenter pour décourager ma vocation d'artiste , je ne voyais pas de quelle félicité jouissaient les esclaves et même les maîtres et leurs portées.

     

     

     

    Lorsque j'ai peint ce tableau, je m'étais représenté comme un être asexué, puis ensuite j'ai voulu représenter une femme , comme pour inciter l'oiseau à visiter ma compagne . Je  vivais alors avec Christine , et j'ai toujours souhaité ardemment partager mes inspirations avec les femmes que j'ai aimées.

     

     

     

    Au fond le monde entier pouvait m'ignorer, pourvu que ma compagne soit capable de tout partager, même ce regard qui me traversait. Excessif , naïf, utopique , tyrannique ? C'est à voir  ... Ce fut en tous cas  une des obsessions fertiles  de ma vie dans cette incarnation, et l'oiseau exorciseur, symbole de Délivrance , me paraissait davantage digne de fidélité que les charmes de la sensualité, si je devais les payer par l'enlisement de mon espace, de mon temps et de ma créativité  ...

     

     

     

     Je pense que l'on est sur terre pour se créer, mais librement car le monde ne peut accéder au  Divin avec une conscience de machine. D'où probablement la clé de l'énigme du mal. C'est librement que l'on peut réaliser l'Union Cosmique.

     

     

     

    Plus tard sur cette image  j'ai ajouté la fleur du sexe d'homme , comme si finalement je devais assumer que ce souvenir c'était seulement mon histoire . Rêve possible à partager, mais mettre le haut idéal dans les désirs de la chair, c'est un paradoxe que seul l'exemple peut inciter à pratiquer, comme une clé de l'évolution, la pénétration de l'esprit dans la matière. ... 

     

     

     

    Ce tableau fut acheté dans une galerie de l'île de Formentera ,je l'avais encadré moi même , une fois le carton de marque Canson posé sur une pièce de contreplaqué de sa taille . On remarquera  que la toile  représentée dans le tableau ressemble à une deuxieme fenêtre à côté  de la fenêtre, quoique  dans mon souvenir elle lui faisait face.

     

     

     

    Le lit semble suspendu dans le ciel bleu où poudroient  des éclats de couleur. La blancheur de la toile , la nudité   et les pentes de verdure suggèrent des parcours possibles . Tant l'éveil est va  plus facilement se proposer  dans une vie  vierge de souillures choisies . Si la conscience et ses sens vassaux sont réceptiifs  et l'art catalytique du supramental divin n'ensemence pas sur du macadam  mais il faut aussi notre volonté . Jadis ,les religions se bâtissaient à travers des poèmes  et des visions sacralisées par le consensus social. La peinture était là pour illustrer les textes. Ici ce sont les mots qui sont des outils , comme les couleurs, pour que l'éveil silencieux ou chantant soit trouvé.

     

     

     

    Cet oiseau, symbole de la bienveillance cosmique des astres,  devint  le repère central de la mythologie instinctive où ma vie a trouvé son sens , son épanouissement , je n'ai pas fait  de son image une icône pour un culte, et je conçois que chaque regard rêve autrement de cet oiseau ou d'un autre symbole, chaque vie est une équation à résoudre.

     

     

     

    Quoique sous de multiples formes, l'Oiseau venu du paradis a commencé  alors à me nourrir d'un rayonnement qui longtemps après m'a paru émaner du supramental Divin , mais perçu selon les limites des organes sensoriels et de la réceptivité psychique du petit singe français que j'étais ,né dans l'Atlas Marocain .

     

     

     

    Ce sont les oiseaux des Galapagos, qui ne craignaient pas l'homme, et Christian Zuber avait des films pour le prouver, qui m'aimantèrent lorzsque j'avais 12 ans vers  une vie dans le Pacifique . Mais je n' y arrivais que bien  plus tard .Dans la cosmologie tahitienne ,Taaroa est  l'oiseau né de l'oeuf du  monde  . Il  laisse tomber quelques unes de ses plumes pour qu'elles se plantent et deviennent des arbres . Dans un autre de mes tableaux, ce moi qui s'est pris pour Taaroa  a semé des arbres-guitares .

     

     

     

      Peu avant la vision de Pertuis  il y a eu deux   deux autres iscènes fondatrices de mon cheminement sur cette planète  , toutes deux à Agadir. L'une est infernale , c'est la vision de mon père les yeux exorbités écoutant la radio pendant que je suis près de ma mere, dans l'ombre de la véranda , une de ses jambes posée sur un petit cheval de bois . La baie vitrée de la véranda est ouverte sur la nuit et le jardin. Je frissonne apeuré d'imaginer des fantômes, des diables, comme s'ils me narguaient. 

     

     

     

     L'autre vision , sur la plage très déserte au delà de la ville où était notre maison, est celle d'une très jeune femme noire sortant de la mer, avec un pendentif en or scintillant entre ses seins mouillés .

     

     

     

     En fait, pendant longtemps je n'ai accordé aucun sens à ce rêve éveillé de l'oiseau merveilleux . Puis, un jour, à Nice,  je fus ébloui de retrouver cet oiseau, sous une forme différente , comme pour fournir une signification supplémentaire . Il s'élançait d' un arbre sur une miniature arabe  ornant  un mur chez Jean Pierre Boursier Mougenot , dont les grandes sculptures étaient incrustées de bouts de miroir .

