• Rumination du 22 Novembre 2015

    Aux temps de mon adolescence il y a cinquante ans 

    j'ai  cru  aux  midinettes prétendant vivre en poésie 

    c'est ce qu'elles proclamaient à leurs dragueurs ou pour draguer, 

    quoique dans les faits cela se révèlait uniquement ostentatoire ...

     Mais scintillaient les proclamations d'amour pour une vie plus vraie

    mème s'il n'y avait d'enthousiasme pour la réputation, sans changer de moeurs.

     

    Puis j'ai vu que faisaient illusion de prétendus yogas démagogues

    mais je ne perdais  pas l'espérance que l'apparence puisse aimanter  au véridique.

    Je me compromettais  avec des créatures exaltées par ma jeunesse  masculine .

    et pris aux pièges  je tentais d'exister par la morsure de rêves confus

    qui m'accordaient une distance glorieuse  avec l' angoisse

    d'être né parmi les zombis condamnés par leurs propres orchestrations. 

     

    Je me travestissais , pour m'adapter aux mondanités de la survie

    Pour moi c'était un carnaval dont il valait mieux rire que pleurer

    Le sens de mes mots était difficile à percer pour les inquisiteurs

    Je m'incarnais plutôt dans le réflexe de dévaluer ces prédateurs.

    Au fond , je cherchais les moyens de m'évader du labyrinthe de naissance

    et   cette obscure aspiration de tant de galériens  me transforma

    en une sorte d'holograme plébiscité de la révolte aveugle de mes clones...

     

    Enfin je vis que les ennemis de la félicité campaient en moi 

    depuis des générations, et pour ne pas pleurer davantage

    Je me suis défendu contre eux par des couleurs toujours plus intenses

     

    Aux temps de mon adolescence un soir à Paris,en 1967, à un étage du Quartier Latin

    Jacques Brosse s'annonça  à la porte de l'atelier du peintre Bernard Kagane

    et nous parla d'abord d'Henri Michaux, qui ne sortait  en ville disait il

     que pour des séances de théàtre oriental, et il parla aussi 

    de Simonne Jacquemard  qu'il allait me faire connaître et vivait loin de la ville

    entourée d'oiseaux, de bêtes et de plantes. 

     

     Puis Bernard qui peignait seulement des corps vêtus de cuir

    suspendus de plein grès à des crochets, comme pour

    tatouer de joie apparente la souffrance du monde ,

    Bernard  m'offrit de gober une miette de buvard 

    imbibée d'acide lysergique, puis sortit un carton  de grande taille 

    qu'il appelait ouija, où étaient dessinnées  en gros , dans des  demi cercles

    les lettres majuscules de l'alphabet. 

     

    Chacun de nous deux devait poser sa main 

    sur le même verre retourné au milieu du carton, ce que nous fîmes .

    Puis sans y poser les yeux on laissa  le verre glisser vers les lettres une à une.

    Un autre ami, Christian Maurel , était là pour noter les phrases obtenues

    c'était une façon , disait Bernard de faire parler des esprits ...

     

    Et je me souviens que lors de  ce wi-ja en 1967, Bernard me raconta

    qu'il avait interrogé quelques semaines auparavant un esprit de cette façon 

    avec un ami à Bora Bora, et les réponses étaient venues

    en tahitien, langue que ne parlaient ni lui ni son partenaire de wi-ja sur cette île 

    il avait fallu  trouver pour traduire une tierce personne.

     

     Quant aux réponses à nos questions de  1967

    je ne m'en souviens plus. Mais je  suppose  que lorsque je laissais courir

     le stylo dans mes mains adolescentes, escapiste déterminé

    des esprits  m'inspiraient tour à tour chaos ou leur sagesse

    et porté par mon écoute confuse

    je tentais de m'évader de la souffrance programmée

     

    Mais pourquoi devrais je encore m'identifier à ces plaies karmiques ?

    Ne suis je pas adepuis des décennies au fond surtout Oriata

    sauf pour l'Etat Civil, l'étrange étant que seul suscita une écoute

    l'adolescent qui criait à travers le baillon

    et non l'homme qui le renia  et trouva la porte des étoiles

    et tenta d'en partager l'accès, peine perdue

    tant est scotchée au palais des miroirs

    la foule des midinos, midinettes et dominos, dominettes

    quoiqu'entichée de toute révolte abstraite et de consentement aux moeurs

     

    Bref , quand je devins Oriata, je crus , comme l'enfant d'une célébrité

    entraîner la planète à renier  les cauchemars de mon adolescence

    ceux que j'avais subi dans la géhenne génétique et urbaine

     et ceux ceux sublimés ensuite pour habiller mon ignorance de mes cris.

    pari apparemment perdu, ou pas encore gagné, puisque je serais

    encastré dans un no man's land par une sorte d'ostracisme intellectuel.

    Mais dans mon vécu je constaterais plutôt ètre centré 

    dans les cascades de Lumière, tandis que les hérauts 

    plébiscités par la termitière et cajolés par les médias

    m'apparaissent en marge des savantes rivières et des astres.

    Leur musique me lasse comme un cocktail indigeste

    ayant mêlé rythmes sublimes et étendards empoisonnés.

     

    Alors conscient de la puissance presqu'incontestée des simulacre

    pourquoi ruminer encore sur mes années anciennes

    si ce n'est pour éviter d'induire autrui en erreur comme moi même

    en raturant mes traces, en améliorant leur sens 

    devant un public presqu'entièrement virtuel

     j'observe avec mes yeux d'enfant de soixante cinq ans 

    mes convulsions d'adolescence dans les regards de millions de prisonniers.

    Mais ce matin  sur les rivages de Paopao,  seul Taaroa

    est témoin de mes sauts pour naître ailleurs que dans la dimension

    où les `âmes purgent leurs peines d'égos , à quoi bon les punir davantage ?

    Plutôt m'effacer dans le grand air qui accroît le relief de mon regard et du paysage.

    La petite huppe vient picorer le banane  et mon ambition

    personnelle est seulement de m'envoler en esprit avec elle.

     

    _____

     Le texte ci dessus est né d'une tentative de réécriture de la deuxième partie  (ci dessous reproduite) d'une dédicace présente pages 9 et 10 de la première version de mon livre ''La souffrance est inutile'' `publiée en 1968 aux Editions Seghers à Paris .

    Rumination du 22 Novembre 2015

     

     

     

     

     


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