     

     

     

    Et  vers 1970, dans la série de mes  Pictographies,  c'est encore cet oiseau qui me délivre de la caverne de chair ancestrale  . Voir l'opus 463 , qui se trouve dans ces albums :  https://www.facebook.com/pages/FONDATION-ABALYON/168165169931580?sk=photos_albums .J'avais imaginé   l'édition  de ces Pictographies sous forme d' un livre rouleau où les symboles suffiraient au récit ...

     

     

     

    Plus tard,  de mon deuxième séjour à Bali en 1974, j'avais également suspendu au dessus de l'entrée de  la chambre où je dormais  un dessin en couleur de cet oiseau que j'appelais Amour, à côté d'une cage. Je  prévenais  que dans la cage on ne pouvait apprendre le secret de son vol. 

     

     

     

    La même année  ,  alors que je cheminais dans un torrent au fond d'un précipice, pres du village de Batuan,  l'oiseau du paradis  vint m'éveiller de façon encore plus explicite . C'est le thème de l'opus 14 qui se trouve également dans ces albums : https://www.facebook.com/pages/FONDATION-ABALYON/168165169931580?sk=photos_albums

     

     

     

    C'était semble-t-il vers midi, car j'étais entouré d'eau mais aussi de Lumiere, et le soleil doit être au zénith pour pénétrer dans la gorges profonde creusées par la rivière, où je me trouvais. j'en ai parlé dans plusieurs textes déjà , c'est vrai que je ne me lasse jamais  de revivre ces moments ... Comme il est bon de se répéter quand c'est pour partager  l'éblouissement  dont me gratifia cet oiseau, qu'on peut qualifier d'imaginaire, cela ne le dérange pas !

     

     Etrangement la nuit du deces de mon pere, la salle de l'hopital où il respirait encore  se transforma soudain , comme une projection astrale plus forte que le constat de mes yeux physiques, en une sorte d'hologramme réactualisant la scène où j'avais entendu le cri de l'oiseau du Paradis à Bali. Les cascades de  Batuan semblaient répandre leur fraicheur jusqu'à  la conscience de Ferdinand et 'en approchant de son dernier souffle , il semblait être devenu un  un peu réceptif , impression tout à fait subjective... et en contraste avec  ses dernieres paroles, lorsque je le soutenais pour le conduire vers l'ambulance qu'avait appellé Freddy, et que je lui disais " respire à fond, cela va te donner des forces", il avait répondu : " Ca , c'est de la fumisterie :"

     

     

     

     

     

    Ci dessous on trouvera aussi  une photographie du petit Domdom dans un arbre , prise à Pertuis à l'âge de la vision inaugurale, ainsi qu'un autoportrait peint à l'huile  par l'oncle Antoine , et un portrait  de Léocadia son épouse , coloré par le photographe, son époux semble-t-il , peut être avec  l'appareil de Louis Cottalord, mon grand père.

     

     

     

    Louis Cottalord officia longtemps  avec un gros appareil de photo, de la taille d'une petite caisse de bois , la couleur était quelque chose entre l'ocre et le jaune  , avec des stries marron, le tout vernis , et là dedans il enfilait des plaques de la taille d'un livre et couvrait sa tête avec un tissu noir, pour éviter que la lumière ne s'imprime trop tôt   .

     

     

     

      Je dois préciser que  l'oiseau de Paradis s'écrit Burung Candrawasih en bahasa Indonesia, même si dans une strophe en français j'ai préféré écrire Bouroung pour restituer un peu la prononciation . Et  si le poème avait été en anglais, j'aurais écrit  Garuda, plutôt que Garouda .  Garuda,  la monture de  Vishnou que l'éléphant appelle à son secours quand il est attaqué par le crocodile ...

     

     

     

    Quelques vers du poème me sont venus en tahitien. En reo maohi, le u se prononce ou, le e = é, ai = aï,  le h est audible ,  le tiret sur les voyelles les allonge, on roule les r  et le ' est le coup de glotte . Je reproduis ici ces vers  , et donne leur équivalent en français :

     

     

     

    E te manurere o te Pārataito,

     

    Meho Nui Ha'atupua,

     

    'ua 'ite 'oe iā'u te ara o te arara'a :

     

     

     

    Parau mau ! 

     

    E'ita e mo'e iā'u 

     

     i tō 'oe mau 'ū pohe 'ore !

     

     

     

    O toi l'oiseau du Paradis

     

    le grand Discret exorciseur

     

    tu m'as montré le chemin de l'éveil !

     

     

     

    Parole véridique !

     

    Impossible de perdre la  mémoire

     

    de tes couleurs sans mort !

     

     

     

     

    *

     

    Voilà  quoi je ressemblais à l'époque de la vision inaugurale  , à Pertuis :

     

    L'EVEIL INAUGURAL

     

    *

    l'oncle Antoine Krébil, par lui même , peinture à l'huile :

     

     

     

    *

    la tante  Léocadia :

     

     

     *

     

     


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